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mercredi 30 janvier 2019

VE6 Comparaison VE / VT polyvalent


Le VE : Innovation pérenne ou rêve écologiste ?
« Dans un monde inondé d’informations sans pertinence, le pouvoir appartient à la clarté. »  Yuval Noah Harari


VE6 - Comparaison CO2 VE / VT polyvalent

6.1. Configurations envisagées

La comparaison porte sur 4 véhicules typiques :
  • VT Essence de 1 300 kg (toutes les masse sont des « PTC »)
  • VT Diesel de 1 400 kg
  • VT Hybride à essence de 1 500 kg
  • VE Electrique de 1 800 kg, équipé d’une batterie de 60 KWh, chargé par de l’énergie électrique de 7 origines possibles :
    • Electrothermique au charbon
    • Electrothermique au fioul
    • Electrothermique au gaz conventionnel
    • Electrothermique au gaz à cycle combiné
    • Electronucléaire pure
    • Issue du mix moyen français de l’année 2017
    • Issue du mix moyen allemand
On aboutit donc à 10 configurations, dont 3 VT plus 1 VE rechargé selon 7 filières.


6.2. Hypothèses de modélisation adoptées

6.2.1. Energie mécanique requise aux 100 km : Nous y intégrons :
  • Travail de la force de roulement,
  • Travail de la force aérodynamique
  • Toute l’énergie cinétique créée pour les VT essence et diesel
  • Un tiers de cette énergie pour le VT hybride et le VE qui en récupèrent les deux tiers.
  • Aucune énergie potentielle
6.2.2. Rendement du « carburant » électrique


Ce rendement qui reste toujours bon prend en compte deux facteurs :
  • La batterie : toute l’énergie électrique y rentre et en sort avec un rendement estimé à 80%
  • Le moteur : son rendement baisse un peu quand le couple croît, mais ce dernier n’est pas toujours au maximum. On adopte 95%
  • Rendement global : 80% x 95% = 76%
6.2.3. Rendement du carburant thermique

La détermination du rendement qui est médiocre (principe de Carnot) est complexe. Nos hypothèses sont résumées ci-dessous :

Rendements moteur VT
Polyvalent
10 à 130 km/h
Urbain 10 à 70 km/h
Détermination
Diesel
34%
25%
Tableau ci-dessous
Essence
29%
22%
Coeff. diesel x 0,85
Hybride essence
37%
27%
Empirique

6.1.1.2.                       Calcul des énergies requises

Méthodologie :

Les paramètres déterminent les énergies, puis le « carburant » requis, mécanique ou électrique

 

Pour chaque masse, nous avons établi un tableau de 13 lignes, de V=10 Km/h à V=130 Km/h par incrément de 10 km/h. Quatre tableaux ont ainsi été établis pour 1300 Kg, 1400 Kg ci-dessous à titre de spécimen, 1500 Kg et 1800 Kg.


Les colonnes donnent les énergies mécaniques, rendements et énergie « carburant » requises par les véhicules :
  • VT D, VT E, et leur moyennes générales et urbaines
  • Rendements et rendements moyen général et urbain
  • Les moyennes pondérées sont calculées sur des plages de vitesse :
    • Polyvalent 10 à 130 Km/h
    • Urbain : 10 à 70 Km/h
  • Les deux colonnes de droite donnent les énergies en base 100 à 130 KM/h.
6.1.2.                  Tableau de calcul du CO2 en usage polyvalent

Les énergies requises aux niveaux « Carburant » et « Mécanique » étant ainsi déterminées, la méthodologie de calcul du CO2 émis figure ci-dessous. On notera que le rendement de Carnot, toujours mauvais, intervient dans les deux cas :

  • Au niveau du moteur thermique du VT 
  • Au niveau de la centrale électrothermique pour le VE
  • Sauf dans le cas de l’énergie électrique hydraulique, éolienne et PV qui ne passent pas par l’énergie thermique, mais qui sont très minoritaires.


Codes couleur :
  • Fond vert : Entrées
  • Chiffres noirs : VT
  • Chiffres bleus : VE
  • Lignes rouges : résultats intermédiaires essentiels
  • Deux dernières lignes en gras : résultat final en termes de CO2.
6.1.3. Résultats et graphes en usage polyvalent

Les consommation moyennes calculées selon ce tableau (7,2 l d’essence ou 5,5 l de gazole aux 100 km) sont largement supérieures aux consommations NEDC, mais elles seront reconnues par les utilisateurs comme étant conformes à l’utilisation réelle, ce qui valide les hypothèses adoptées.

