lundi 5 décembre 2016

Energies vertes et concurrence : l'abondement


Dans son édition du 5 décembre 2016, le quotidien « Les Echos » nous informe par un article de Anne Veitz et Véronique Le Billon, de la publication par la Commission Européenne d’un « paquet énergie » qui vise à mettre un peu d’ordre dans les subventions aux énergies vertes, ce qui ne manque évidemment pas d’alarmer certains de leurs acteurs. Ces dispositions comportent trois nouveautés principales :

1 - Neutralité technologique

Un appel d’offres peut être lancé sans référence à une technologie particulière, la réponse pouvant être solaire, éolienne ou autre, au choix du soumissionnaire. Ceci permettra de faire la vérité sur la compétitivité relative des différentes filières, ce qui est un progrès.
L’argument des fabricants selon lesquels ces dispositions les priveraient des volumes permettant de baisser les coûts ne sont pas recevables : tous les secteurs de l’industrie sont confrontés à ce dilemme, et il n’y a aucune raison d’en exempter les filières de l’énergie verte selon des critères nécessairement arbitraires et donc peu pertinents.

2 - Fin de priorité d’injection

L’utilisation prioritaire des énergies vertes par les opérateurs de réseaux conduit ces derniers à de lourdes pertes ; il est arrivé, notamment en Allemagne, que l’énergie rachetée par eux au prix administré ait due être revendue à un prix négatif, tant leur production excédait la demande. En outre, la nécessité d’ajuster constamment la production à l’offre, problème majeur et permanent des réseaux de distribution, doit être fait de préférence par les moyens de production les plus souples : il est très facile de réduire ou d’arrêter une éolienne en agissant sur le pas de la turbine, ou de réduire la production d’un panneau PV en laissant monter la tension sur les éléments, ou en les déconnectant.

3 - Réduction des biocarburants de première génération

A la surprise générale, mais non sans pertinence, La Commission veut réduire la part des biocarburants de 7% en 2020 à 3,8%, guère plus de la moitié, en raison de leurs effets pervers sur la production alimentaire et sur la déforestation.

4 - L’abondement reste à inventer par la Commission !

Depuis la création de notre blog en 2012, nous dénonçons les avantages indus octroyés aux filières vertes pour leur apporter une compétitivité factice au détriment des abonnés aux réseaux électriques, et sans effet significatif, voire avec un effet négatif sur les émissions de CO2 dont la réduction demeure une priorité. Il est donc clair que nous approuvons sans réserve ces nouvelles dispositions. Elles ont d’ailleurs été largement anticipées par l’Allemagne en juin 2016.

Nous avons aussi longuement analysé et souligné les effets pervers de l’intermittence de la production qui oblige à créer des moyens de production thermiques de même capacité (l’hydraulique n’étant pratiquement pas extensible) sous astreinte (en « standby »), constamment capables de pallier la réduction ou l’arrêt imprévues de la puissance verte. Voir les messages sur Cestas et Halidade.

Mais la Commission n’a pas (encore ?) utilisé le dispositif que nous préconisons depuis 2014 pour améliorer la compétitivité des énergies vertes : l’abondement. Il consiste à laisser les producteurs d’énergies vertes revendre leur production à l’opérateur de réseau au prix de marché, en les aidant par un abondement calculé en pourcentage des paiements qu’ils reçoivent de l’opérateur de réseau. Ce pourcentage serait fixé par le moins-disant de l’appel d’offres technologiquement neutre. Le coût de l’abondement est répercuté dans la CSPE. Son taux rappelle constamment le progrès qui reste à parcourir pour atteindre la compétitivité réelle.

De portée beaucoup plus générale que les dispositions ci-dessus, l’abondement entraîne non seulement la fin de la priorité d’injection qui n’a plus de raison d’être, puisqu’elle était nécessaire en raison du prix fixe élevé, mais aussi l’optimisation des installations, notamment solaires à panneaux PV, pour optimiser la production en hiver (quand on en a besoin) plutôt qu’en été (quand on n’en a pas besoin). Il fait coïncider l’intérêt particulier (du producteur) à l’intérêt général (de l’abonné).

mardi 22 novembre 2016

Comparaison électrique / diesel / essence



Table des matières du blog www.8-e.fr

Sujets connexes
Emissions de CO2 sur investissement et exploitation par filière de production


Résumé

Les Renault Zoé électrique, Twingo essence et Clio diesel sont des véhicules urbains d’entrée de gamme comparables. La Zoé est vendue avec un contrat de location de la batterie qui débarrasse le client du risque lié à la batterie et lui apporte une bonne prévisibilité des coûts. La comparaison des trois véhicules est ainsi très pertinente.

