lundi 25 novembre 2013

STEP - Station de Transfert d'Energie par pompage

STEPs de montagne
Principe

Le principe est fort simple : sur un site géographique approprié comportant un lac inférieur et un lac supérieur ayant une grande différence d’altitude, on établit au niveau du lac inférieur une station réversible reliée au lac supérieur par une conduite forcée (tuyau de gros diamètre résistant à la pression). Cette station comporte un ou plusieurs groupes constitués chacun d’une machine électrique synchrone couplée à une turbine hydraulique, toutes deux réversibles, pouvant fonctionner de deux manières :
  • en production, l’eau descend par la conduite forcée et fait tourner la turbine qui entraîne la machine. Celle-ci est alors un alternateur produisant l’énergie électrique écoulée par le réseau de transport.
  • en pompage, la machine utilisée en moteur synchrone consomme l’énergie électrique provenant du réseau et entraîne la turbine qui refoule l’eau du lac inférieur vers le lac supérieur via la conduite forcée.

Caractéristiques

Les paramètres caractéristiques d’une STEP sont donc :
  • Sa dénivellation h, aussi élevée que possible, typiquement plusieurs centaines de mètres déterminant une pression de plusieurs dizaines de bars.
  • La capacité Vs du lac supérieur, aussi élevée que possible, de l’ordre de plusieurs hectares de surface avec une profondeur moyenne de plusieurs dizaines de mètres. 1 million de m3 est assez typique.
  • La capacité Vi du lac inférieur, de préférence au moins égale à celle du lac supérieur (faute de quoi le lac supérieur ne pourrait  pas être rempli par pompage). A défaut, c’est la capacité du lac inférieur qui détermine le stockage maximum.
  • La longueur de la conduite forcée, aussi courte que possible, idéalement peu supérieure à h, pratiquement jusqu’à 10 fois h ou plus.
  • Le débit d’eau maximum qv, qui détermine :
    • la puissance maximum de la station, proportionnelle à débit x dénivellation,
    • la durée maximum de fonctionnement en production, égale à Vs / qv, qui doit atteindre 1 à 3 heures.
  • Les pertes qui ne permettent pas d’atteindre un rendement de 100%, dues :
    • à la turbine / pompe hydraulique qui ne dépasse pas 90%, voire moins si la dénivellation est faible.
    • aux pertes de charge dans la conduite forcée, d’autant plus importantes qu’elle est longue,
    • mais fort peu à l’alternateur/moteur dont le rendement dépasse souvent 99% pour les puissances élevées.

Le prix de stockage du Mwh 
  • décroit si dénivellation croît : Plus de pression, donc moins de débit dans une turbine aussi puissante mais plus petite et moins chère, conduite forcée de moindre section, et capacités des lacs plus réduites.
  • croît avec la puissance de crête en raison de:
    • la taille accrue de la conduite forcée, de la turbine et de la machine électrique,
    • la moindre durée d’utilisation annuelle des investissements, limitée par la capacité du plus petit des deux lacs.
Le rendement croît avec la dénivellation h, car les « pertes de charge » (pertes d’énergie dans un tuyau) sont indépendantes de la pression, mais croissent avec le débit.

Si  sa puissance maximum est élevée, la station peut, être constituée de plusieurs groupes (turbine + machine électrique) utilisés en parallèle, simultanément ou non selon la puissance électrique disponible ou recherchée.
Une STEP peut aussi produire de l’énergie électrique indépendamment du pompage préalable, selon le débit naturel du bassin versant du lac supérieur. C’est un cas très fréquent dans les STEP de montagne qui sont aussi des centrales naturelles de haute chute, également spécialisées dans la production aux heures de pointe, quand le prix de marché du Mwh est élevé.

A titre d’exemple réel, la plus grosse STEP française est à Grand’maison, dans l’Isère :
  • Dénivellé : h = 920 m
  • Conduite forcée : 8 km, soit environ 9 fois h
  • Capacité limitée par le lac inférieur à 15,4  millions de m3 correspondant à 35 Gwh.
  • Elle produit annuellement 1,4 Twh en heures de pointe.