Les émissions  de CO2 de chaque configuration résultant de ce tableau en fonction du kilométrage parcouru, figurent ci-dessous ;
o   en cumul (tonnes)
o   et par kilomètre (gr/Km





Les écarts considérables d’émissions des VT par rapport aux chiffres NEDEC qui sont autour de 110 gr/km, s’expliquent aisément par la prise en compte :
  • De la réalité des consommations, soit +40 gr/km, pour un total de 150 g/km
  • Des émissions amont, évaluée à 20% (selon VE4), soit 30 gr/km, aboutissant à 180 gr/km, asymptote des courbes pour les kilométrages élevés
  • De la TC de fabrication, fixe, donc inversement proportionnelle au kilométrage, et donc extrêmement élevée en début d’utilisation
Le dossier « CO2 Monde » des Echos du 4 décembre donne une moyenne de 259 gr/Km pour un VT essence, cohérente avec ce graphe


6.1.4.              Conclusions sur les TC en usage polyvalent

Courbes en pointillés : véhicules tirant toute leur énergie du carburant.
  • VT à essence, meilleur jusqu’à 40 000 km
  • VT diesel, meilleur  de 40 000 km à 90 000 km
  • VT hybride, pénalisé par sa TC de fabrication plus élevée (batterie, double motorisation), meilleur au-delà de  90 000 km
Courbes en traits pleins, relatives au même VE selon l’origine de son énergie électrique de recharge
  • Française ou nucléaire ou renouvelable, le gain en CO2 est massif au-delà de 45 000 km.
  • Issue du charbon, le VE émet deux fois plus que le VT.
  • Issue des autres filières fossiles, 3 courbes proches) : seule la mieux placée (gaz à cycle combiné) permet au VE de faire mieux que le VT :
    • A essence au-delà de 110 000 km,
    • Diesel au-delà de 150 000 km
    • Hybride à essence au-delà de  200 000 km.
  • Issue du mix allemand, le VE émet plus que le VT, même pour des kilométrages élevés !
Finalement, la seule configuration qui réduit significativement les émissions de CO2 est celle qui réunit :
  • Le VE
  • Et les seules filières renouvelables et nucléaire
6.1.5. Et si on changeait de point de vue ?

« Carburant » requis selon la vitesse, base 130 km/h

Revenons sur les 2 colonnes de droite du tableau des énergies requises de 6.1.1.2., qui donne les besoins en carburant du VE et du VT D, avec base 100% conventionnelle à 130 km/h.



Partant de 130 km/h (au sens du tableau en 6.1.1.2. ci-dessus, comportant de la création et du gaspillage d’énergie cinétique), le carburant requis par le VE :
  • Décroît avec la puissance mécanique requise grâce à un rendement maintenu, voire amélioré à faible vitesse et à la récupération des 2/3 de l’énergie cinétique
  • Grâce à un faible impact énergie cinétique à vitesse basse, dont les 2/3 sont récupérés.
Pour le VT, au contraire, le carburant requis :
  • Décroît d’abord avec la force aérodynamique, 
  • passe par un minimum vers 80 km/h, 
  • puis ré-augmente à plus du 100% en raison du mauvais rendement moteur thermique à puissance très réduite ajouté au plein impact du gaspillage de l’énergie cinétique.
Tous les utilisateurs de VT le savent fort bien : on consomme plus dans les embouteillages que sur autoroute !

Conclusion évidente : le VE est mieux adapté à la ville qu’à la route. Nous reprenons donc la présente comparaison VE vs. VT en usage urbain dans le message suivant.




lundi 28 janvier 2019

VE2.3. Monoxyde de Carbone


Le véhicule électrique : Innovation pérenne ou rêve écologiste ?
 « Dans un monde inondé d’informations sans pertinence, le pouvoir appartient à la clarté. » Yuval Noah Harari 






Les distorsions « soft » : Infox


VE2.3. CO - Monoxyde de carbone
Problème général résolu pour l’automobile

Le monoxyde de carbone résulte de la combustion incomplète du carbone par manque d’air. Il peut être produit en grandes quantités par n’importe quel appareil de chauffage comportant une combustion (bois, charbon, fioul, gaz naturel, GPL…) dans une quantité insuffisante d’air et donc d’oxygène.