Autonomie 
  • Grâce au calculateur, supposé sincère, proposé par Renault, il est possible de déterminer l’autonomie selon la vitesse, la température extérieure et le type de jantes. Dans les conditions optimum, l’autonomie annoncée de 250 km, est confirmée à des vitesses modérées, inférieures à 90 km/h, mais tout excès de vitesse et/ou froid vif ramènera rapidement cette autonomie vers moins de 200 km, voire 150 s’ils se cumulent.
  • Si l’on utilise une batterie usagée dont la capacité est réduite de 25%, et que l’on veut conserver une marge de sécurité de 20%, les chiffres précédents sont presque à diviser par deux : l’aller et retour des villes nouvelles au centre de Paris reste jouable, mais de justesse : la préoccupation relative à la décharge de la batterie sera présente.
  • Par comparaison, malgré des hypothèses très prudentes quant à la consommation (majoration d’un tiers des chiffres officiels NDEC, plus majoration jusqu’à 60% moteur froid), les Twingo (35 litres d’essence) et Clio (45 litres de gazole) offrent respectivement 480 km et 810 km en valeur typique, soit 3 ou 5 fois plus que la Zoé. La préoccupation d’autonomie disparaît.
Coût du carburant et du véhicule
Pour la Zoé, le prix du carburant s’entend prix de location de la batterie inclus.
  • On constate que, contrairement aux comparaisons biaisées n’incluant pas le coût de la batterie, le « carburant » électrique est toujours plus coûteux que l’essence, sauf au-dessus de 20 000 km par an, kilométrage rarement atteint par des véhicules urbains. La Clio diesel a le prix le plus bas autour de 0,06 €/km, la Twingo autour de 0,08 €/km, alors que la Zoé, partant de 0,15 €/km pour 6 000 km/an, atteint encore 0,10 €/km pour 12 000 km/an. Le prix du risque batterie n’étant sans doute pas très différent du prix de location, le prix très bas d’utilisation d’un véhicule électrique au long cours, est donc un mythe.
  • Si l’on compare les coûts d’utilisation des véhicules, amortissement et entretien inclus, et bonus écolo déduit, le résultat ci-dessus change peu : le véhicule électrique est le plus cher, mais se rapproche des autres pour les kilométrages élevés, supérieurs à 20 000 km/an. La Twingo à essence est la moins chère, mais perd son avantage pour les kilométrages élevés dont la Clio diesel a besoin pour amortir son surcoût d’achat par rapport à la Twingo, laquelle apparaît comme le meilleur choix économique en usage urbain.
Conclusion

Pour l’utilisateur :
  • La Zoé est plus chère à l’achat et à l’utilisation qu’une Twingo ou une Clio, avec l’inconvénient d’une autonomie très limitée.
  • Ses avantages de silence, de conduite simple et apaisée et d’entretien réduit ne compensent pas ses inconvénients. Seule, l’image peut la sauver.
 Pour la collectivité :
  • La Zoé, exempte de pollution locale et de bruit, est un véhicule citadin idéal. Une forte réduction des émissions de CO2 s’y ajoute, mais uniquement dans les pays disposant d’une électricité décarbonée, dont la France.
  • La trace carbone de fabrication des véhicules thermiques est rarement prise en compte, car mal connue, mais elle est loin d’être négligeable. Le supplément dû à la batterie des véhicules électriques, pourrait révéler quelques très mauvaises surprises !
  • Entre le bonus à l’achat et l’absence de TICPE et TVA sur le carburant, l'avantage fiscal consenti à un véhicule électrique dépasse, sur sa durée de vie, le prix d’achat d’un véhicule thermique équivalent, comme si ce dernier était offert au client ! Ceci ne pourra pas être maintenu indéfiniment, et relativise fortement la "compétitivité" des véhicules électriques.
Développement

Renault propose trois véhicules d’entrée de gamme :
  • La Zoé « Life », motorisation R75 (la meilleure autonomie), purement électrique, avec batteries louées par l’utilisateur.
  • La Twingo « Zen », véhicule urbain exclusivement à essence.
  • La Clio « Life », disponible en version diesel moyennant un supplément significatif.




Dans un véhicule, l’énergie mécanique d’origine électrique (peu taxée) est manifestement beaucoup moins chère que l’énergie d’origine thermique très taxée (TICPE et TVA). Pour autant, on ne peut rien conclure sans prendre en compte le facteur de coût prépondérant qui est le remplacement de la batterie, pouvant approcher les 10 000 €. Or la durée de vie de la batterie est mal connue faute d’expérience, et dépend d’une foule de paramètres. Pour l’acquéreur d’un véhicule tout électrique, c’est une incertitude majeure.

Pour tous ses véhicules électriques, Renault propose uniquement une location des batteries selon un barème qui prend en compte le kilométrage effectué. Le risque « batterie » est donc supporté par le constructeur, et l’acquéreur bénéficie ainsi d’une vision claire de ses coûts, à partir de laquelle une comparaison avec les deux sources d’énergie thermique usuelles, l’essence et le gazole, est aisée.

Nous y procédons ci-dessous, en termes d’autonomie et de coût.

Véhicules


Les puissances sont très proches : 52 à 55 KW. Toutefois, la transmission CVTX (variateur mécanique continu) de la Zoé a un rendement et une ouverture (ratio des rapports extrêmes) inférieurs à une boîte conventionnelle à 5 vitesses. La Zoé est aussi 31% plus lourde que la Clio, ce qui se répercutera sur les accélérations. La Twingo, moins puissante, mais de loin plus légère, dispose du meilleur rapport puissance/masse.

Sans surprise, avec une vitesse maximum de 135 km/h, la Zoé n’est pas une autoroutière. Bien qu’également présentée comme citadine,  la Twingo permet la circulation sur autoroute avec une réserve de puissance limitée (maximum 156 km/h) par l’effet aérodynamique de sa hauteur supérieure, rançon de sa faible longueur de citadine. La Clio est la plus polyvalente.

Les dimensions extérieures sont proches, avec toutefois 10 cm de moins en hauteur sur la Clio, et 45 cm de moins en longueur sur la Twingo. Toutes sont des deux portes avec hayon arrière.

Autonomie

Renault propose aussi sur son site « Zoé » un calculateur d’autonomie qui prend en compte la vitesse du véhicule, la température extérieure (chauffage ou climatisation qui pénalise l’autonomie) et les jantes. Il se base sur une batterie neuve de 22 KWh et ne comporte pas de marge de sécurité. Nous le considérons par hypothèse comme sincère.