Ci-dessous, à titre indicatif, le tableau de calcul d’une STEP en fonction de ses paramètres caractéristiques :







STEPs suisses et STEPs littorales


La Suisse, un bel exemple

 
                           Barrage de l’Oberaar 
  • La Suisse est pays très montagneux bénéficiant de nombreux lacs d’altitude favorables à l’installation de STEP et de centrales hydroélectriques de pointe.
  • La France, limitrophe de la Suisse, dispose d’un parc nucléaire très important, capable de fournir en heures creuses de l’énergie électrique produite en continu, dont le coût marginal est extrêmement bas.
  • Ces particularités sont utilisées dans l'intérêt commun par les opérateurs : la Suisse :
    • Importe, en heures creuses et à bas prix, de l’énergie électrique nucléaire française, qu’elle utilise pour ses besoins propres et pour remplir ses lacs de barrage d’altitude,
    • puis, aux heures de pointe, exporte au prix fort de l’électricité hydraulique vers la France.
  • Ainsi, les deux pays sont exportateurs nets :
    • en valeur pour la Suisse,
    • en énergie pour la France.

Ceci illustre parfaitement que :
  • le prix de marché du Mwh n’est en rien  constant, contrairement à ce que la plupart des tarifs grand public (sauf « EJP », devenu « Tempo », puis « Bleu ») pourrait laisser croire,
  • un Mwh produit quand on n’en n’a pas besoin (énergies fatales) ne vaut pas grand-chose, voire rien du tout.

 Compléments d’information :

STEP littorale

Il est possible d’utiliser un relief littoral élevé au relief naturel adapté, pour constituer une STEP entièrement artificielle en établissant un lac supérieur sur le plateau ou la montagne, la mer constituant un lac inférieur inépuisable.

Un bel exemple, ci-dessous, existe au Japon sur l’île d’Okinawa :


                                 STEP d’Okinawa au Japon  

Le littoral français est malheureusement dans l’ensemble peu élevé. Les zones ayant une dénivellation supérieure à 100 m (valeur très basse pour une STEP) sont restreintes :
  • La Haute Normandie du Tréport à Antifer, mais le niveau du lac (qui nécessite une vallée) atteindrait difficilement 100 mètres,
  • Hendaye,  à l’ouest de la frontière  pyrénéenne, sur l’Atlantique,
  • Cerbère, à l’est de la frontière pyrénéenne, sur la Méditerranée,
  • La côte méditerranéenne de Marseille à Menton, mais tout le littoral est fortement urbanisé et protégé.
Il est donc peu probable que la France métropolitaine établisse à moyen terme des STEP littorales. Il pourrait en aller différemment :
  • en Guadeloupe où la côte nord-ouest de Grande-Terre est tout à fait favorable,
  • en Corse, et notamment au Cap Corse
mais avec une autre difficulté : dans ces îles non connectées à la Métropole, il n’y a, ni actuellement, ni à un horizon prévisible, d’énergie électrique excédentaire renouvelable ou à bas prix qui puisse être stockée dans une STEP…




Avant projet de STEP offshore en Begique


A l’extrême opposé de la Suisse, la Belgique ne dispose d’aucun relief permettant l’installation de centrales hydroélectriques de haute chute. Sa production électrique est principalement électrothermique, accessoirement électronucléaire. Elle a développé l’éolien, notamment maritime, mais le caractère fatal de cette énergie limite son intérêt en l’absence de stockage énergétique, d’où l’idée ci-dessous.

Une île artificielle

L’idée, qui n’est pas encore un projet, est de créer une île artificielle de 2,5 km de diamètre, dont la périphérie aurait 10 m d’altitude, située en mer du Nord au large de Wenduine près de Zeebruge, non loin de 3 parcs d’éoliennes devant comporter à terme respectivement 54, 55 et 72 éoliennes, soit au total 181 éoliennes. Son centre serait creusé jusqu’à 40 m en dessous du niveau de la mer, et constituerait le « lac » inférieur, la mer étant le lac supérieur. Par principe, les stations devraient être situées au niveau du lac inférieur, c'est-à-dire très en dessous du niveau de la mer.