L’ancien gaz de ville, dit « gaz à l’eau », obtenu par combustion du coke dans de la vapeur d’eau en contenait 50% en volume selon la réaction : C + H2O àCO +H2. Il a été utilisé par de nombreux suicidés. Il a été remplacé vers 1960 par le gaz naturel (méthane), beaucoup moins toxique.

Toxicité du monoxyde de carbone :
  • Inoffensif jusqu’à 10 000 μg/m3 (1 ppm en volume),
  • Toxique à partir de 220 000 µg/m3 (180 ppm en volume),
  • Mortel au-dessus de 14 000 000 μg/m3 (11 000 ppm, soit 1,2% en volume)…
Un moteur thermique à essence peut en produire si le mélange est trop riche en carburant. Le remplacement des carburateurs par des injecteurs et allumages électroniques a pratiquement éliminé le problème.

Il n’en reste plus que des traces, sévèrement normalisées.

CO

1991
2016
Emissions routières
KT/an
6 000
400
Taux en IdF (toutes origines) à proximité
μg/m3
1 900
450
Valeur limite UE sur 8 heures
μg/m3
10 000
Norme Euro Essence
g/km
Néant
1,0
Norme Euro Diesel
g/km
Néant
0,5




jeudi 20 avril 2017

ENE-farm : L’hydrogène, vecteur d’énergie




Dans son édition du 12 avril 2017, le quotidien « Les Echos » nous annonce par la plume de Yann Rousseau, leur correspondant à Tokyo, le démarrage difficile des « ENE-Farms » basées sur l’hydrogène comme source d’énergie à l’instar des préséries de véhicules à hydrogène
Voir l’article intégral de "Les Echos" en fin du message ci-dessous.



Selon ces informations :
  • L’énergie de base est le gaz de ville du réseau de Tokyo
  • Les ENE-farms en extraient l’hydrogène qui est utilisé immédiatement pour produire de l’électricité dans une pile à combustible (PAC)
  • Les pertes thermiques de la PAC contribuent au chauffage du logement.
  • Le Gouvernement nippon (Mr. Shinzo Abe) considère l’hydrogène comme l’énergie du futur capable d’éviter l’importation de combustibles fossiles et de réduire les émissions de CO2.
  • Le prix unitaire d’une ENE-farm est de 13 000 €.

Selon le site Panasonic :
  • la puissance électrique en continu d’une ENE-farm est de 700 watts.