Les consommations affichées des véhicules thermiques étant notoirement sous-estimées, nous avons retenu comme consommation à chaud, la moyenne des consommations (urbain + extra urbain) affichées majorée d’un tiers (+33%). Pour les petits trajets commencés à froid, ces consommations ont en outre été affectées d’un coefficient 1,6 pour un trajet de 2,5 km (100 km en 20 jours par mois) se réduisant progressivement à 1,0 pour un trajet supérieur à 45 km (1 800 km en 20 jours par mois). Bien qu’approximatifs, ces chiffres sont réalistes, en aucun cas optimistes.

Prenons le Zoé dans le cas le plus favorable :
  • Batterie 22 KWh neuve
  • Jantes 15 pouces
Le graphe ci-dessous donne l’autonomie en fonction de la vitesse et de la température. Il montre un optimum vers 50 km/h, et une décroissance en-dessous (impact des consommateurs fixes, notamment du chauffage en hiver), comme au-dessus (apparition des pertes aérodynamiques, rapidement prépondérantes).


Par temps doux, en usage urbain incluant des voies rapides jusqu’à 90 km/h, on pourra compter sur 250 km d’autonomie, qui est d’ailleurs la distance pratique annoncée par Renault dans ses documents commerciaux. Mais par grand froid, il vaudra mieux tabler sur 200 km.

Tout excès de vitesse se paiera très cher en autonomie : à 110 km/h, l’autonomie se réduit à 200 km en été, ou 150 en hiver. A 130 km/h, on perd 40 km de plus, vers   160 et 110  km.

Les chiffres ci-dessus sont compatibles avec un usage quotidien entre les villes nouvelles (Cergy-Pontoise, St-Quentin-en-Yvelines, Marne-la-Vallée) et le centre de Paris en conservant une bonne marge de sécurité, avec une recharge par nuit.

Mais une batterie n’est pas éternellement neuve loin de là : sa capacité décroît et son remplacement n’est proposé par Renault qu’à partir de 25% de baisse. Il faut aussi intégrer une décharge maximum de 80% de la batterie, soit une marge de sécurité de 20%, et le client a le droit de choisir des jantes 17 pouces. Que  devient l’autonomie dans ce cas moins favorable ?


La chute est sévère par rapport au cas favorable précédent. 

Reprenant le cas du temps doux, en usage urbain incluant des voies rapides jusqu’à 90 km/h, l’autonomie est ramenée à 130 km, réduite à guère plus de 100 km par temps froid : elle est donc pratiquement divisée par deux par la prise en compte du vieillissement de la batterie et de l’indispensable marge de sécurité.

A vitesse élevée, à proscrire par temps froid, l’autonomie repasse sous la barre des 100 km : 80 km à 110 km/h, ou pire, 70 km à 130 km/h.

Notre banlieusard des villes nouvelles devra faire des recharges complètes, être attentif à sa batterie, et ne pas dépasser 90 km/h s’il fait froid. C’est jouable, mais la préoccupation sera permanente, et aucun imprévu n’est permis.

A titre de comparaison, selon les critères pessimistes de consommation retenus ci-dessus, les véhicules thermiques offrent :
  • Twingo : un réservoir de 35 litres d’essence permettant de 380 à 600 km selon la longueur des trajets avec démarrage à froid.
  • Clio : un réservoir de 45 litres de gazole permettant de 640 à 1020 km selon les mêmes facteurs.

Ces autonomies ne dépendent que peu de la vitesse en dessous de 90 km/h, et sont indépendantes de la température extérieure. Elles sont pratiquement 3 à 5 fois supérieures à celle de la Zoé.

Coût du carburant et du véhicule

Renault propose à ses clients le barème de location de la batterie suivant :
  • Jusqu’à 7500 km/an : forfait mensuel de 69 €
  • A delà de ce plafond : 0,05 € /km
  • Ou forfait mensuel de kilométrage illimité de 119 €.
Le coût du carburant électrique doit prendre en compte ce coût de location de batterie, largement prépondérant. Le prix du KWh s’y ajoute : il dépend largement des conditions de recharge et du tarif EDRF (base, jour/nuit, tempo…). Nous avons adopté pour l’analyse un prix fixe de 0,159 €TTC/Kwh, CSPE incluse.

La consommation est éminemment variable selon une foule de paramètres. Nous nous basons pour la comparaison sur une consommation plutôt optimiste de 8 KWh/100 km qui autorise en moyenne une autonomie de (22 / 8) x 100 = 275 km.

A noter que 8 KWh = 28,8 MJ (mégajoule) = 0,685 kg d’hydrocarbure, soit approximativement 0,8 litre de gazole ou un 1 litre d’essence. Ceci semble très bas, mais il ne faut prendre en compte le fait qu’un moteur électrique a un rendement 3 à 4 fois supérieur à un moteur thermique. Les consommations thermiques équivalentes seraient donc 3 à 4 litres d’essence ou 2,4 à 3,2 litres de gazole, ce qui est cohérent.

Sur ces bases, le prix du « carburant » (incluant la location de batterie) ressort comme suit :



On constate que, malgré son image d’économie due aux comparaisons biaisées n’incluant pas le coût de la batterie, le « carburant » électrique est toujours plus coûteux que l’essence, sauf au-dessus de 20 000 km par an, kilométrage rarement atteint par des véhicules urbains.

En dépit des récents réajustements fiscaux de la TICPE en faveur de l’essence et au détriment du gazole, ce dernier reste largement compétitif en coût, mais nous verrons plus loin que cette compétitivité peine à amortir le coût plus élevé du véhicule diesel.

