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vendredi 13 avril 2018

La pollution de l’air tue 48 000 personnes par an en France ?





Heureusement non, quoiqu’en dise l’ADEME !

Rappelons d’abord que la plupart des décès sont dus à des causes multiples :
  • Presque toutes les personnes âgées (parmi lesquelles l’auteur se place) souffrent de pathologies multiples plus ou moins prononcées : cholestérol, HTA, diabète, asthme, rhumatismes entraînant la sédentarité, séquelles cumulées de la consommation excessive d’alcool, de tabac, de sucre, de corps gras, de sel, de protéines, effets indésirables de médicaments permanents, inhalation ou ingestion de perturbateurs endocriniens, dégénérescence de la vue (presbytie), de l’ouïe (presbyacousie), de la mobilité, des défenses immunitaires, du métabolisme, etc…
  • Finalement, chaque être humain finit par mourir. Faut-il vraiment trouver une cause extérieure à chaque décès ? Evidemment non, car l’homme est mortel, et meurt généralement de causes multiples, dont la majorité est liée à l’âge.
  • Dans les causes de décès des personnes âgées, figurent évidemment le chaud et le froid :
    • La baisse de leur métabolisme les rend vulnérable au froid et aux pathologies qu’il favorise : grippe, rhume, pneumopathies, gastroentérite…
    • Les fortes chaleurs font des ravages, principalement par déshydratation, comme l’a montré la canicule de la première quinzaine d’août 2003, à laquelle 15 000 décès ont été attribués, soit 1 000 par jour.
Le chiffre annuel de 48 000 victimes de la pollution a été avancé par diverses sources, dont l’ADEME, qui est une Agence publique financée par le Ministère de l’Environnement auquel il rapporte. Cette Agence n’est donc pas un arbitre scientifique indépendant, mais bien un organe du ministère qui détermine sa ligne d’action sur des critères largement politiques. Le chiffre avancé de 48 000 victimes par an est la somme des surmortalités observées au cours de l’année pendant les pics de pollution, par rapport à la mortalité moyenne de l’année. Supposons qu’il soit sincère, et réfléchissons quelques minutes.

La corrélation entre les pics de pollution et les décès est suffisamment forte pour être indiscutable.

Mais une corrélation (simultanéité) n’est pas une causalité (relation de cause à effet) :
  • Rien ne prouve que la pollution mesurée soit la cause principale, ni même une cause secondaire, des décès dont les causes sont multiples.
  • L’effet indéniable de la pollution atmosphérique sur la santé est un effet à long terme, qui affaiblit l’organisme, et notamment les voies respiratoires, mais très rarement un effet immédiat.
  • Mais il y a une causalité directe entre les pics de pollution et les anticyclones qui les provoquent par absence de vent, et d'ascendances, car l'atmosphère est stable (air chaud en altitude). Ils sont accompagnés de fortes chaleurs en été, ou de froid intenses en hiver.
  • L’effet sur des personnes fragiles des températures extrêmes peut  au contraire être rapide, comme la canicule de 2003 l’a montré. Il est donc hautement probable que la surmortalité pendant les pics de pollution leur est due.

En toute état de causes, tous ces décès sont dus à des causes multiples, dont l’âge et les pathologies antérieures. Présenter la pollution comme la cause unique de cette surmortalité est indéfendable. 
Par ailleurs, il est indiscutable qu’en dehors des pics de pollution, la mortalité est plus faible que la moyenne. Ceci met en évidence que, si la pollution était constante, par définition, il n’y aurait plus de surmortalité, ni de sous-mortalité, ce qui empêcherait d’additionner les surmortalités sans déduire les sous-mortalités, mais n’aurait aucun effet bénéfique sur l’indice annuel de mortalité !

La méthode employée par l’ADEME est hautement contestable. La vérité est que l’effet négatif indiscutable, mais probablement limité, de la pollution sur la santé n’est pas quantifiable par cette méthode. Nul ne peut nier que l’espérance de vie continue de croître malgré l’identification de multiples facteurs de dangers dont tout le monde s’inquiète, avec ou sans raisons selon les cas. 

Ci-dessous, les chiffres de l’INSEE sont éloquents. Ils montrent que l’on a gagné 15 ans d’espérance de vie en 60 ans, soit un trimestre par an ! Pour les esprits chagrins, précisons que le petit fléchissement perceptible en 2015 est dû à un changement de la base statistique : l’inclusion des résidents (de toutes origines) à Mayotte, évidemment négatif en raison d’un niveau de vie très inférieur, en dépit de l'air très pur au milieu de l’océan indien !