 Une analyse technico-économique s’impose…
  • Cette architecture dans laquelle l’électricité est fournie par une PAC dont les pertes (environ 50% de l’énergie absorbée sous forme d’hydrogène) sont utilisées pour la chauffage, est un bel exemple de cogénération. On peut estimer la consommation d’énergie primaire à 700 / 50% = 1 400 watts.
  • Pour extraire de l’hydrogène du gaz de ville (gaz naturel, principalement constitué de méthane CH4), sans apport d’énergie extérieure, il faut recourir au vaporeformage auto-thermique (enthalpie nulle) du méthane selon la réaction :  3 CH4 + O2 + 4 H20 à 3 CO2 + 10 H2
  • L’hydrogène ainsi produit ne contient pas de carbone, mais a néanmoins une trace carbone élevée : tout le carbone du méthane est oxydé en CO2, exactement dans la même quantité que si on avait fait brûler le gaz à l’air libre. Aucun progrès à cet égard…
  • Le gaz de ville japonais est entièrement importé. Le Japon étant éloigné des sites d’extraction, et en l’attente d’un possible gazoduc le reliant à la Russie, tout le gaz naturel est importé à l’état liquide par des navires méthaniers. La liquéfaction à -162°C, nécessitée par le transport non pressurisé, en augmente significativement le coût, beaucoup plus que le transport proprement dit.
  • Le stockage sous pression de l’hydrogène gazeux, le plus léger de tous les gaz, est coûteux et limité. Ce stockage permettrait une production différée d’énergie électrique, mais ne semble pas envisagé ici. En effet, tant qu’à stocker l’énergie sous forme de gaz combustible, il vaudrait mieux stocker le méthane primaire que l’hydrogène, car il est 8 [car (CH4=16)/(H2=2) = 8 ] fois plus lourd bien que 2,8 fois moins énergétique en masse, donc finalement 3 fois moins coûteux à stocker . L’ENE-farm n’est donc en rien une manière de stocker l’énergie pour pallier l’intermittence des énergies renouvelables éolienne et photovoltaïque.
  • L’avantage de la cogénération est à comparer avec la solution concurrente : la production électrique par une centrale à gaz à cycle combiné, trop puissante pour pouvoir être domestique, mais qui atteint un rendement de 58%. Le gain, uniquement thermique, imputable à l’ENE-farm est donc de 100% - 58% = 42% de l’énergie latente du méthane utilisé évaluée à 1 400 watts, soit 590 watts.
  • L’investissement de 13 000 € à cet effet correspond à 22 K€/KW, à comparer avec celui du nucléaire post-Fukushima qui est de l’ordre de 4 G€/GW, ou encore 4 K€/KW. Il est donc 5,5 fois plus cher, avec une durée de vie très largement inférieure. Il est même environ 15 fois plus cher si l’on considère qu’un KWh électrique a 3 fois plus de valeur qu’un KWh thermique.
Le commentaire du Premier ministre japonais, qui a l’excuse de ne pas être un spécialiste, n’a aucun sens :
  • L’hydrogène n’est pas une source d’énergie, mais un simple vecteur, tout comme l’électricité. Il souffre par apport à elle, de médiocres rendements de conversion, et d’un stockage pondéreux, mais illimité dans le temps.
  • Il n’évite ni l’importation de combustible fossile, ni l’émission de CO2.
  • Le seul avantage significatif de l’ENE-farm est la dualité de l’approvisionnement énergétique : elle permet à l’abonné au gaz de produire son électricité en quantité suffisantes (700 W) pour s’éclairer par des LEDs et utiliser ses appareils numériques dans un logement moyen, à l’exclusion de tout chauffage (qui est fait au gaz) ou du gros électroménager. Mais cet avantage transitoire peut être obtenu par un petit groupe électrogène portable qui coûte… 50 fois moins cher !
Il n’y a donc rien de surprenant à ce que Panasonic et ses concurrents peinent à faire décoller ce produit en dépit d’énormes subventions de l’Etat japonais.

Tout ceci illustre parfaitement le bien-fondé de la position de Jean Tirole qui préconise de fixer un prix unique et universel du carbone et de laisser le marché, qui intègre ce prix, choisir les solutions les moins onéreuses, et donc les plus efficaces. Les actions dirigistes des états, toujours entachées de considérations politiques, voire démagogiques, ne sont jamais à l’optimum économique et écologique, et peuvent même s’avérer être à son antipode : voir notre message : «  Le contre-exemple allemand »







Texte intégrale de l’article de « Les Echos » du 12 avril 2017
Au Japon, 200.000 maisons sont branchées sur des piles à combustible

Le gouvernement nippon rêve d’une société fonctionnant à l’hydrogène mais n’arrive pas à faire décoller les ventes des «ENE-farms»

