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Nous avons vu
dans le message « Problématique
du stockage de l’énergie » que l’équilibrage du réseau électrique entre :
- une consommation très variable
- et une production dont une part croissante est « fatale », c’est-à-dire intermittente et plus ou moins prévisible (énergies hydraulique au fil de l’eau, marémotrice, éolienne, photovoltaïque)
Nous avons vu également dans notre message précédent, que l’idée de stocker cette énergie dans une
batterie d’accumulateurs stationnaires, évidente et très ancienne, se heurtait
au problème du ratio coût / longévité de ces batteries qui constituent bien une
solution techniquement correcte, mais non viable pour des raisons uniquement
économiques.
Une solution envisagée par les promoteurs (mais pas
les constructeurs) des véhicules hybrides rechargeables (VHR) et des véhicules
électriques (VE) consiste à utiliser les
batteries des véhicules pour le stockage provisoire de l’énergie de réseau,
et ceci selon deux scénarios bien distincts :
- Le recyclage des batteries de VE ou de VHR réformées, puis regroupées en batteries stationnaires
- La décharge temporaire de batteries de VE ou de VHR connectés pour recharge
Recyclage des batteries de VE ou VHR
Ce recyclage constitue une variante du stockage par batteries
stationnaires, dans lequel on remplace des batteries stationnaires dédiées par
des batteries automobiles recyclées. Il ne pose aucun problème de principe particulier et reste conforme au schéma
ci-dessous, déjà publié, à quelques détails près.
Toutefois, dans cette hypothèse, de nombreuses
incertitudes, difficiles à évaluer, apparaissent :
Quel sera l’état des batteries
réformées ?
- Si ces batteries étaient propriété de l’utilisateur, ce dernier risque de ne prendre la décision (très coûteuse) de remplacer sa batterie, qu’après une réduction très significative de ses performances : capacité, puissance (ou résistance interne), courant d’autodécharge, mais cette réduction sera aussi appréciée à l’aulne individuelle du rapport entre le trajet quotidien et l’autonomie résiduelle.
- Si ces batteries étaient louées, tout dépendra des termes du contrat, qui pourra inclure soit une forme de garantie prévoyant le remplacement dès qu’un seuil minimum de performances ne sera plus atteint, soit un remplacement forfaitaire selon des critères de temps, de kilométrage ou autre.
A quel prix ?
On peut imaginer un marché concurrentiel de l’occasion
sur lequel des récupérateurs proposent soit un prix forfaitaire par référence,
soit un prix par Kwh de capacité résiduelle, pouvant aussi tenir compte
d’autres paramètres variés tels que l’âge, le kilométrage, la référence…
Mais il n’est pas certain qu’un tel marché puisse
exister : les VE et VHR resteront, plus encore que les véhicules
conventionnels, un marché captif des constructeurs. Ceux-ci seront certainement
tentés d’établir un système d’échange standard dans lequel l’utilisateur ne
paye pas une batterie neuve, mais une soulte, différence de valeur entre la
batterie neuve et la batterie réformée, cette dernière étant probablement
évaluée forfaitairement à un prix de consigne.
Cette organisation très simple existe
déjà pour de nombreux organes importants : moteur, boîte de vitesses,
pompe hydraulique, démarreur, alternateur, mais elle n’existe pas pour les
batteries de démarrage, parce que ces dernières ne font pas l’objet de
rénovation.
Qu’en sera-t-il pour les batteries des VE et
VHR ? Difficile à dire.
Par rapport à une batterie neuve, une batterie
recyclée présente plusieurs inconvénients :
- Une capacité réduite, que nous considérerons à 50% par hypothèse
- Une durée de vie réduite dans des proportions difficiles à évaluer, mais certainement substantielles.
- Une puissance réduite ou, en d’autres termes, une résistance interne accrue.
Comment les regrouper ?
Nous avons vu dans le schéma ci-dessus, explicité dans
le message dédié, que les batteries étaient des assemblages en série
et en parallèle d’éléments électriquement identiques.