 

En outre, on peut craindre que la dénonciation hâtive et exagérée de risques non démontrés, puisse constituer en elle-même un risque pour la santé publique, tant physique que psychologique, par effet « nocebo », le contraire de l’effet placebo, utilisé par le « Docteur Knoch » de Jules Romains.

Rappelons enfin que le taux de mortalité moyen n’est pas un critère significatif de la bonne santé de la population, car il est très affecté par la structure de la pyramide des âges, et notamment par le pourcentage de personnes âgées dans la population. Le seul critère pertinent est l’âge moyen des décès, âge dont l’augmentation rapide pose problèmes aux caisses de retraite par répartition, mais ne démontre pas d’augmentation des risques ambiants, bien au contraire ! C’est plutôt rassurant !

vendredi 24 octobre 2014

Stockage thermique de l'énergie électrique





Résumé

Le stockage thermique par absorption et restitution d’énergie électrique, théoriquement possible, conduit le plus souvent à une double application du principe de Carnot, et donc à un rendement déplorable aggravant un coût élevé. Il n’est donc pas utilisé, mais connaît deux substituts qui évitent cet écueil:
  • Le stockage thermique aval pour utilisation directe est très pertinent et très répandu. Il consiste à chauffer naturellement ou par voie électrique un corps plus ou moins isolé (bâtiment, eau chaude, briques réfractaires, sels fondus, matériaux à changement de phase) qui stockent la chaleur sous forme sensible ou latente, et le restituent, avec un retard choisi ou subi, sous forme de chaleur à basse température, disponible quand la source ne l’est plus (soleil, électricité excédentaire).
  • Le stockage thermique amont n’a d’intérêt que pour des centrales solaires thermiques, car les autres sources de chaleur (nucléaire, fossiles) sont permanentes. Il consiste à stocker de la chaleur à haute température sous forme sensible dans des sels fondus, et à la restituer pour prolonger la période de production pendant les pointes de soirée.


Stockage électrique sous forme thermique

Il part de l’idée, incontestable, que l’énergie électrique excédentaire peut aisément être transformée en chaleur par effet joule, que la température du stockage n’est pas limitée (sinon par des contraintes technologique liées aux matériaux utilisés), et que l’on peut restituer l’énergie au cours des pointes de consommation par une nouvelle transformation en énergie mécanique, puis électrique. C’est l’adjonction cerclée en rouge ci-dessous.



Ce schéma, tout à fait réalisable, présente néanmoins de sérieux inconvénients :
  • La transformation finale d’énergie thermique en énergie électrique est soumise au principe de Carnot-Clausius, c’est-à-dire à un rendement d’autant plus médiocre que la « source chaude » ne l’est pas assez.
  • Or, dans la plupart des cas, l’énergie électrique amont provient d’énergie thermique (nucléaire, fossile…) qui a été convertie en énergie mécanique, puis électrique par une transformation déjà  régie par le principe de Carnot-Clausius qui s’appliquerait ainsi deux fois, et déboucherait donc sur des rendements inacceptables de l’ordre de 14% par rapport aux énergies primaires.
  • Et ce résultat déplorable serait obtenu par deux centrales électriques travaillant en série et additionnant leurs coûts, pour parvenir  un coût extravagant de l’énergie électrique restituée, à savoir 7 fois (=1/14%) le coût de l’énergie primaire, plus le coût du stockage et deux fois le coût de production…
Inutile d’insister : ce schéma n’est pas, et ne sera jamais utilisé. 

Mais il connaît deux substituts qui contournent les écueils ci-dessus, le stockage thermique amont, d’intérêt limité, et surtout le stockage thermique aval, très courant et tout à fait pertinent, décrits ci-dessous.