Yann Rousseau
@Yannsan — Correspondant à Tokyo


Si Toyota et Honda veulent croire que l’hydrogène pourrait remplacer l’essence dans les berlines du futur, des électriciens nippons et des géants de l’électronique estiment, eux, que les familles de l’Archipel pourraient bientôt massivement choisir d’alimenter leurs maisons et leurs appartements avec des piles à combustible. Dans les quartiers en pleine mutation, comme près d’Ikebukuro dans le nord de Tokyo, de plus en plus de hauts placards blancs marqués des mots « ENE-farm » font ainsi leur apparition au dos des maisons neuves. Reliés au réseau de Tokyo Gas, ces générateurs extraient l’hydrogène du gaz de ville et produisent lors d’une interaction avec de l’oxygène de l’électricité ainsi que de la chaleur pour le logement. Sur le papier, cette énergie est une aubaine pour le Japon. Le Premier ministre japonais, Shinzo Abe, aime ainsi décrire l’hydrogène comme « l’énergie du futur » pour l’Archipel, qui doit importer pour le moment, au prix fort, la totalité du charbon, du gaz et du pétrole qu’il consomme dans ses centrales électriques. Avec ces piles à combustible qui ne rejettent que de l’eau, le pays pourrait aussi réduire ses émissions de gaz à effet de serre. Cette technologie pourrait, enfin, lui permettre de garantir un minimum de production de courant lorsque des catastrophes naturelles endommagent le réseau électrique conventionnel. Le prix, barrière à l’entrée Pourtant, les ventes de cette technologie ne progressent que très lentement au Japon. L’an dernier, Panasonic, qui contrôle plus de 50 % du marché, n’a écoulé que 23.700 ENE-farms. En cumulé, cela représente 100.000 installations pour la marque depuis le lancement de cette solution en 2009, sur un marché total évalué à 200.000 unités. « Cela ne correspond qu’à 0,5 % de foyers équipés », note un analyste. « Nous anticipons une croissance un peu plus rapide avec le recul du prix des installations et l’offre de systèmes moins encombrants », assure Kyoko Ishii, une porte-parole de Panasonic. Les objectifs gouvernementaux sont encore lointains. Tokyo avait espéré 1,4 million de logements équipés en 2020 puis 5,3 millions en 2030. Les dernières projections n’anticipent qu’un demi-million d’unités en place dans trois ans. « Nous ne voyons pas le pays atteindre ses objectifs de déploiement », confirme Ali Izadi-Najafabadi, un analyste de Bloomberg New Energy Finance à Tokyo. Le prix reste une barrière à l’entrée élevée pour les familles. Une « ferme » coûte encore environ 1,6 million de yens (13.000 euros) dans le pays. « Le Japon étant le seul pays à promouvoir les ENE-farms, le rythme de réduction des coûts est lent », note l’expert. Profitant d’une intense compétition internationale, les installations couplant des panneaux solaires à des batteries lithium-ion pour les maisons de particuliers ont dans le même temps vu leurs prix s’effondrer au point de devenir meilleur marché que les technologies à l’hydrogène, que le gouvernement subventionne de moins en moins généreusement. Par ailleurs, la dérégulation en avril 2016 du marché de l’électricité au Japon a enfin permis aux géants du gaz de vendre directement de l’électricité aux particuliers. « De ce fait, ils ont moins de motivation à vendre des ENE-farms », note Ali Izadi-Najafabadi. Conscients de ces résistances, les acteurs japonais de la filière se lancent à la conquête des marchés étrangers. Panasonic a ainsi commencé la promotion, avec le groupe Viessmann, de systèmes à l’hydrogène en Allemagne. Dans les prochains mois, le leader japonais s’intéressera à la Grande-Bretagne, l’Autriche et la France.

jeudi 30 mars 2017

Cogénération : possibilités et limites selon Carnot



Résumé

La production d’énergie électrique passe toujours (sauf les PPV) par la production d’énergie mécanique, elle-même majoritairement produite à partir d’une énergie primaire thermique d’origine nucléaire, fossile ou renouvelable. Cette transformation entraîne des pertes résultant du principe de Carnot selon lequel le rendement de transformation est inférieur à (1 - T2/T1)   dans laquelle T1 et T2 sont les températures absolues du fluide thermodynamique (vapeur d’eau ou gaz de combustion) respectivement au début et à la fin du cycle de transformation. Il faut donc que T1 soit aussi élevée que possible, et T2 aussi basse que possible. Des pertes technologiques importantes et diverses s’y ajoutent.

La cogénération consiste à récupérer la chaleur restituée à la température T2 ainsi que les autres pertes thermiques. Elle n’a donc d’intérêt que si T2 n’est pas trop basse, en sachant qu’il n'est jamais intéressant d’augmenter délibérément T2 pour récupérer de la chaleur à une température plus élevée, car cela pénaliserait de presque autant la production d’énergie mécanique. La cogénération est donc limitée aux filières dont la technologie aboutit à une température T2 assez élevée. Ainsi :
  •       Toutes les filières (très majoritaires) faisant appel à des turbines à vapeur dont T2 peut être abaissée par des condenseurs refroidis par l’eau de la mer, des fleuves ou des réfrigérants atmosphériques, sont exclues quel que soit la mode de production thermique : électronucléaire, charbon, fioul, gaz.
  •         Les centrales à turbines à gaz auraient pu convenir, mais leur évolution vers les centrales à gaz à cycle combiné (un étage amont à combustion interne avec une T2 élevé qui devient la T1 de l’étage aval à vapeur) a débouché sur une T2 aval très basse permettant une amélioration spectaculaire du rendement, mais excluant la cogénération.
  •         Les installations de production électrique locales de petite ou moyenne taille à moteur diesel ou à gaz (naturel ou bio) dont le rapport de détente est limité, donc T2 assez élevée, sont propices à la cogénération.
Conclusion :

La cogénération est une amélioration relative permettant sans surcoût excessif, d‘ajouter une production thermique à une production électrique de rendement basique, mais le but premier en matière énergétique reste l’amélioration des rendements aux différents niveaux, et non de faire un bon usage d’un médiocre rendement.