Prenons maintenant en compte les coûts du véhicule :
  • Amortissement du prix d’achat (bonus électrique déduit) sur 8 ans ou 160 000 km (le premier des deux). La plus grande longévité supposée des véhicules électriques n’a pas été prise en compte : s’il est vrai que leur entretien, hors changement des batteries, est minime, et d’ailleurs intégré ci-dessous, il est fort à craindre que ces véhicules, et notamment leurs batteries, ne soient victime d’obsolescence, tout comme la plupart des appareils numériques ! Ainsi, des batteries améliorées ne seraient probablement pas compatibles avec les véhicules existants, amenant le propriétaire à changer son véhicule pour bénéficier des dernières améliorations, plutôt que d’investir dans un remplacement coûteux de batteries obsolètes.
  • Frais d’entretien évalués à :
    • Electrique :         1,0 €/100 km
    • Essence :             2,5 €/100 km
    • Diesel :                3,5 €/100 km
  • Frais d’assurance non pris en compte : sans doute inférieurs pour des véhicules qui roulent moins, et moins vite, alors qu’on cherche à les comparer sans a priori, ils apporteraient un biais dans la comparaison.

Sur ces bases, le prix d’utilisation du véhicule est le suivant :
  •  La Zoé électrique est significativement plus chère quel que soit le kilométrage. Ceci résulte de son coût d’achat élevé malgré le bonus, auquel s’ajoute le prix de location des batteries, non compensés par le prix très bas du carburant électrique et l’excellent rendement du moteur électrique.
  • Malgré un coût de carburant significativement plus bas (vu précédemment), la Clio ne parvient pas à amortir le surcoût de la motorisation diesel et de son entretien.
  • Manifestement, la voiture la plus économique est la Twingo qui s’impose quel que soit le kilométrage.
Conclusion

Pour l’utilisateur :
Sur les bases actuelles, la Zoé a de graves inconvénients :
  • Plus chère à l’achat qu’une Twingo malgré le bonus
  • Plus chère à l’utilisation qu’une Twingo essence ou une Clio diesel
  • Beaucoup moins performante
  • Avec une autonomie qui reste très limitée, la cantonnant à un rôle strictement urbain, sans exception, avec la préoccupation constante des recharges.
Elle a quelques avantages spécifiques :
  • Le silence aux vitesses basses et moyenne. (A grande vitesse, les bruits de roulement et aérodynamiques sont prépondérants et cet avantage se réduit)
  • Le confort d’une conduite simple et apaisante.
  • Un entretien extrêmement réduit.
Pour la collectivité :
  • L’absence presque totale de pollution locale et de bruit qui en fait un véhicule citadin idéal. (Restent quand même les particules fines résultant de l’usure des freins et des pneumatiques)
  • La forte réduction des émissions de CO2, mais uniquement dans les pays disposant d’une électricité décarbonée. Il y en a malheureusement très  peu : France, Suisse, Scandinavie, Canada, Islande… Dans tous les autres pays, et notamment dans ceux qui utilisent des centrales thermiques au charbon, un véhicule électrique émet globalement plus de CO2 qu’un véhicule thermique !
  • La trace carbone de fabrication des véhicules n’est jamais prise en compte, car mal connue, mais c’est une grave lacune. On admet généralement que la fabrication d’un véhicule thermique amène une émission de CO2 qui pourrait être égale à la moitié de l’émission due au carburant pendant toute sa durée de vie. La prise en compte, en supplément, de la batterie des véhicules électriques, pourrait révéler quelques très mauvaises surprises !
  • Le coût pour la collectivité des avantages fiscaux des véhicules électriques, est très élevé, en deux termes :
    • Le bonus d’achat de 6 300 €
    • L’absence de TICPE, et de TVA afférente (contreparties de la mise à disposition gratuite des infrastructures routières, et non taxes vertes), correspondent à un manque à gagner de l’ordre de 9 000 € dans la durée de vie d’un petit véhicule sur 160 000 km.
    • Pour un total (15 300 €) largement supérieur au prix d’achat d’une Twingo neuve (13 030 €) !
    • Ces avantages fiscaux ne pourront pas être indéfiniment maintenus.
  • Plus globalement, on peut penser qu’il n’appartient pas à l’Etat de choisir des solutions technologiques telles que la voiture tout électrique qui ne constitue probablement pas la méthode la plus efficace pour réduire rapidement les émissions de CO2 dues aux véhicules routiers. C'est la thèse de Jean Tirole, prix Nobel d'économie 2015.
  • L'Etat ferait mieux d’instaurer une taxe carbone aussi universelle que possible (compensée par une baisse universelle de la TVA à pression fiscale constante) et de laisser le marché choisir les solutions. On verrait alors sans doute émerger les hybrides et, parmi elles, le segment des véhicules légers et très aérodynamiques, actuellement inexistant.


mercredi 3 août 2016

Electricité verte et CO2 : L’Allemagne vire de bord !



Résumé :
  •  Après avoir consacré 350 G€ (« G » = giga = milliard) aux énergies dites vertes depuis le début du siècle, chiffre extraordinairement élevé, l’Allemagne décide de diviser par 4 le montant annuel de ses investissements dans ce domaine, en réduisant fortement ses subventions antérieures.
  • Ce violent virage, qui provoquera des dégâts chez les fabricants concernés, était devenu inévitable en raison de la hausse du prix de l’énergie électrique pour les consommateurs allemands, et de l’augmentation massive des émissions de C02 par MWh produit.
  • Espérons que l’opinion publique allemande en comprendra le bien-fondé, s’affranchira des mantras écolo-pacifistes, ira jusqu’à l’arrêt de ses investissements inutiles en énergies éoliennes et photovoltaïque, et acceptera des mesures moins spectaculaires et moins coûteuses, mais beaucoup plus efficaces :
    • maintenir le parc nucléaire restant,
    • convertir au gaz ses centrales au charbon,
    • investir dans des centrales à gaz à cycle combiné,
    • promouvoir le chauffage électrique par pompes à chaleur.