Stockage thermique aval pour utilisation directe

Le stockage thermique aval consiste à utiliser de l’énergie électrique en heures creuses pour chauffer de l’eau ou toute autre matière de chaleur latente  ou sensible  suffisante en vue de la restituer sous forme de chaleur. Ce stockage est très courant, et peut même être involontaire. Citons, par sophistication croissante :
  • L’inertie thermique naturelle d’une caverne, d’une habitation troglodyte ou d’une vieille bâtisse aux murs très épais, assure un lissage des variations diurnes de la température extérieure. La masse assure à la fois un stockage important et une très relative isolation.
  • L’isolation thermique extérieure, rare en France, sinon dans les locaux d’activité, mais courante en Europe du Nord, agit de la même manière, mais a été optimisée en séparant clairement l’isolation extérieure et le stockage dans la structure intérieure.
  • Le stockage d’eau chaude dans un ballon classique, le plus souvent à chauffage électrique, mais aussi à chauffage par panneaux solaires thermiques, notamment dans le midi et dans les DOM-TOM, permet une utilisation différée. Il est utilisé dans les radiateurs électriques intelligents Lancey.
  • Le chauffage par résistances placées dans un matériau pondéreux et de chaleur spécifique élevée, le plus souvent des briques réfractaires, permet un chauffage quasi-continu avec une alimentation discontinue, évidemment sans miracle énergétique : l’énergie restituée est la moyenne de l’énergie absorbée, contrairement à ce que certaines publicités pourraient laisser croire ! On utilise ici la chaleur sensible, c’est-à-dire liée à une variation de température.
  • Le stockage de chaleur à basse température, quelle qu’en soit l’origine, par des sels fondus qui l’absorbent sous forme de chaleur latente. On utilise à cet effet des combinaisons chimiques choisies en fonction de leur point de fusion, qui doit être d’au moins 40°C mais pas trop élevée, tels que l’acide dodécanoïque (42°C) et l’acétate trihydrate de sodium (57°C).
  • Enfin, on voit néanmoins apparaître des matériaux à changement de phase (MCP) dont la température de fusion/solidification est aux alentours de  21°C : ils restituent de la chaleur latente si leur température dépasse 21°C, et en absorbent en dessous de cette température, dans la limite de leur masse fusible. 
    • Installés en quantité suffisante dans une pièce bien isolée, ils constituent une climatisation passive, qui ne consomme rien, mais qui ne fonctionne que si les températures extrêmes quotidiennes sont équilibrées de part et d’autre de leur température de fusion. 
    • Utilisés en complément d’apports thermiques, ils peuvent filtrer les variations quotidiennes de température, et donc différer l’utilisation des compléments thermiques au moment opportun.





Mais tous ces exemples, au demeurant  tout à fait pertinents, ne constituent en rien un mode de stockage de l’énergie électrique, puisqu’ils ne restituent pas d’énergie électrique, mais seulement de la chaleur à une température trop basse pour pouvoir être transformée en énergie mécanique selon le principe de Carnot-Clausius. Ils tirent leur pertinence du fait qu’ils permettent d’absorber de l’énergie (électrique, solaire thermique, ou autre), quand elle est disponible dans de bonnes conditions (faible demande sur le réseau électrique, soleil en journée, etc.) pour la restituer sous la forme thermique à laquelle elle était destinée, lorsqu’on en a besoin (chauffage en heures de pointe, eau chaude sanitaire, etc.).


Stockage thermique amont pour production électrique

Ce scénario, théoriquement possible, consisterait à stocker la chaleur résultant de la source d’énergie primaire intermittente, solaire thermique par exemple, ou d’origine électrique excédentaire en heures creuses, pour la restituer en la convertissant en électricité pendant les heures de pointe. Bien entendu, cette conversion est soumise au principe de Carnot-Clausius, exactement comme si la chaleur avait été utilisée dès da production.

Circonstance aggravante, le stockage suppose un premier transfert de chaleur depuis l’énergie primaire jusqu’au stockage (chaleur latente de sels fondus par exemple) puis un deuxième transfert du stockage vers le fluide thermodynamique (l’eau par exemple), chacun de ces transferts nécessitant une baisse de température. Les inévitables pertes thermiques de stockage se traduiraient par une baisse de température supplémentaire. Il s’en suit que la « source chaude » le serait nettement moins, amenant un rendement de conversion significativement inférieur à celui de production directe à partir de l’énergie primaire.