La cogénération s’est néanmoins développée, notamment en Europe du nord, car elle améliore le rendement des moyens de production électrique décentralisés, bien que cette décentralisation soit une erreur stratégique majeure : comme pour tous les produits industriels, la production électrique de masse assure une haute mutualisation de moyens performants, et donc, finalement, une moindre trace carbone.

Message

La cogénération est souvent considérée comme étant presque verte en ceci qu’elle permet de disposer d’énergie thermique s’ajoutant à l’énergie électrique sans augmenter la consommation d’énergie primaire. Et l’on voit ce procédé équiper des éco-quartiers, être paré de toutes les vertus, et être envisagé dans des applications impossibles. Faisons la part des choses…

Base théoriques : Carnot-Clausius (2ème principe de la thermodynamique)

Les travaux de l’ingénieur français Sadi Carnot (1796 – 1832) sur l’énergie mécanique que les « machines à feu » sont capables de fournir, l’amènent à poser en 1823, à 27 ans, les bases qui conduiront au deuxième principe de la thermodynamique, en affirmant que :
  •    l’énergie mécanique pouvant être tirée de la chaleur ne dépend que de la différence des températures (et non pas des pressions) entre le début et la fin de cycle,
  •         le gaz ou fluide utilisé est indifférent,
  •         le cycle idéal, c’est-à-dire sans transfert indésirable de chaleur, doit être parfaitement réversible,
  •         dès lors, le mouvement perpétuel est impossible.



Sadi Carnot en uniforme de polytechnicien

Son ouvrage, dépourvu de bases mathématiques, mais étonnamment pertinent à une époque où la physique et la chimie étaient encore balbutiantes, resta toutefois méconnu jusqu’à ce qu’il soit redécouvert une génération plus tard, bien après sa mort, par les physiciens anglais William Thomson annobli en Lord Kelvin, 1824 – 1907), et allemand Rudolf Clausius (1822 - 1888) qui le complétèrent par l’échelle de température absolue, dite Kelvin, et par formule :  E = Q (1-T2 / T1) dans laquelle :
  •          Q est la quantité de chaleur (en joules) utilisée pour chauffer un fluide (la vapeur d’eau à cette époque)
  •          T1, dite source chaude, est la température absolue du fluide thermodynamique en début de cycle
  •          T2, dite source froide, est la température absolue du fluide thermodynamique en fin de cycle,
  •         E (en joules) est l’énergie mécanique maximum théorique qu’il est possible d’obtenir entre le début et la fin du cycle


William Thomson anobli en Lord Kelvin


Rudolf Clausius

Un bon rendement nécessite donc T1 aussi élevé que possible, et T2 aussi bas que possible, d’où l’usage dans les cycles utilisant la vapeur d’eau, de condenseurs refroidis par la mer, ou l’eau d’un fleuve, souvent après passage dans un réfrigérant atmosphérique. Ces derniers (photo ci-dessous) ne sont qu’une cascade dans laquelle une petite partie de l’eau du fleuve s’évapore en refroidissant le reste.  

Clausius généralisa ce principe par la notion d’entropie en 1865 définie comme :
S = cycle dQ / T
 Dans laquelle :
·         S est l’entropie, en joules par degré
·         dQ est l’élément de transfert indésirable de  chaleur
·         T est la température absolue au moment du transfert
Selon cette définition, un cycle de transformation parfaitement réversible est à entropie nulle.

Insistons sur le fait que ces principes sont universels et s’appliquent quels que soient les fluides ou les mélanges de fluides considérés, et leurs changements d’états. L’énergie mécanique récupérable est un maximum théorique qui serait obtenu par une machine idéale sans frottements, sans échanges thermiques indésirables, avec des transformations réversibles, dites « isentropiques » sans laminage, ni turbulences. L’énergie mécanique effectivement récupérée est donc significativement inférieure à ce maximum théorique.