Une telle réalisation est possible, mais demande une première analyse d’évaluation à partir de l’hypothèse plutôt optimiste d’un rendement de 80% par transfert, malgré la très faible dénivellation et la longue conduite forcée de plus d’un kilomètre, soit 50 fois la dénivellation moyenne. A partir du communiqué de presse, l’auteur a établi le schéma probable ci-dessus et a procédé aux calculs analogues au tableur figurant dans le message précédente, pour aboutir aux chiffres ci-dessous :
  • Energie absorbée par pompage : 3 600 Mwh, soit 9 heures de production de 181 éoliennes de  2 Mw par vent permettant de produire à leur puissance nominale.
  • Energie restituée : 2 700 Mwh, soit environ 64% de l’énergie absorbée. Les chiffres du communiqué de presse sont donc techniquement cohérents.
Incidence des marées

Il est à noter que les marées, dont les amplitudes extrêmes diurnes sont comprises entre 1,8 m et 5,4 m dans cette région, interviendraient dans le rendement de cette STEP :
  • Si la production électrique a lieu autour de la haute mer, son rendement est amélioré, ou inversement à basse mer. Toutefois, les heures de production en pointes étant totalement déconnectées des heures de marées, on peut considérer que ce facteur serait en moyenne égal à 1, donc sans influence.
  • Il en va un peu différemment du pompage : les heures creuses étant plus fréquentes et plus longues que les heures de pointe, l’opérateur aurait une petite latitude de choix pour pomper (vider le lac inférieur) plutôt à basse mer.
  • Mais l’incidence de ce facteur n’excéderait pas une hauteur moyenne de l’ordre de 1 mètre, à comparer à une dénivellation moyenne de 21 mètres, soit une amélioration du rendement de l’ordre de 5%, ce qui n’est pas négligeable, mais ne change pas l’économie générale de l’ensemble.
Un désastre économique annoncé

Mais l’aspect économique du dossier est entièrement passé sous silence, en dehors du premier point :
  • Le prix de l’ile est évalué à 90% du prix de l’avant-projet. En d’autres termes, son prix sera 10 fois le prix d’une STEP de montagne de même puissance.
  • Son rendement énergétique global ne sera que de 64% au mieux.
  • L’énergie éolienne est rachetée en France au tarif très élevé de 130 €/Mwh. Supposons que ce prix soit le même en Belgique.
  • Son coût après stockage et restitution avec un rendement de 64% aboutit à : 200 €/Mwh
  • Il faut y ajouter les frais d’exploitation et d’amortissement de l’île artificielle et de ses stations réversibles. Compte tenu des paramètres très défavorables (faible chute, eau de mer…) ces frais seront probablement de l’ordre de 10 fois ceux d’une STEP de montagne, voire plus. Une évaluation à 200 €/Mwh est plausible.
  • L’ordre de grandeur total pourrait être proche de 400 €/Mwh. Les pointes extrêmes au cours desquelles le prix de marché du MWh dépasse ce prix sont très rares, tout au plus quelques heures par an.

Au plan économique, cet avant-projet ne mérite pas de se transformer en projet !

Un bilan écologique plus qu’incertain

Cet avant-projet nécessite un trou de 2 km de diamètre et environ 40 m de profondeur, soit 300 millions de tonnes de sable ou de calcaire à déplacer. Une telle quantité représente 10 cm de remblai sur une surface de 1 500 km². Un désastre écologique… Le  coût extrêmement élevé de l’investissement serait évidemment accompagné d’une empreinte carbone proportionnelle, qui rendrait le temps de retour sur CO2 investi extrêmement long, si ce n’est impossible…

Sa durée de vie est incertaine : le sable est sujet à érosion rapide par les vagues et les courants de marée. On imagine les dégâts causés par une tempête séculaire au cours d’une marée d’équinoxe… On imagine la corrosion par l’eau salée. Et aussi le « fouling » : les algues et les coquillages se développent sur tous les organes immergés hors de l’obscurité totale, problème bien connu de l’usine marémotrice de la Rance, qui ne lui a jamais permis d’être compétitive malgré des marées presque 3 fois plus fortes et un site naturel bien plus favorable dans l’estuaire de la Rance.