 Mais surtout, ce scénario manque singulièrement d’objet :
  • Les énergies fatales telles que éolien, photovoltaïque et hydraulique au fil de l’eau produisent de l’énergie électrique directement (photovoltaïque), ou via l’énergie mécanique (éolien et hydraulique au fil de l’eau). Reconvertir cette énergie électrique en chaleur aux fins de stockage serait une absurdité.
  • Les énergies fossiles (charbon, fioul, gaz naturel) sont aisément stockables en l’état, et les convertir en chaleur par anticipation n’aurait strictement aucun sens.
  • L’énergie nucléaire, dont la source chaude l’est un peu moins que celle des énergies fossiles, perdrait donc encore plus à un stockage thermique absorbant la chaleur de l’eau secondaire. Par surcroît, étant généralement disponible en permanence, elle est disponible aussi pendant les pointes.
L’avant-projet pharaonique Desertec, récemment abandonné, comme nous l’avions prévu, reposait sur ce principe. Il portait sur un parc de centrales solaires thermiques situées au Sahara, et destinées à alimenter l’Europe en énergie électrique. Comme les pointes de consommation européennes sont en début ou en fin de nuit, alors qu’une centrale solaire ne fonctionne qu’avec le soleil assez haut sur l’horizon, ses promoteurs envisageaient de résoudre le problème par de vastes stockages thermiques par sels fondus à haute température. On était vraiment en droit de s’interroger sur la pertinence d’un tel projet qui cumulait des difficultés majeures, et dont le but réel pouvait bien être la captation de crédits de recherche en provenance d’Europe !

Plus modestement, Areva cite cette solution pour prolonger en soirée la plage d’utilisation de centrales thermiques solaires par un stockage de chaleur à sels fondus dans deux réservoirs chaud et froid, et réchauffage de la vapeur d’eau par un échangeur sel / eau, selon le schéma ci-dessous :


Quoi qu’il en soit, à proprement parler, ce principe n’est pas non plus, un stockage d’énergie électrique sous forme thermique, puisqu’il n’absorbe pas d’énergie électrique en amont.






Principes de l'énergie thermique




Résumé
  • La chaleur est une des formes de l’énergie, et se mesure donc en joules. Mais elle n’est pas équivalente aux énergies mécanique et électrique. Celles-ci sont aisément convertibles entre elles dans les deux sens avec un très bon rendement et en chaleur avec un rendement de 100%. La conversion de chaleur en énergie mécanique est possible avec un rendement médiocre qui résulte du principe de Carnot, le plus souvent de 20% à 40% (moteurs conventionnels) et au mieux 60% (centrales à cycle combiné). Il s’améliore si la chaleur est disponible à une température élevée, et inversement.
  • Le stockage thermique dans un matériau se fait par sa chaleur sensible, liée à l’élévation de da température, ou par sa chaleur latente, liée à un changement d’état, pratiquement fusion ou solidification.
  • Un transfert thermique d’un corps à un autre nécessite un différentiel de température qui va toujours du plus chaud au plus froid, et réduit donc la température de cette chaleur.


Conversion des énergies

La chaleur est une des formes de l’énergie. L’unité était autrefois la calorie, qui est la quantité de chaleur nécessaire pour augmenter de 1°C la température de 1 gramme d’eau, donc très concrète. Elle est maintenant exprimée en joules, qui a l’avantage d’être l’unité rationnelle internationale, avec la relation : 1 calorie = 4,18 joules

Le joule est utilisée indifféremment pour l’énergie mécanique, l’énergie électrique ou l‘énergie thermique (chaleur), mais ceci ne signifie pas que ces énergies soient équivalentes, loin de là.
  • L’énergie mécanique et l’énergie électrique sont aisément convertibles de l’une à l’autre, dans les deux sens, avec un rendement qui peut approcher les 100  % avec des machines de fortes puissances et bien conçues.
  • L’énergie thermique, ou chaleur, est la forme la plus dégradée de l’énergie :
    • L’énergie mécanique, comme l’énergie électrique, peuvent très aisément être converties en chaleur (respectivement par frottements et effet joule) avec un rendement qui est naturellement de 100%.
    • La transformation directe de la chaleur en énergie électrique est extrêmement limitée et ne connaît aucune application énergétique, se limitant à la métrologie (thermocouples).
    • La transformation de chaleur en énergie mécanique est courante, mais délicate, car régie par les deux principes de la thermodynamique, qui sont de portée universelle (gaz parfait ou non) :
      • Le premier principe (conservation de l’énergie) indique que l’énergie mécanique produite par un fluide est égale à la chaleur Q1 reçue de la source chaude (amont) à la température T1 diminuée de l’énergie  Q2 restituée à la source froide (aval) à la température T2.
      • Le second principe (de Carnot-Clausius) stipule que Q1/Q2 = - T1/T2  (le signe - caractérise l’énergie restituée)
      • Le rendement, compris comme le rapport entre Q1 et l’énergie mécanique restituée a  un maximum théorique qui est : 1 - T2/T1.
    • La plupart des moteurs thermiques ont un rendement réel compris entre 20% et 45%, et les systèmes les plus sophistiqués (centrales à gaz à cycle combiné) plafonnent vers 60%.