Rendement d’une conversion thermique / mécanique

Notations :
  •        Q1 est la chaleur fournie par la source chaude à la température T1
  •     Qp est la chaleur perdue par frottements, transferts de chaleur indésirables, turbulences et et irréversibilités dans le fluide,
  •          Q2 est la chaleur restituée à la source froide à la température T2

 Le rendement théorique d’un cycle de Carnot-Clausius dans la transformation de chaleur en énergie mécanique est :
η = E/Q1 = 1- T2/T1 = (Q1 - Q2)/Q1

Le rendement réel peut s’écrire :  
η = (Q1 Qp - Q2)/Q1 = 1- Q2/Q1 Qp/Q1

Cette expression montre bien qu’un cycle de Carnot-Clausius réel produit de la chaleur de deux manières :
  •       Chaleur restituée à la source froide, c’est à dire Q2 = Q1T2/T1, disponible à la température T2 relativement basse. C’est par exemple la chaleur des gaz d’échappement d’un moteur à combustion interne (à pistons ou à turbine)
  •     Chaleur Qp perdue comme indiqué ci-dessus, évacuée principalement l’eau de refroidissement dans les moteurs à combustion interne.


Rendement d’une cogénération

La cogénération est la réutilisation des pertes thermiques d’un cycle de Carnot-Clausius réel aux fins d’application en chauffage. Pour que ceci ait un intérêt, encore faut-il que Qp et Q2 soient disponibles à des températures notablement supérieures à la température ambiante.

L’expression usuelle du rendement d’une installation de cogénération qui additionne les énergies électrique et thermique produites avant de les rapporter à l’énergie thermique primaire est fallacieuse, car seule la part de cette chaleur disponible à une température suffisamment élevée doit être prise en compte : l’eau tiède est difficilement utilisable, sinon pour élever des crocodiles à Pierrelatte à partir de l’eau réchauffée par les condenseurs de la centrale nucléaire du Tricastin à proximité immédiate, intéressante dans son principe, mais assez peu commune.

On peut toujours augmenter la chaleur Q2 en relevant la température T2 de la source froide, mais dans ce cas, une forte proportion de la chaleur ainsi récupérée sera à déduire directement de la production d’énergie mécanique. En théorie, c’est même la totalité, mais en pratique pas tout à fait, car Qp baisse aussi.

Il s’en suit qu’en règle générale, la cogénération :
  •       N’est pas applicable aux turbines à vapeur pour lesquelles on maîtrise le rapport de détente, et donc T2 dont la température est fixée un peu au-dessus de celle du fluide utilisé pour le refroidissement du condenseur, ce qui exclut toutes les centrales électronucléaires, au charbon et au fioul, et les anciennes centrales au gaz, ainsi que les centrales au gaz « vert » (méthane agricole) ou à la biomasse (bois et déchets végétaux).
  •    Est applicable uniquement aux moteurs à combustion interne dans lesquels le rapport de détente :
    •        est fixe et égal au rapport de compression, comme les moteurs diesel
    •        ou est  trop coûteux à augmenter, comme les turbines à gaz
ce qui amène à des températures d’échappement élevées, et donc réutilisables.

Tour d’horizon de ces principes

Le tableau ci-dessous récapitule les principales installations de transformation de chaleur en énergie mécanique, en donnant pour chacune leurs principales caractéristiques.


Le haut du tableau regroupe les installations à combustion interne, et les bas, celles à combustion externe.

Toutes ces installations consomment de la chaleur d’origine fossile ou nucléaire, et produisent de l’énergie mécanique. Dans tous les cas ci-dessus, cette énergie mécanique est transformée en énergie électrique par un alternateur dont le rendement est excellent, sauf les véhicules qui utilisent directement l’énergie mécanique pour leur propulsion, mais ceci ne change rien aux principes.

