mercredi 28 décembre 2011

Moteur thermique à cycle d'Atkinson - Amélioration des rendements


L’augmentation du prix du pétrole et la nécessité de réduire les émissions de CO2 ont conduit les motoristes à accorder une importance croissante au rendement des moteurs, fût-ce au détriment du ratio puissance / cylindrée. Nous nous plaçons ci-dessous dans le cas d’un moteur à essence à allumage électronique et injection directe, et procédons à la comparaison d'un moteur conventionnel à 4 temps et d'un moteur à cycle d'Atkinson, aussi appelé "à 5 temps".

Dans un but de simplification, la comparaison ci-dessous est effectuée sans avance à l’allumage et avec mouvements de soupapes supposés instantanés aux points morts haut ou bas. Les calculs de rendement sont effectués sur le seul rendement de combustion, en négligeant pertes thermiques dans les cylindres, frottements, pertes de charge à l’admission, et entraînement des auxiliaires (pompes à huile et à eau, arbre à cames…). Ces facteurs n’étant pas différents dans les deux variantes, les écarts restent significatifs. Les températures sont des températures absolues, en degrés Kelvin  (°K = °C + 273,3).

Le cycle d’Atkinson est une variante du cycle classique, dit Beau de Rochas. Il lui est très semblable, à l’exception d’un seul paramètre : au lieu de fermer la soupape d’admission dès le premier point mort bas, cette soupape reste ouverte pendant un angle supplémentaire. Dans l’exemple ci-dessous, cet angle est de 60 degrés, correspondant à un quart (1/2 cos 60°) du volume balayé par le piston. Pendant cette phase, le piston refoule de l’air hors du cylindre via la soupape d’admission.

La soupape d’admission se ferme alors. Le piston poursuit sa course jusqu’au point mort haut, et provoque une compression adiabatique (sans échange de chaleur) de l’air admis. Le volume résiduel (chambre de combustion) doit être réduit dans la même proportion que la cylindrée, soit de ¼  dans l’exemple ci-dessous, pour ne pas modifier le rapport volumétrique et obtenir ainsi la même pression finale.

Après injection et allumage au voisinage du point mort haut, la chaleur produite par la combustion de l’essence échauffe l’air à la température t1 à volume constant : la pression, proportionnelle à la température absolue, monte. Notons que la quantité d’air admis étant plus faible (3/4) dans le cycle d’Atkinson, la quantité d’essence à injecter doit être réduite dans la même proportion, mais les pressions et températures avant et après allumage restent inchangées.

Dans les deux cycles, la détente adiabatique s’effectue sur la totalité du volume balayé par le piston. Mais cette similitude n’est qu’apparente : la quantité de gaz à détendre étant moindre dans le cycle d’Atkinson, cette détente est plus complète. Il s’en suit qu’au point mort bas, à l’ouverture de la soupape d’échappement, la pression et la température (t2) sont moindres.
Le rendement thermodynamique résulte du principe de Carnot-Clausius qui s’écrit : r = 1- t2 / t1
Si t2 décroît, avec t1 constant, le rendement s’améliore.

En revanche, la quantité d’air et d’essence étant réduite, ici de 1/4, la puissance est réduite dans les mêmes proportions, réduction partiellement compensée par l’amélioration du rendement.

Le graphe théorique Pression vs. Volume ci-dessous, dit de "Clapeyron", permet de comparer les deux cycles :
·        Beau de Rochas en bleu
·        Atkinson en rouge
Pour chacun d'eux, l’énergie mécanique produite est proportionnelle à l’aire comprise entre :
·        la courbe inférieure, relative à la compression,
·        la courbe supérieure, relative à la détente,
l’échelle étant de 125 joules par carreau.

                                       Graphe établi par l'auteur

On observe de façon évidente que la surface entre les courbes rouges (environ 2,8 carreaux) est inférieure à la surface entre les courbes bleues (environ 3,4 carreaux), traduisant la puissance du cycle Atkinson réduite d’environ 20%.