Il s’en suit que, pour être exploitable ailleurs qu’en chauffage, la chaleur doit être disponible à une température élevée. Sa « qualité » est proportionnelle à sa température absolue. On note aussi l’importance de la source froide : Si, par exemple, T1 = 700°K et T2= 350°K, alors une baisse de 10°K de la source froide apporte autant qu’une élévation de 20°K de la source chaude.

C’est pour cette raison que les centrales thermiques, nucléaires ou conventionnelles, sont très souvent placées près d’un cours d’eau ou sur le littoral maritime, et comportent des tours (souvent hyperboloïdes de révolution) de réfrigération atmosphériques qui refroidissent par évaporation partielle (d’où leur panache blanc de condensation),  l’eau utilisée pour le refroidissement des condenseurs des turbines à vapeur.

Stockage thermique

L’absorption de chaleur est nécessairement due :
  • Soit à l’élévation de température d’un corps, et elle est alors dite « sensible »,
  • Soit au changement de l‘état solide vers l’état liquide (fusion) à température constante, et elle est alors dite « latente ».

Inversement, la restitution de chaleur est due :
  • Soit à la baisse de température d’un corps restituant la chaleur sensible,
  • Soit au changement de l‘état liquide vers l’état solide (solidification) à température constante, restituant la chaleur latente.

Notons qu’en application du 2ème principe, la chaleur circule toujours du corps le plus chaud vers le corps le plus froid.  S’il n’y a pas de différence de température il n’y a pas de transfert. Il s’en suit que :
  • La température de stockage est nécessairement un peu inférieure à celle de la source amont.
  • La température de restitution est nécessairement un peu inférieure à celle du stockage.

La chaleur latente de vaporisation, beaucoup plus élevée que la chaleur latente de fusion, ne peut pratiquement pas être exploitée en raison de la difficulté à stocker des gaz : très grand volume, ou pression élevée qui modifie la température de vaporisation.

Prenons  pour exemple le stockage de 93 Kwh = 335 Mj = 80 000 Kcalories dans 1 m3 d’eau :
  • sous forme de chaleur sensible, il faut élever la température de 80°C, par exemple de 10°C à 80°C (eau liquide)
  • sous forme de chaleur latente, il faut liquéfier 1 tonne de glace en 1 m3 d’eau à température constante de 0°C.

L’intérêt de la chaleur latente est évident, puisqu’elle permet d’opérer à température de stockage constante. Toutefois la température de stockage de 0°C est trop basse pour la plupart des applications.

On verra plus loin que les températures souhaitables pour le stockage de la chaleur sont, dans la pratique, dans deux plages très différenciées :
  • Stockage de chaleur  d’origine intermittente (thermique solaire, ou électrique éolienne ou photovoltaïque), en vue de sa transformation ultérieure en énergie mécanique, puis électrique : le stockage doit être fait à une température aussi élevée que possible, limitée seulement par la technologie du stockage. On peut utiliser :
    • La chaleur sensible de sels fondus choisis pour leur température de fusion appropriée et une chaleur latente élevée tels que le « HTS » (Heat Transfer Salt), aussi appelé HITEC®, un mélange de nitrate de potassium K NO3, de nitrite de sodium Na NO2 et de nitrate de sodium Na NO3, qui forme un eutectique liquide à 421°K, et utilisable jusqu’à 770°K. Ils ont l’avantage d’être liquides, ce qui permet de transporter la chaleur par circulation du liquide.
    • La chaleur sensible de revêtements en briques, ou autres matériaux, réfractaires, dont la température peut dépasser 1000 °K, avec l’inconvénient d’être solides : un autre fluide, l’air par exemple,  soit apporter la chaleur et venir la rechercher
  • Stockage de chaleur de toutes origines pour utilisation ultérieure sous forme de chauffage domestique ou tertiaire, ou d’eau chaude sanitaire. On peut utiliser les mêmes solutions que ci-dessus avec des matériaux appropriés aux températures plus basses, mais l’eau, qui est à la fois propice au stockage jusqu’à 100°C, au chauffage des locaux par radiateurs, et utilisée en l‘état (après mélange) pour l’eau sanitaire, est la solution la plus fréquente.





mercredi 15 octobre 2014

Air-Energie : Adiabatique ou isotherme




Résumé

Une compression isotherme, c’est-à-dire à température constante, suivie d’une détente isotherme, apporte un bon rendement, mais n’est qu’un modèle théorique, car la compression et la détente rapides de l’air sont naturellement adiabatiques, c’est à dire sans transfert thermique.

