lundi 28 janvier 2019

VE 5 Traces Carbone du VE


Le VE : Innovation pérenne ou rêve écologiste ?
« Dans un monde inondé d’informations sans pertinence, le pouvoir appartient à la clarté. »  Yuval Noah Harari


VE5. - Traces carbone du VE 
  • Ce chapitre porte sur la comparaison entre un VT et un VE avec le même profil de mission :
    • 14 000 km par an x 12 ans
    • Ville, suburbain, routes, autoroutes
    • Remplacement des VT par des VE.
5.1. TC d’utilisation du VE

Elle est évidemment nulle : ni le chargeur, ni la batterie, ni le moteur électrique n’émettent de CO2. Le VE en tire son image de « zéro émission » dont on oublie trop souvent l’adjectif essentiel « locale ».

5.2. TC « puits » à la roue du VE

  • Comme le dit avec juste raison Jean-Marc Jancovici, éminent expert en trace carbone : « L’électricité ne sort pas du mur ! ». Elle est produite à partir des énergies primaires :
    • Charbon
    • Pétrole,
    • Gaz
    • Nucléaire
    • Hydraulique
    • Eolien
    • PV,
    • Divers…
  • Sa trace carbone, très différente selon les filières, est donc aussi :
    • Très différente entre pays, selon les filières installées
    • Variable dans le temps, selon le mix de production utilisé.
TC de l’électricité selon les filières de production

5.2.1. TC du nucléaire et des renouvelables
  • Le process est exempt de CO2 direct, mais il ne faut pas oublier la TC d’amortissement, égale à la TC d’investissement divisée par la durée de vie effective, qui est elle-même égale à la durée de vie en années multipliée par le facteur de charge défini comme « énergie produite sur l’année / énergie produite à 100% de la puissance installée ».
  • La TC du nucléaire est très basse, grâce à une durée de vie supérieure à 40 ans et un facteur de marche de 75%.
  • La TC de l’hydraulique est très basse aussi, avec une durée de vie presque illimitée, et en dépit d’un facteur de charge variable, mais généralement choisi par l’opérateur
  • Les nouveaux renouvelables ont une TC plus élevée en raison de  :
    • Une durée de vie beaucoup plus faible, 10 à 15 ans
    • Un facteur de charge très bas : 15% (PV) à 20% (éolien)
    • Un investissement sur énergie produite plus élevé que le nucléaire.

                            Le graphe ci-dessous, 2011, pas à jour : TC du PV à diviser par 2 à 3 en raison de la baisse de ses prix.

5.2.2. TC des énergies fossiles :

La TC du process est prépondérante sur celle des investissements. Ces filières sont très différenciées entre elles, selon deux paramètres :magne²
  • Le taux de carbone dans l’énergie primaire (C >> CnH2n+2 > CH4)
  • Le rendement du cycle de production les centrales à gaz à cycle combiné allient le T1 (selon Carnot) très élevé des combustions internes et le T2 bas des cycles à vapeur.


5.2.3. TC selon le lieu : France - Allemagne

La TC de la recharge d’un VE varie donc selon les filières de production utilisées, très différentes selon les pays. Des exemples très contrastés sont la France et Allemagne. En résumé la TC de 1 MWh produit est :
  • En France : 74 Kg
  • En Allemagne : 700 Kg, soit presque 10 fois plus
  • Sans parler du coût pour l’abonné, presque double en Allemagne.


Ceci résulte principalement de la politique énergétique allemande qui est un déni de réalité : Un investissement monstrueux (350 G€) en éolien intermittent et peu prévisibles, et en photovoltaïque (PV) mal adapté aux latitudes septentrionales sous lesquelles sa production hivernale est insignifiante, et évidemment nulle la nuit en toutes saisons, n’a pu compenser la sortie du nucléaire décidée pour des raisons idéologiques, et a amené un énorme développement du charbon et du lignite de Saxe extrêmement émetteur de CO2 et de pollutions variées. Pour plus de détail voir message dans ce blog : Le contre-exemple allemand.

5.2.4. TC selon le lieu : Ensemble du monde


(Source : Dossier CO2 « Les Echos » 3/12/2018)

  • TC : Avec 660 kg de CO2/Mwh final, le mix mondial 2017 est à peine meilleur que le mix allemand (700 Kg), et n’a pas changé depuis 1990
  • Mais la production électrique a beaucoup augmenté avec évolution du mix :
  • Les nouveaux renouvelables en cours de décollage, de 1,5% à 8,5%, mais leur pondération reste faible.
  • L’hydraulique en régression relative de 17,5% à 16%
  • Le nucléaire est resté constant en volume, donc relativement décroissant de 16% à 10,3%.
  • Malheureusement, le gaz s’est substitué uniquement au pétrole, la somme gaz + pétrole restant constante à 26,5%
  • Et le charbon reste, hélas, en tête et constant en pourcentage, c’est à dire en forte progression en volume…
  • Au global, les réductions d’émissions dues aux nouveaux renouvelables et au gaz ont été annulées par le recours croissant aux énergies fossiles.

On est donc, dans l’ensemble, très loin d’un véhicule électrique « zéro émission ». L’adjectif « locale » restera durable, si l’on ose dire !