L’amélioration du rendement ne se voit pas sur ces courbes, mais est apparente sur les courbes de température ci-dessous:



                                Graphe établi par l'auteur

Le tableau ci-dessous explicite les valeurs théoriques des différents paramètres. Il est construit dans l’hypothèse d’un moteur monocylindrique de 1 litre de cylindrée tournant à 50 t/sec (3000 t/min) : à partir d’une même température initiale t1 de 1474 °K, le cycle d’Atkison permet de réduire la température en fin de détente de 637°K à 575 °K, amenant une amélioration du rendement thermodynamique de 7%.

Le travail fourni par cycle, et donc la puissance, sont proportionnelles à la cylindrée, donc réduites de 25% dans l’exemple ci-dessous. L’amélioration du rendement de 7% permet en réalité d’obtenir :
                                       75% x 107% = 80%.
La perte de puissance est donc finalement de 20%. Son calcul direct aboutit au même résultat.


Les puissances dans les conditions du tableau, sont d’environ :
·        10,7 kw en Beau de Rochas,
·        8,6 kw en Atkinson.
Bien entendu, la puissance d’un moteur similaire de 1,8 litres, à 5 200 t/min et plein remplissage (cas du moteur de la Toyota Prius 3) serait environ :
1,8            x       5 200/3000      x          2,5       = 6,24 fois plus puissant
cylindrée x vitesse de rotation x remplissage

Evolutions ultérieures

On a vu ci-dessus :
·    Que le cycle d’Atkinson améliore le rendement au détriment de la puissance maximum  du moteur. Ce cycle est donc préférable aux puissances intermédiaires, qui sont les plus fréquentes, mais nuisible quand une puissance élevée est requise.
·    Qu’il ne diffère d’un moteur conventionnel que par la fermeture tardive de la soupape d’admission qui vient réduire la cylindrée de compression, cette réduction se retrouvant aussi sur le volume de la chambre  de combustion, afin de maintenir le rapport volumétrique.

En pratique, l'amélioration du rendement n'est significative que dans la zone de rendement optimum du moteur. Cette technologie est donc bien adaptée aux moteurs de véhicules hybrides qui, précisément, optimisent le point de fonctionnement, ou aux boîtes automatiques à grand nombre de raports, genre VW et ZF à 7 ou 9 rapports qui ont le même but.

Ajoutons à un moteur conventionnel deux autres perfectionnements :
·       La commande électromagnétique ou pneumatique des soupapes d’admission, dont la fermeture peut ainsi être effectuée à n’importe quel angle,
·       Une géométrie à taux de compression variable. Il en existe différentes variantes. Dans la plus simple (dessin ci-dessous), le palier de vilebrequin est le point intermédiaire d’un palonnier dont une des extrémités pousse le piston, et l’autre a une position ajustable par vérin hydraulique. La descente du vérin fait donc remonter le piston, et diminue ainsi le volume de la chambre de combustion. Il en existe d’autres, notamment assurant une petite variation de la distance culasse-vilbrequin par une légère rotation de la culasse autour d’un axe décentré parallèle au vilebrequin.

Ces complications coûteuses amènent en contrepartie des avantages importants. Le même moteur peut fonctionner :
·      à puissance réduite selon cycle d’Atkinson avec fermeture fortement retardée de la soupape d’admission, et volume de la chambre de combustion réduit en conséquence, donc avec un excellent rapport de détente,
·        à pleine puissance selon cycle conventionnel Beau de Rochas, sans retard de fermeture, et volume de chambre normal
·    aux puissances intermédiaires avec des valeurs intermédiaires de ces paramètres permettant une optimisation continue du rendement selon la puissance nécessaire.

Ce type de solution se développera avec l’inévitable augmentation du coût des carburants et la chasse aux émissions de CO2. Elle n’est évidemment pas incompatible avec une transmission hybride, mais ne lui est pas liée non plus.