Un cycle dit « adiabatique » comporte inévitablement, après compression, un refroidissement au cours du stockage, puis, après détente, un réchauffement par mélange dans l’air ambiant. Son rendement théorique (= énergie mécanique restituée / absorbée pour une machines parfaite) est catastrophique pour des rapports volumétriques  élevés (11% à k=700, ou 18% pour k = 100), médiocre pour des rapports faibles (44% pour k= 3), avec un limite théorique à 55% pour des rapports proches de 1.

Il n’est donc pas envisageable d’utiliser des compresseurs directs pour un stockage énergétique nécessitant une pression élevée. Mais l’utilisation de plusieurs étages de compression avec refroidisseurs intermédiaires, et de plusieurs étages turbines consécutives avec réchauffeurs intermédiaires permet d’améliorer les rendements. C’est l’objet du message suivant.


C’est une évidence : L’air est gratuit, et disponible en quantité illimitée, il ne pollue pas, et rien n’empêche de stocker de l’énergie électrique excédentaire :
  • en la faisant absorber par des compresseurs comprimant l’air ambiant à une pression élevée,
  • puis en stockant l’air ainsi comprimé dans des réservoirs naturels ou construits à cet effet,
  • et enfin en utilisant cet air comprimé pour alimenter des turbines couplées à des alternateurs restituant l’énergie pendant les pointes de consommation.
Mais, comme toute solution, celle-ci doit être évaluée en termes de rendement et de coût. Le présent message porte sur la modélisation de la compression et de la détente, et sur leur rendement.

Adiabatique ou isotherme ? Soyons concrets…

Ces adjectifs ésotériques désignent deux modalités différentes de compression ou de détente des gaz. Supposons qu’une force  extérieure, agissant par l’intermédiaire d’un piston coulissant dans un cylindre (ou par toute autre méthode) soit utilisée pour comprimer une masse d’air donnée. La physique nous enseigne que le travail de cette force extérieure se traduit nécessairement par une élévation de température du gaz comprimé. Dès lors, en sus de toutes les situations intermédiaires, deux cas extrêmes sont possibles :
  • Si la compression est très lente, l’enceinte petite, et ses parois conductrices, cet apport thermique pourra être évacué au fur et à mesure de la compression ; la température n’augmentera donc pratiquement pas, et cette compression est alors qualifiée « d’isotherme », c’est-à-dire à température constante.
  • Si la compression est rapide, ou si les parois de l’enceinte de grand volume sont peu conductrices, l’échauffement de l’air en cours de compression a pour effet d’augmenter sa pression, et donc de rendre la compression plus difficile : elle nécessitera plus d’énergie. Elle est dite « adiabatique », c’est-à-dire sans transfert de chaleur à travers les parois.
  • S’il s’agit d’une détente adiabatique, le phénomène est exactement le même, au signe près : le gaz se refroidit, sa pression baisse, et sa détente produit moins d’énergie mécanique.
 Les exemples de compressions adiabatiques sont très nombreux :
  • La compression de l’air dans le cylindre d’un moteur diesel avec un rapport volumétrique autour de 20 aboutit à une température suffisamment élevée pour provoquer l’inflammation spontanée du gazole qui lui est mélangé. C’est l’autoallumage, qui était aussi autrefois un défaut apparaissant parfois sur les moteurs à essence, alors qualifié de cliquetis.
  • En cours d’utilisation, une pompe à vélo chauffe, surtout en bas, là où la pression est la plus élevée.
  • Le compresseur d’un groupe d’air comprimé d’atelier, malgré son refroidissement par les ailettes du ou des cylindres, est brûlant pendant son fonctionnement bien que l’air aspiré soit à la température ambiante.
Tous les cas intermédiaires entre l’isotherme et l’adiabatique sont évidemment possibles. Toutefois, quand des puissances importantes sont en jeu, ce qui est le cas pour du stockage d’énergie de réseau, les flux thermiques permettant le refroidissement sont faibles et lents par rapport aux puissances en jeu : le fonctionnement du compresseur sera inévitablement très proche de l’adiabatique.