- Les batteries recyclées seront inévitablement triées par référence de première monte.
- Toutefois, des éléments de même référence, mais dont les paramètres électriques sont différents en raison de leurs dégradations différenciées, devront également être triées par niveau de performance, le montage série / parallèle ne pouvant être envisagé que sur des batteries de caractéristiques très voisines.
et en tablant toujours sur une tension uniforme des batterie,
500 volts par exemple, le montage en série des éléments est déjà fait à
l’intérieur de chaque batterie recyclée. La batterie d’ensemble sera constituée
uniquement par la mise en parallèle des batteries recyclées. S’il s’agit, par
exemple, de batteries de 20 Kwh nominal déclassées à 10 Kwh, il en faudra 100.
Il restera à s’assurer que ces batteries automobile
peuvent réellement être mises en parallèle, et quelles sont leurs
caractéristiques de charge. A défaut, ou débouche sur une électronique de
conversion beaucoup plus complexe.
Il est à prévoir la défaillance d’une batterie
recyclée parmi les 100 en parallèle sera fréquente, et devra entraîner
automatiquement sa mise hors circuit, probablement par un disjoncteur dédié à
cette application.
On peut ensuite concevoir :
- Soit une maintenance continue par remplacement rapide de la batterie défectueuse,
- Soit un remplacement global des batteries recyclées, par exemple quand le pourcentage ce celles qui restent utilisables tombe en dessous d’une valeur plancher.
- Tri par référence
- Tri par niveau de dégradation
- Possibilité de mise en parallèle incertaine
- Déstandardisation
- Faible fiabilité
- Maintenance lourde
De manière plus générale, on constate depuis fort
longtemps que les tentatives d’utilisation de composants automobiles, dont le
rapport qualité / prix est imbattable, dans des applications hors
automobile, réussissent rarement pour deux raisons principales :
- Nécessité d’adaptation du composant automobile à l’application hors automobile, dont le coût est souvent plus élevé que celui du composant lui-même.
- Evolution constante des composants automobile ne prenant pas en compte les applications dérivées, et aboutissant souvent à leur arrêt prématuré.
Décharge temporaire des batteries de VE
ou VHR connectées
Dans cette hypothèse radicalement différente, on
envisage d’utiliser les batteries des VE
ou VHR en cours de charge comme batteries tampon réparties chez les
utilisateurs.
Charge de batterie : Quelle installation
est nécessaire ?
Pour un chargeur, l’installation domestique à prévoir
est très simple et se limite à une prise
au garage si le chargeur est embarqué, selon le schéma ci-dessous. Le chargeur
est alors un consommateur parmi les autres.
Si le chargeur n’est pas embarqué, il se
trouve dans un coffret mural et la prise est alors une prise dédiée, ce qui ne
change pas grand-chose.
Les puissances envisagées sont
faibles : on peut recharger un VHR de 5 Kwh avec 1,7 Kw pendant 3 heures, ou un VE de 20 Kwh avec 3 Kw
pendant 7 heures, c’est-à-dire avec des prises domestiques de base 16A
connectées à des fils de 2,5 m² selon les normes usuelles pour toutes les
prises domestiques. L’adjonction d’un chargeur est facile dans une installation
domestique, et ne nécessitera pas nécessairement de changement de la puissance
souscrite.
Batterie
utilisée en tampon : quelle installation nécessaire ?
Il devient alors nécessaire :
- De produire du courant électrique 230 V - 50 Hz à partir de la batterie afin de le renvoyer au réseau. Il faut donc ajouter un onduleur, plus coûteux qu’un chargeur à puissance égale, et par surcroît plus puissant comme explicité plus bas.
- De décompter en montant et en valeur l’énergie électrique renvoyée au réseau ce qui nécessite un compteur plus intelligent, capable de gérer séparément l’énergie consommée (compteur usuel) et l'énergie restituée.
- D’affecter un disjoncteur principal dédié à cette ligne qui ne peut être confondue avec l’autre.