5.2.5.  TC selon le moment : France

Dans un territoire donné, la trace carbone n’est pas constante : la demande en énergie varie dans le temps dans un facteur de l’ordre de 3, et les moyens mobilisés successivement pour satisfaire la demande dépendent de nombreux critères :
  • Les nouveaux renouvelables intermittents sont mobilisés les premiers malgré leur prix contractuel élevé parce qu’ils bénéficient d’une priorité d’écoulement. En France, ils n’excèdent jamais la demande, et peuvent être très faibles, notamment par régime anticyclonique (peu de vent) d’hiver (PV insignifiant le jour, et nul pendant les longues nuits). L’hydraulique au fil de l’eau, minoritaire, s’y ajoute.
  • Le nucléaire, exempte de CO2, très compétitif et de coût marginal (celui du combustible) presque nul.
  • L’hydraulique éclusée ou de haute chute
  • Les énergies fossiles, en commençant par le gaz, puis le fioul, puis le charbon.

 Il s’en suit que la TC ne sera pas constante. Elle pourra être :
  • Nulle (cas fréquent hors Bretagne et PACA), notamment en l’absence de grands froids, ainsi que les jours fériés.
  • Marginalement très élevée si les moyens exempts de CO2 sont déjà saturés : grands froids, températures fraîches de nuit par temps calme.


5.2.6. Réduction de la TC par stockage de l’énergie électrique

Les variations de la demande ne correspondant en rien à l’intermittence de certaines productions, une solution pourrait être apportée par le stockage. Mais les moyens de stockage économiquement utilisables sont limités :

  • Les STEPs hydrauliques stockent l’énergie par électrique par « pompage » dans les limites de leurs capacités, peu extensibles.
  • Aucun autre moyen de stockage n’est actuellement viable : tous les procédés de stockage physiquement possibles ont des coûts de stockage trop élevés, et souvent rendement insuffisant (hydrogène).
  • A long terme, à la fois par l’évolution technique et l’acceptation de prix beaucoup plus élevés, on pourra :
    • peut-être stocker du jour vers nuit (batteries, hydrogène..?),
    • mais jamais de l’été vers hiver, 365 fois plus long ! 
  • Le stockage ne peut être envisagé que s’il est moins cher (en investissements et/ou en exploitation) qu’une production permanente décarbonée. Or le nucléaire répond parfaitement à cet impératif…


5.2.7. Réduction de la TC de recharge des VE

  • Recharger pendant les heures creuses, c’est-à-dire la nuit
    • Majoritairement nocturne à domicile,
    • En charge lente
    • Sous impératifs d’horaires, comme chauffe-eaux. 
  • Si la substitution des VE aux VT est forte ; les heures « creuses » cesseront de l’être et de nouveaux moyens seront requis.
  • La substitution totale, étudiée dans un message dédié, nécessite d’augmenter de 1/3, soit 200 TW, la capacité nationale de production. Or :
    • Les énergies fossiles restent à proscrire, faute de quoi le VE n’apporte aucune réduction des émissions de CO2.
    • L’hydraulique est peu extensible.
    • Le PV ne produit rien la nuit, très peu d’octobre à février,
    • L’éolien est intermittent, absent par régime anticyclonique,
  • La seule solution est l’abrogation de la loi sur la transition énergétique et la construction de 15 EPR et 1,9 GW. La logique voudrait que l’on commence par Plogoff, idéalement placé en Bretagne qui en est dépourvue, sur une côte rocheuse baignée de forts courants marins qui éviteront le recours à des réfrigérants atmosphériques.

A défaut, comme chez nos amis Germains, le VE émettra plus de CO2 que le VT. Ceci est quantifié ci-dessous.

5.3. Trace carbone de fabrication du VE

Il existe peu d’informations fiables à ce sujet. Quelques pistes de réflexion :
  • Hors batterie, en séries comparables, le VE ne devrait être  ni plus lourd, ni plus cher qu’un VT, et donc  de TC équivalente



  • Mais la batterie, sans doute prépondérante, ne saurait être négligée. La photo ci-dessus montre une batterie-plateforme d’Audi E-tron, 90 KWh et 900 kg.
  • Elle comporte énormément d’électronique, chaque élément ayant sa propre carte de contrôle.
  • Sa surface est celle de tout l’habitacle
  • Pour des raisons de sécurité en cas de choc latéral accidentel, elle est ceinturée par un profilé lourd en aluminium extrudé, section environ 15 x 10 cm, masse évaluée à 140 kg.
  • Sa TC reste inconnue, mais est évidemment élevée !
  • La littérature anti VE pose l’hypothèse qu’un VE a une trace carbone double d’un VT, soit 14,4 t en comparaison du VT moyen à 7,2 t, mais cette allégation n’est nullement démontrée.

5.3.1. Comparaisons en entrée de gamme
  • Le véhicule électrique de l’Alliance décliné en 2 modèles très proches, les Renault Zoé et Nissan Leaf est, selon elle, le véhicule électrique le plus vendu dans le monde. 
  • Comparons la Twingo à essence avec la Zoé électrique munie d’une batterie de 22 KWh.
    • Rapport des masses :                         1,66
    • Rapport des prix avant bonus:          2,13
    • La moyenne des deux rapports :       1,88
  • Faute de mieux, à partir de ce raisonnement très discutable, appliquant ce même ratio de 1,88 au VT typique (nettement plus grand et lourd qu’une Twingo), on aboutit à :
  • TC VE = TC VT x 1,88 = 7,2 x 1,88 = 13,5 tonnes
  • Cette hypothèse est raisonnable, mais ce n’est qu’une hypothèse !
5.4. TC totale d’un VE

La TC totale du VE, contrairement à celle du VT ne peut se ramener à deux chiffres (fabrication plus utilisation puits à roue), car le second de ces chiffres doit être examiné selon la filière de production électrique. C’est l’objet du message suivant.