En matière de stockage d’énergie par l’air comprimé, cet échauffement à la compression, suivi d’un refroidissement à la détente est un grave inconvénient, car il n’est pas envisageable de stocker, pendant une demi-journée ou beaucoup plus, de l’air comprimé chaud dans un réservoir sans qu’il ne se refroidisse.

Des diagrammes où l’on voit les différences

Notations et unités :
Nous utiliserons ci-dessous des variables « réduites » c’est-à-dire sans dimension, basées sur les unités suivantes:
  • L’unité de pression est P0, de préférence la pression atmosphérique (≈100 Kp).
  • L’unité de volume est V0,  le volume d’air objet du diagramme, par exemple 1 m3.
  • L’unité de température est T0, de préférence  la température ambiante, 293,2 °K = 20°C par exemple
  • L’unité d’énergie est P0 V. Ainsi, dans le diagramme Pression vs. Volume ci-dessous, 20 petits carreaux = 2 grands carreaux = P0 V0 = 100 Kj.
  • γ = Cp/Cv, rapport des chaleurs spécifiques des gaz parfaits, soit 1,402 pour l’air
  • k est le rapport volumétrique de compression


Toutes les formules ci-dessous expriment des relations entre des paramètres sans dimension qui sont :
K, γ, P/P0, V = V/V0, T/T0, E/(P0 V0)

Le diagramme Pression vs. Volume ci-dessous, dit de « Clapeyron », qui met en jeu une compression et  une détente dans des machines idéales de rendement 100%, porte sur une quantité déterminée de l’air à 293,2°K (20°C) comprimé, puis détendu selon un rapport volumétrique k, (ici k =27), et ce dans deux cas, adiabatique ou isotherme.
Par convention, nous appellerons ci-dessous « cycle adiabatique » un cycle composé d’une compression et d’une détente adiabatiques, sans oublier que dans ce cycle, le refroidissement après compression et le réchauffement après détente, sont inévitables, mais ne sont pas adiabatiques.

Son allure générale rappelle celle, archi-connue, d’un cycle de moteur à combustion interne, mais cette analogie est très limitée :
  • Le cycle d’un moteur est parcouru dans le sens des aiguilles d’une montre, car son aire est proportionnelle à l’énergie mécanique produite, alors que le cycle adiabatique est parcouru dans le sens inverse, car son aire  est proportionnelle à l’énergie mécanique transformée en chaleur, et donc non restituée.
  • Le haut d’un cycle moteur est une verticale (augmentation de pression à volume constant, due à l’élévation de température résultant de la combustion du carburant), alors que le haut du cycle adiabatique comporte une horizontale (baisse de volume par refroidissement inévitable, à pression constante)
  • La détente d’un moteur thermique se produit 5 à 20 millisecondes après la compression, alors qu’en stockage, plusieurs heures les sépareront.
  • La détente et la compression d’un moteur thermique ont lieu dans la même machine, alors qu’en stockage, elles sont séparées par ce stockage, et réalisées par deux machines dédiées qui ne fonctionneront pas en même temps.





Isotherme, en bleu

0 à Compression isotherme à P à Détente isotherme à  0

  • La courbe 0P ou P0 est la même quel que soit le sens de parcours.
  • L’aire contenue dans le cycle 0P0 est nulle : pas de pertes.
  • La surface du triangle curviligne 0PH, sous la courbe bleue c’est à dire l’aire verte + la partie inférieure de l’aire jaune, est à la fois :
    • l’énergie absorbée par la compression,
    • l’énergie restituée par la détente,
    • l’énergie en stock.

Le rendement théorique est donc de 100%.

Adiabatique, en rouge

0 à Compression adiabatique à C à Refroidissement à pression constante à P
P à Détente adiabatique à D à Réchauffement à pression constante à 0

  • L’aire jaune supérieure  comprise entre la courbe de compression adiabatique 0C et l’isotherme 0P est la perte par compression ; c’est l’énergie mécanique absorbée par la compression et non mise en stock, car dissipée en chaleur.
  • L’aire jaune inférieure  comprise entre l’isotherme et la courbe de détente adiabatique BD0 est la perte par détente ; c’est l’énergie tirée du stock et non restituée sous forme mécanique, car dissipée ne chaleur.
  • L’aire verte comprises entre la courbes de détente PD et l’horizontale HD (ordonnée P/P0 =1), est l’énergie restituée par la détente.
  • L’aire jaune totale située à l’intérieur du polygone curviligne 0CPD0 est l’énergie perdue par le cycle adiabatique après refroidissement CP et réchauffement D0.