Nous avons vu que pour avoir un bon rendement de conversion, il faut que le fluide thermodynamique parte d’une température aussi élevée que possible, et parvienne par détente à une température aussi basse que possible. Examinons les limites :

La limite de température élevée T1 peut résulter de contraintes :
  •          De la physique dans les moteurs à pistons à combustion interne : un mélange stoechiométrique (proportions optimum) d’air et de carburant donne une température élevée, mais qui est ce qu’elle est. On ne peut pas l’augmenter, mais on peut la diminuer en réduisant la proportion de carburant. On pourrait l’augmenter en remplaçant l’air par de l’oxygène pur, pour un prix évidemment dissuasif, et en tombant probablement dans le problème ci-dessous.
  •          De la technologie : la température limite d’utilisation des matériaux constitutifs d’une turbine à gaz ou du cœur d’une centrale nucléaire, et particulièrement de ceux qui sont mobiles (aubes des turbines) : contrairement à ceux d’un moteur à pistons, les éléments d’une turbine, constamment immergés dans le fluide thermodynamique, sont à la même température que lui et soumis à une très forte force d’inertie (appelée à tort « centrifuge »).
  •          Dans le cas des machines à combustion externe (générateur de vapeur des centrales à charbon, à fioul ou nucléaires à eau primaire pressurisée, dites « EPR »), de la présence d’un échangeur qui réduit un peu T1.

La température basse T2 résulte de la température initiale et du rapport de détente adiabatique :
·   Pour les moteurs à pistons à combustion interne, qu’ils soient diesel ou à gaz naturel ou biogaz, T2 ne dépend que du rapport de détente, et reste toujours inférieur à l’optimum. On peut augmenter ce rapport au prix d’une perte de puissance par le cycle d’Atkinson, rarement utilisé. Le gaz en fin de cycle est encore très chaud, faute de détente suffisante, et cette chaleur est réutilisable :
o  pour le chauffage dans la totalité des véhicule. En fait, les pertes par l’eau de refroidissement Qp (frottements dans le cylindre et pertes de chaleur indésirables ne résultant pas de Carnot-Clausius,) sont suffisantes et plus faciles à utiliser. Le chauffage d’habitacle (à l’exclusion de la climatisation) est donc gratuit : il n’augmente pas la consommation.
o     pour de la cogénération par récupération de la chaleur des gaz d’échappement (Q2) par un échangeur. Cette chaleur s’ajoute à celle (Qp) résultant de l’eau de refroidissement et peut être utilisées pour du chauffage urbain.


·      Pour les turbines à gaz simples, le rapport de détente n’est limité que par le coût d’un nombre plus élevé d’étages de turbine. T2 n’est pas très élevée, et la chaleur disponible seulement à l’état gazeux. La récupération est possible, mais peu usitée.
·      Pour les turbines à gaz à cycle combiné, T2 est très bas, ce qui leur permet d’afficher plus de 55% de rendement, un chiffre jamais égalé auparavant, toutes technologies confondues, avec pour contrepartie l’impossibilité de récupérer la chaleur d’une eau à peine tiède : pas de cogénération possible.


Conclusion :

La cogénération est une amélioration relative permettant sans surcoût excessif, d‘ajouter une production thermique marginalement gratuite à une production électrique de médiocre rendement.  Le but premier en matière énergétique reste l’amélioration des rendements aux différents niveaux, et non de faire un bon usage d’un médiocre rendement, surtout si l’on cherche prioritairement à réduire les émissions de CO2.

Exemple : si on chauffe un bâtiment avec de l’électricité produite par une centrale à gaz à cycle combiné (rendement 55%) alimentant des pompes à chaleur aérothermiques (rendement 200%) on arrive à un rendement global de 110%, plus de deux fois supérieur au rendement global d’une centrale de cogénération, et à émettre moitié moins de CO2.

La cogénération s’est néanmoins développée, notamment en Europe du nord, car elle améliore le rendement des moyens de production électrique décentralisés, bien que cette décentralisation soit une erreur stratégique majeure : comme pour tous les produits industriels, la production électrique de masse assure une haute mutualisation des moyens, et donc :
  •      une moindre puissance installée nécessaire (tous les abonnés ne consomment pas en même temps)
  •       un moindre investissement à puissance égale par effet d’échelle ( un alternateur de 1 GW ne coûte pas 100 000 fois plus cher qu’un alternateur de 10 KW)
  •          un meilleur rendement (≈ 99,9% à 1 GW, contre ≈ 90% à 10 KW)
  •          et une moindre trace carbone, surtout si l’on se décide à fixer un prix universel du CO2