Message

Complément au message récent : Electricité et CO2 : le contre-exemple allemand

Plusieurs articles parus dans la presse généraliste ou financière, notamment :
« Les Echos » du 8 juin 2016, par Jean-Philippe Lacour
« La Croix » du 13 juin 2013, par Delphine Nerboiller «  L’Allemagne inverse ses priorités énergétique »
 nous apportent les informations suivantes :

L’Allemagne a atteint un objectif de 33% de renouvelable dans sa production électrique, mais ceci a coûté cher au pays (21 G€ en en 2013 et 28 G€ en 2015).

Elle avait fixé pour objectif 45% de renouvelables en 2025.  

Elle vient de décider de réduire le rythme du développement des renouvelables :
  • En éolien, ramené à environ 1 000 nouvelles éoliennes par an, soit 2,8 GW nominaux, à rapporter  à un parc existant de 17 000 éoliennes. 
  • En solaire : Le prix garanti du MWh uniformément garanti disparaît pour les nouvelles installations. Ces dernières ne pourront que résulter d’appel d’offres les attribuant aux moins-disants en termes de prix garanti, avec un plafond en puissance installée de 0,6 GW chaque année (ce qui correspond, dans un pays septentrional comme l’Allemagne, à une production moyenne annuelle de moins de 0,1 GW dont la majeure partie pendant les mois d’été)
Ces informations sont extrêmement intéressantes :
  •  Le virage allemand sur l’éolien et le solaire est brutal : leur croissance sera divisée par 4, les appels d’offre se généralisent, les prix baisseront : le secteur industriel concerné va souffrir, notamment en solaire. Mais le gouvernement ne pouvait supprimer complètement les subventions, c’eût été politiquement trop risqué.
  • On a l’impression que le gouvernement allemand a pris la mesure du non-sens de la politique énergétique antérieure qui aboutit, par rapport à la France, à un MWh dont le prix est proche du double et 10 fois plus émetteur de CO2, ou plutôt, a enfin osé en tirer publiquement les conséquences. 
  • Mais il continue à subventionner le charbon et le lignite. Pourquoi ? Sans doute parce que, le parc nucléaire ayant été fortement réduit, le lignite est devenu indispensable pour assurer la production en toutes circonstances et éviter le « black-out », car il y a très peu d’hydraulique en Allemagne.
  • Nous prenons le pari que le virage suivant sera le maintien des centrales nucléaire qui n’ont pas encore été arrêtées : mais cette annonce est politiquement délicate dans un pays dont la coalition gouvernementale inclut les « Grunen » viscéralement opposés au nucléaire et une opinion publique sensible à ce sujet. Peut-être après la réélection de Mme Merkel qui était favorable à l'augmentation de la durée de vie des centrales avant son alliance avec les "Grunen"?
  • Mais les émissions extrêmement élevées du charbon et du lignite en CO2, et aussi en de nombreux polluants, finiront par être ressenties comme inacceptables, et feront, un jour, basculer l’opinion publique allemande.
  • Il ne serait pas surprenant, et il serait aussi très pertinent, que l’Allemagne convertisse au gaz ses centrales au charbon existantes, et investisse dans des centrales à gaz à cycle combiné, très performante (58% de rendement) qui pourraient amener une baisse rapide des émissions de CO2 pour un coût modique.
Les articles cités comportent cependant des imprécisions l’on ne saurait reprocher à des journalistes qui ne peuvent pas être experts en tout. Poussés par des dossiers de presse biaisés, ils n’évitent pas les erreurs usuelles en la matière :
  • « Dans l’éolien en mer […] arriver à  15 GW installés d’ici à 2030, soit l’équivalent d’une douzaine de centrales nucléaires. » Hélas, cette comparaison n’est valide qu’en puissances nominales (en fait, la puissance maximum). Elle oublie simplement que l’éolien maritime ne produit en moyenne que 25% de sa puissance nominale, du fait de son intermittence subie, alors que le nucléaire produit en moyenne 80% de sa puissance nominale, du fait de son adaptation voulue à la demande du réseau. En production annuelle, l’équivalence est donc de seulement 3 centrales nucléaires, et non pas 12. En utilité, c’est encore bien pire, car il faudrait défalquer de la production éolienne toute la partie qui ne sert à rien, car produite à contretemps,  et finalement  exportée à vil prix faute d’emploi en Allemagne, évaluée à la moitié, ce qui ramène l’équivalence à 1,5 centrales! 
  • « Cette part [des renouvelables] s’élève actuellement à 33%. ». Le lecteur comprend que l’électricité consommée en Allemagne est verte pour un tiers. Or il n’en n’est rien, car ce chiffre est relatif à la production, et non à la consommation. Or la priorité d’écoulement des énergies vertes contraint les opérateurs de réseau à absorber toute la production pour l'exporter à vil prix, parfois négatif, la perte de l’opérateur étant compensée par la « CSPE » allemande payés par l’utilisateur. La corrélation inverse, publiée, entre la puissance verte produite  et le prix de marché de gros est excellente et probante d'une causalité: quand la production verte croît, le prix de marché décroît, faute de demande Finalement, si l’Allemagne produit 33% d’énergies vertes, elle n’en consomme effectivement qu’environ la moitié et se débarrasse du reste faute de pouvoir l’utiliser !
De manière générales comparer des chiffres tels que volume annuel cumulé, volume moyen, ou prix moyen, n’a de sens que pour les filières qui produisent en continu : nucléaire, hydraulique au fil de l’eau ou marémotrice. Pour toutes les autres, seules comptent les comparaisons au moment de la production, et notamment pendant les pointes : le solaire est alors absent, et l’éolien très inégalement présent avec risque d’absence. Seule la biomasse peut se tirer d’affaire, dans la mesure où elle est au moins un peu stockable, et peut donc être utilisée au bon moment. A de rares exceptions près, l’énergie électrique ne peut pas être stockée !

dimanche 12 juin 2016

Stockage photovoltaïque : indispensable et impossible?