Notons néanmoins que la durée des pointes
nationales ou régionales étant de l’ordre de 1 à 3 heures, à comparer à des
temps de charge lente de 6 à 9 heures. La puissance de décharge, celle de l’onduleur,
devra donc être environ 3 fois supérieure à celle du chargeur, et les prises,
disjoncteurs et lignes devront être dimensionnées en conséquence, probablement
en 32 ampères, soit des lignes de 6 mm², à tirer spécialement. Le coût devient
significatif, et ne pourra être amorti que sur des pointes brèves, ce qui peut
poser un premier problème économique.
Batterie
utilisée en tampon : quelles modalités de gestion ?
Nous avons vu dans des messages antérieurs
(« batteries
stationnaires » et « carburant
électrique » ) que le principal facteur de coût de l’énergie électrique
restituée est la valeur de la batterie divisés par le nombre de cycles dans sa durée
de vie, loin devant le coût de l’énergie électrique emmagasinée et divisé par
le rendement de la batterie (de l’ordre de 80%, soit un coefficient 1,25).
Bien entendu, l’usage de batteries VE ou
VHR en tampon du réseau ERDF a pour effet de les cycler, puis qu’elles ne pourront
restituer que l’énergie qu’elles auront préalablement emmagasinée, et ces
cycles additionnels comptent dans la durée de vie de la batterie au même titres
que les cycles d’utilisation en tant que véhicule.
Il s’en suit qu’aucun propriétaire de VE
ou VHR n’acceptera de « prêter » la batterie de son véhicule à l’opérateur
afin contribuer à la production de crête dont ce dernier a besoin, s’il n’est pas incité par
un tarif de rachat très élevé, que l’on peut évaluer à 0,80 €/Kwh (soit 800 €/Mwh)
selon l’approche déjà réalisée à propos du « carburant électrique ».
Il est hautement probable que l’opérateur pourra trouver des sources qui soient
à la fois moins dispendieuses, plus centralisées et plus simples.
Si la pratique de la location des
batteries, analogue à celle que Renault pratique, se répand, il est très
improbable que le loueur autorise son locataire à ce type d’application qui n’est
pas prévu dans son forfait mensuel et/ou kilométrique.
Cet aspect économique se double d’un
aspect pratique : l’utilisateur qui met son VE ou VHR en charge le fait
évidemment pour disposer d’une batterie pleine au moment où il utilisera son
véhicule, et ce moment peut être bien antérieur au lendemain matin. L’utilisation
de la batterie en tampon ne peut donc qu’être subordonnée à un accord préalable
et quotidien de l’utilisateur, accord qui peut difficilement se présumer, et
qui nécessiterait donc un accord explicite (bouton poussoir ou autre…).
On arrivera fréquemment à une situation
très paradoxale : l’abonné-utilisateur va simultanément consommer de l’énergie
électrique facturée selon les tarifs usuels (Base, P/C, Tempo, comme tous les
autres abonnés) pour ses applications domestiques, et restituer au prix fort
(faute de quoi il ne le fera pas) de l’énergie électrique issue de la batterie
de son VE ou VHR. Le solde ces opérations contradictoires sera le plus souvent
une consommation, surtout si l’abonné est en « tout électrique »,
donc sans intérêt, et économiquement très coûteux, pour l’opérateur.
Conclusion
Manifestement, la solution est trop complexe pour être économiquement viable,
alors qu’il existe une solution simple, déjà décrite dans un message précédent :
La tarification
variable de l’énergie électrique, qui reprend les principes bien connus du « yield
management ». Il est vrai qu’elle demande une modification législative,
donc du courage politique, mais son efficacité serait immédiate, profonde, et
constituerait une avancée écologique majeure par la réduction de pointes.
Les
militants écologistes disent avec juste raison : « Les kilowattheures
les moins polluants sont ceux qu’on ne produit pas ». C’est
particulièrement vrai pour les crêtes : il vaut mieux les réduire par un
tarif dissuasif incitant à une consommation différée, que les compenser par des
batteries très coûteuses selon une organisation complexe.
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