Rester raisonnable pour être efficace

Réduire notre dépendance à des combustibles fossiles est une nécessité évidente. Réduire nos émissions de CO2 est nécessaire si l’on s’en tient aux prévisions du GIEC. Mais pour être efficace, il faut que chaque Euro dépensé le soit à bon escient, c’est à dire en commençant par l’utilisation qui aboutit à la plus importante réduction des émissions, et/ou à la plus grande économie de ressources fossiles. Les STEPs de montagne, selon leur profil, peuvent satisfaire à ce principe. L’avant–projet belge en est très loin, et les STEPs littorales en France n’y parviendraient probablement pas non plus.

Les belges devraient donc réfléchir longuement avant d’envisager l’arrêt de leur centrales nucléaires existantes, dont le bilan carbone et écologique est incontestablement bien meilleur que celui de l'avant-projet…





lundi 4 novembre 2013

5 - Climat et CO2 anthropique



Table des matières du blog :

Plan du chapitre « La Taxe Carbone »

Notre blog a jusqu’ici été basé sur les prémisses suivantes, issues du GIEC, et généralement admises par les médias et la classe politique :
  1. Le taux de CO2 dans l’atmosphère augmente fortement depuis un siècle et s’accélère.
  2. Cette augmentation résulte principalement de la combustion des combustibles fossiles exploités par l’homme, et de la déforestation.
  3. Un léger réchauffement climatique est perceptible depuis 30 ans.
  4. Il y a une corrélation entre le taux de CO2 et l’élévation de température.
  5. Le CO2 est la cause de l’élévation de température car il augmente l’effet de serre.
Nous avions néanmoins émis quelques réserves sur la confiance à accorder au GIEC, mais jusqu’en août 2013, la note de 70% sur l’échelle ci-dessous traduisait bien notre confiance.

Adhésion aux thèses du GIEC                                                                              Climato-scepticisme
Avant
100%


70%






0%
Après
100%





40%



0%

Après un travail de documentation, de lectures et de réflexion qui est loin d’être achevé, notre position est en train d’évoluer fortement. Notre confiance actuelle régressé vers 40%, car il s’avère que, loin de faire l’unanimité des scientifiques, les thèses du GIEC sont fortement contestées par d’éminents physiciens, et ses synthèses pourraient parfois être orientées par des raisons d’intérêt, de clan, de crédits de recherche, ou de politique.

Dans cette controverse d’experts, il est difficile de s’y retrouver. Notre expérience de consultant en expertise judiciaire nous  quand même appris que certains experts aux CV impressionnants peuvent s’avérer très mauvais, surtout dès qu’ils sortent de leur domaine de spécialité, souvent très étroit. Or la climatologie fait appel à de nombreuses disciplines très différentes dont les interfaces apparaissent problématiques.

Dans les 5 prémisses ci-dessus, nous remettons en cause les deux  prémisse n° 2 et n° 5, et elles seules :
  • N° 2.
    • L’augmentation du taux de CO2 dans l’air pourrait être la conséquence, et non la cause, du réchauffement des océans qui serait périodique et lié notamment au soleil et à la gravitation.
    • L’analyse isotopique du carbone de ce CO2 (rapport 13C / 12C) montre que le taux de CO2 anthropique ne serait que de 5% du CO2 atmosphérique
  • N° 5.
    • L’effet de serre du CO2, limité à deux bandes de fréquence, serait déjà saturé dans ces fréquences (absorption des infrarouges à 100%), et donc indépendant des variations de sa concentration dans l’air. 
    • Le CO2 n’est pas le seul gaz à effet de serre. Le principal est la vapeur d’eau. De manière plus générale tous les gaz dont les molécules comportent au moins 2 atomes différents, contribuent à l’effet de serre.
Dans nos messages suivants, nous allons donc tenter de lister et d’analyser les principaux arguments pour et contre les thèses du GIEC, sans toutefois nécessairement conclure car l’auteur n’est ni physicien, ni chercheur en climatologie. Ce travail est évidemment susceptible de faire encore évoluer notre confiance au GIEC, dans un sens ou dans l’autre.

Table des matières du blog :