Résumé

Stockage de l’énergie photovoltaïque de  réseau en France

Le stockage de  l’énergie n’est pas la seule solution à la mise en adéquation de la production photovoltaïque très intermittente, mais largement prévisible, avec la consommation nationale permanente et variable.
  • Aux niveaux actuels, l’absorption de l’énergie solaire nationale par le réseau n’est en aucun cas un problème technique, car les énergies vertes à priorité d’écoulement sont loin d’atteindre la consommation minimum française (30 GW). Nul besoin de stockage coûteux : sa production et sa consommation sont simultanées.
  • On peut envisager ensuite, sans coût supplémentaire, d’inciter les producteurs d’énergie électrique solaire à optimiser leurs installations pour l’hiver grâce à un abondement relevant leur compétitivité par rapport au prix du marché de gros qui est  plus élevé en hiver et pendant les pointes, en lieu et place des prix fixes garantis actuels.
  • On peut aussi agir ensuite sur la consommation par un système de facturation à prix variable en fonction du prix de marché de gros, ce qui est techniquement rendu possible par le compteur Linky, mais suppose de changer la loi.
  • Le stockage proprement dit, quel qu’en soit le procédé, et en dehors des STEPS limitées par la géographie, est toujours extrêmement coûteux, et d’un rendement variable, aggravé par une perte de stock dans le temps selon les cas (batteries, volants d’inertie). Dans un avenir lointain sans énergie fossile, un stockage diurne reste envisageable, mais un stockage sur l’année ne l’est en aucun cas. Ceci limite l’intérêt du stockage et de la production de l’énergie solaire qui est contra-cyclique, très faible en hiver quand la demande est élevée…

Rappelons toutefois que cette énergie reste pertinente dans :
  • Les applications hors réseau, dont les prix et volumes énergétiques sont radicalement différents, notamment mobilité et véhicules pour lesquels le stockage par batteries ou hydrogène s’impose.
  • Les pays du sud, où elle cesse d’être contra-cyclique :
    • Les pointes de consommation sont en milieu de journée et en été (climatisations)
    • Pas de chauffage en hiver
    • L’alternance jour / varie peu entre l’été et l’hiver
    • L’éventuelle absence de réseau national interconnecté justifie de petits réseaux locaux 

1. Situation du problème

La consommation d’énergie électrique en France est permanente, comprise entre 30 et 102 GW, avec de nombreuses variations aléatoires, diurnes, hebdomadaires et annuelles. Exemples de consommations, disponibles sur « Eco2mixRTE » :
  • Le jeudi 15 février 2015, ouvré, en hiver et relativement froid
  • Le samedi 15 août 2015, férié, en période de vacances et par beau temps

On constate bien dans le graphique ci-dessous, ces fortes variations, avec ici une amplitude (maxi/mini) annuelle de 90/31=3, pouvant atteindre 3,5, et une amplitude diurne généralement de 1,3 à 1,5.




La production d’énergie solaire est nulle la nuit, et astronomiquement prévisible le jour, à un facteur d’incertitude près qui est la nébulosité. La production photovoltaïque, selon la même source, et pour les mêmes dates, figure dans le graphique ci-dessus. Attention à la différence d’échelle des ordonnées entre les deux graphes : à la même échelle, la production solaire serait à peine visible, ce qui traduit une couverture de la consommation actuellement insignifiante, particulièrement en hiver:
  • Le jeudi 15 février 2015 : 0,4% cas défavorable
  • Le samedi 15 août 2015 : 2,5% cas favorable

Avant d’envisager de stocker l’énergie solaire, il faudrait donc aussi envisager de la produire en multipliant par plusieurs dizaines le parc installé. C’est possible, l’Allemagne l’a  fait, non sans inconvénients ! En France, l’écoulement prioritaire de l’énergie solaire ne pose aucun problème technique tant que sa puissance maximum reste très inférieure à la puissance minimum consommée qui est de l’ordre de 30 GW. Elle s’ajoute à l’hydraulique au fil de l’eau et à  l’éolien qui se substituent au nucléaire, généralement sans réduction des émissions de CO2, car ce dernier est émis principalement pendant les pointes de consommation qui sont toujours en hiver et la nuit.

2. Facteurs d’adéquation de l’offre et de la demande

On se place ici dans l’hypothèse où la production d’énergie solaire atteindrait une part significative de la demande totale d’énergie. Avant de se lancer dans un problématique stockage, que l’Allemagne ne fait pas malgré son énorme production verte aléatoire, on peut envisager  deux actions préalables :

1    2.1. Adapter (autant que faire se peut) la production solaire à la demande

La production d’un panneau solaire dépend évidemment de son orientation : idéalement, il doit être perpendiculaire aux rayons du soleil, ce qui supposerait qu’il soit mobile selon deux axes :
  • un axe parallèle à celui de la rotation terrestre pour suivre le soleil dans sa course diurne
  • un axe horizontal E-W pour suivre l’apogée du soleil à midi, de hauteur variable entre l’été et l’hiver
Cette mobilité améliore grandement la production, mais reste rare en raison de deux inconvénients :
  • Des coûts plus élevés d’investissement et de maintenance
  • Une plus grande surface au sol pour réduire le masquage de chaque panneau par ses voisins
 Dans le cas le plus fréquent, les panneaux sont fixes.
  • S’ils sont disposés sur un toit préexistant, ce dernier, plus ou moins exposé au sud,  impose son orientation et sa pente. Il subsiste un choix binaire : le faire, ou renoncer.
  • S’ils sont posés sur des structures dédiées, ces dernières doivent avoir une ligne de plus grande pente orientée vers sud. Mais cette pente reste à choisir :
    • Une pente égale à la latitude vient à l’esprit : été comme hiver, à midi, l’angle des rayons solaires restera toujours inférieure à 23°.
    • En fait, le prix contractuel de rachat de l’énergie produite étant fixe (autour de 120 €/MWh pour les installations récentes), toutes les installations privilégient la production autour du solstice d’été (21 juin) qui offre la plus longue exposition au soleil et une faible nébulosité. Ceci aboutit à produire un maximum d’énergie quand on n’en n’a pas besoin ! Ceci se vérifie bien en 2015 (graphe ci-dessous), où la moyenne des deux mois autour du solstice d’été (31,6 GWh/jour) atteint 3,3 fois la production des deux mois autour du solstice d’hiver (9,5 GWh/jour).


Cette situation déplorable n’est pas entièrement fatale : elle résulte de panneaux solaires très peu inclinés pour favoriser délibérément la production prépondérante, celle de l’été. Voir photos de la centrale de Cestas.

Le graphe ci-dessous, établi pour la latitude de Lyon assez représentative de la France, montre la puissance moyenne correspondant à l’ensoleillement astronomique (hors nébulosité) au cours de l’année, selon l’inclinaison du panneau face au sud.

La nébulosité étant plus élevée en hiver qu’en été, les courbes de production réelles à 30° et 60° se trouveraient en hiver (extrémités) moins favorables qu’indiqué, mais quand même beaucoup plus favorables que la courbe .

Pour inciter les producteurs à optimiser leurs installations, et particulièrement celles à créer, il faut sortir des prix fixes garantis assortis d’une priorité d’écoulement, qui sont un déni de la réalité, pour les remplacer, à titre transitoire, par un abondement en pourcentage fixe sur le chiffre d’affaires réalisé au prix du marché, sans priorité découlement, ce qui contraindrait les producteurs à s’intéresser au marché. Cet abondement serait pris en charge par la CSPE et limité au même montant. L’abondement nécessaire à l’apparition d’investisseurs serait un excellent indice de la compétitivité réelle de cette filière. L’abondement nul, indispensable à terme, n’est pas pour demain ! Voir notre message sur la centrale photovoltaïque de Cestas.

2.2. Faire varier le prix de l’énergie pour le consommateur

A l’exception de l’écart minime entre les tarifs « heures pleines » et « heures creuses », et de l’écart plus important, mais simpliste, du tarif « Tempo » peu répandu et limité aux puissances supérieures à 9 KW, le prix public de l’énergie électrique est généralement constant ou peu variable.

Dans le même temps, le prix de marché de gros international varie constamment, dans une fourchette extrêmement large qui va d’un prix légèrement négatif (écoulement des excédents allemands d’énergies vertes fatales et prioritaires, produites à contretemps) à plus de 1 000 €/MWh au cours du dernier record historique de consommation française de 102 GW le 8 février 2012. Dans un passé récent, les prix moyens se situaient autour de 40 €/MWh, ce qui correspond plus ou moins au coût complet du nucléaire ancien, mais depuis 2 ou 3 ans, il a tendance à descendre entre 30 et 40 €/MWh en raison des excédents verts allemands déjà cités, et aussi du développement dans ce pays, paradoxalement, d’une énergie noire (le lignite) très bon marché.

Il va de soi qu’un lien raisonnable (qui n’est pas une proportionnalité) entre le prix de gros et le prix public serait de nature à freiner la consommation quand celle-ci est élevée, donc chère et émettrice de CO2, et à l’encourager dans le cas contraire. L’utilisateur a en effet la capacité de différer ou d’anticiper certaines consommations avec des conséquences sur son confort qui soient nulles (chauffe-eau, congélateur) ou supportables (chauffage, appareils ménagers).
Ce sujet a été développé dans un message précédent.

3    2.3. Stocker l’énergie solaire : un énorme problème

Il va de soi que le stockage de l’énergie électrique ne dépend pas de la manière dont elle a été produite, et qu’il serait souhaitable de mettre cette énergie en stock quand la production globale, d’où qu’elle vienne,  est excédentaire, et donc bon marché, puis de la restituer quand elle est insuffisante en dépit d’un prix de gros beaucoup plus élevé, tous les moyens de production, même les plus chers, étant alors mobilisés. Vouloir stocker spécifiquement l'énergie solaire destinée au réseau n'a aucun sens!

Le stockage pourrait trouver sa viabilité économique dans l’écart entre les prix d’entrée et de sortie du stock, sous réserve du coût du stockage, et de son rendement immédiat et selon la durée de stockage. La plupart des méthodes de stockage ont été analysées dans des messages antérieurs. En dehors des STEPS (centrales hydrauliques de haute chute réversibles) limitées aux régions montagneuses, tous les procédés sont très coûteux, avec des rendements très divers.

Examinons comme un cas d’école:

Le graphe ci-dessous donne, pour l’année  2015, les productions et consommations diurnes de cinq jours typiques de l‘année à chacun desquels une couleur a été attribuée. Pour sa clarté, les productions solaires ont été affectées d’un coefficient arbitrairement fixé à 40, ce qui équivaut à prendre en compte un parc photovoltaïque 40 fois plus grand.



Le calcul des aires sous les courbes ci-dessus montre que, au cours de chacune des journées complètes ci-dessous,
un coeff. sur le parc solaire actuel de
répond à une demande journalière de 
après mise en stock de
dimanche 21 juin 2015, solstice d’été, férié
28
990 GWh
580 GWh
mardi 31 mai 2015, ensoleillé, ouvrable
41
930 GWh
500 GWh
samedi 15 août 2015, estival, férié
41
930 Gwh
500 GWh
jeudi 10 décembre 2015, ouvré, près solstice hiver
134
 1 720 GWh
1 450 GWh
5 jeudi 5 février 2015, ouvré, très froid
221
2 040 GWh
1 850 GWh

En termes simples et arrondis, pour produire toute l’énergie électrique par voie solaire, il faudrait :
  • En été, produire 1 000 GWh par jour, soit le parc 2015 multiplié par 50, et en stocker 600 GWh  avant le crépuscule
  • En hiver, produire 2 000 GWh, soit le parc 2015 multiplié par 200, et en stocker 1 800 Gwh avant le crépuscule.
En effet, en hiver, tous les paramètres sont défavorables :
  • La consommation est plus élevée
  • La durée du stockage augmente
  • Le montant à stocker augmente énormément pendant que la production baisse.
  • Ce stock énorme et doit être constitué en un temps plus  court par une production réduite
En hiver, un stock de 2 000 GWh nécessiterait :
  • 200 millions de batteries de 10 KWh à 5 000 € HT pièce, de durée de vie de 5 à 10 ans, soit 1 000 milliards d’euro?
  • ou 400 millions de volants d’inertie en béton de 5 KWh, dont le seul rotor pèse 1 700 kg, de prix inconnu, mais de longue durée de vie, tel que la société Energiestro les envisage. 
Même en été par beau temps, un stock de 600 GW nécessiterait 60 millions de ces mêmes batteries, soit environ 2 par abonné (mais situées en amont de cet abonné, faute de quoi la situation serait largement pire car la variabilité diminue quand elle concerne un grand nombre de consommateurs) pour un coût de 10 000 € tous les 10 ans, soit 1 000 € par an pour la seule continuité en été, beaucoup plus que le coût de l’électricité consommée !

Evidemment absurde ! Ces ordres de grandeur montrent qu’à l’évidence, l’énergie solaire thermique ne permet pas d’assurer une production suffisante, particulièrement en hiver, et nécessite par surcroît des capacités de stockage monstrueuses.

4    2.4.  Suppléer aux intermittences du solaire par  d’autres sources

Stocker de l’énergie solaire le jour pour pouvoir la restituer la nuit n’a d’intérêt que si, finalement, le coût de l’énergie restituée est inférieur à celui qui pourrait être produit par d’autres sources utilisées.

Une batterie de 10 KWh, coûtant 5 000 €, peut absorber 12 KWh, et restituer  1  KW pendant 10 heures, soit un rendement de 80%, et ce, une fois par jour pendant 5 ans, soit environ 1 500 cycles complets. Son coût d’amortissement sera de l’ordre de  3 € par cycle, c’est-à-dire 300 €/MWh restitué.
Le coût du MWh restitué est donc :
120 €/MWh photovoltaïque entrant / 80% de rendement + 300 € d’amortissement = 550 €/MWh

Quelle sont les substitutions possibles ?

2.4.1. Fossiles 
La substitution est très aisée, mais non envisageable, car on se place ici dans la nécessité absolue d’éliminer les émissions de CO2, tant pour réduire l’effet de serre que par épuisement des combustibles fossiles, bien qu’ils soient parfaitement adaptés à cet usage. Pas de charbon, ni de fioul, ni de gaz.

2.4.2. L’éolien a à peu près les mêmes inconvénients que le solaire : intermittent, moins contra-cyclique, mais aussi moins prévisible. Sa problématique de stockage n’est pas vraiment différente du solaire, et rien ne permet de penser que ces deux énergies intermittentes puissent  se suppléer mutuellement : un grand froid nocturne d’hiver peut parfaitement de produire par temps calme et couvert…

2.4.3. Le nucléaire.
Il n’est pas classé « renouvelable », mais reste disponible pour longtemps, surtout si l’on y intègre des technologies accessibles à moyen terme : surgénérateurs très économes, et thorium pratiquement illimité.
Il est incontestablement décarboné en exploitation.

Rappelons que l’énergie nucléaire de nouvelle génération, à construire aux nouvelles normes post-Fukushima, nécessite un investissement de l’ordre de 9 G€ par EPR de 1,8 Gw, soit 5 000 €/Kw si on l’achète à Areva, nettement moins si on l’achète à la Corée du sud. Pour 5 000 €, le même prix que la batterie de 10 KW qui ne produit rien et de durée de vie limité, on assure donc une production quotidienne de 24 KWh, pendant un demi-siècle, sans émission de CO2 en exploitation.

Pour réduire les émissions de CO2, le nucléaire est incontournable. La loi sur la transition énergétique, qui mène à une impasse, doit être abrogée ou amendée : voir message à ce sujet, points 5, 6 et 8. Le contre-exemple de l’Allemagne en apporte une preuve magistrale  par l’absurde. Les écologistes sincères finiront par le comprendre. Il faut cesser de développer à grand frais l’éolien et le photovoltaïque, et se concentrer sur le gaz, le nucléaire et l’efficacité énergétique (rendements, pompes à chaleur, isolation).