Dans l’exemple proposé (facteur k=27) on voit que le total des aires jaunes est environ trois fois supérieur à l’aire verte, ce qui rend visible un rendement théorique de l’ordre de 26%.

Dans le diagramme Température vs. Volume ci-dessous, qui utilise les mêmes abscisses en volume réduit que le précédent, la température isotherme est constante par définition.

En adiabatique, la compression 0C provoque un échauffement important (751 °K = 458 °C) en raison duquel l’augmentation de  pression atteint le facteur 27 bien avant que le volume soit réduit du même facteur 27. Mais le refroidissement  CP permet de retrouver le point P de l’isotherme, et donc le ratio 27 sur le volume. Inversement, la détente PD refroidit l’air (114 °K = -179 °C), ce qui réduit la pression dans un facteur 27 bien avant d’avoir retrouvé le volume initial, mais le réchauffement D0 lui fait retrouver la température initiale et le volume initial.



Quantifions les énergies

Isotherme

Ce cas est simple. L’énergie en stock ES, ou l’aire comprise sous l’isotherme bleue après compression, exprimée en unité réduites (E/P0V0),  est théoriquement égale à l’énergie mécanique absorbée par le compresseur, et à l’énergie restituée par la turbine. Il n’y a pas de théoriquement pas de pertes, les rendements étant en conséquence de 100%.

Dans la formule ci-dessous :
  • Le  1er terme est la primitive de P=1/V
  • Le 2ème terme est le travail de la pression atmosphérique sur la variation de volume.

ES = Log(k) – (1+1/k)
Pour k=27 : Es = 2,33

Remarquons au passage que, pour une masse d’air donnée, l’énergie en stock n’est pas proportionnelle à la pression, amis seulement au logarithme du rapport des pressions, à la pression atmosphérique près, souvent négligeable. Mais ne perdons pas de vue non plus que pour un volume de stockage donné (réservoir par exemple), la masse est proportionnelle à la pression.

Malheureusement, ce modèle est impossible. Tout au plus pourra-t-on tenter de s’en rapprocher, comme nous le verrons dans le message suivant: compresseurs et tirbines à étages

Adiabatique

Ce cas est compliqué. L’auteur reconnaît y avoir passé beaucoup plus de temps que prévu !

Les deux tableaux ci-dessous résument les variations de V, P, T et les transferts d’énergie au cours d’un cycle adiabatique fermé 0CPD0. Celui du haut donne les valeurs littérales, et celui du bas les valeurs numériques pour K = 27.



Il appelle les remarques suivantes, de portée générale, mais les valeurs numériques (en valeur réduite) sont valides uniquement pour k = 27 :
  • L’énergie mécanique absorbée par le compresseur est de 4,522
  • L’énergie restituée par la turbine est de 1,169 en valeur absolue
  • Donc le rendement est de 1,169 /4,522 = 25,9%, déjà cité plus haut, très médiocre
  • La chaleur évacuée pour le refroidissement à pression constante CP est de -5,484, c’est-à-dire 470 % de l’énergie restituée : les transferts d’énergie thermique sont largement supérieurs aux transferts d’énergie mécanique.
  • La chaleur reçue pour le réchauffement à pression constante est de 2,132, supérieure à l’énergie mécanique restituée.
  • Les chaleurs évacuées et reçues ne se compensent pas, car elles ne sont pas simultanées, mais elles elles peuvent être transférées par le même échangeur.
  • Les sommes des lignes sont conformes à la réalité physique :
    • L’énergie mécanique absorbée étant largement supérieure à l’énergie restituée fournie, la somme est positive (3,352).
    • Le travail de la pression atmosphère considéré comme une force extérieur est évidemment nul pour le cycle fermé.
  • L’énergie thermique de refroidissement après étant largement supérieure à l’énergie de réchauffement après détente, la somme est négative (-3 ,352).
  • Le cycle étant fermé, la somme algébrique des transferts d’énergie (énergie mécanique ou calorifique) est nulle (3,352 – 3,352 = 0).


Les formules ci-dessus permettent aisément de construire le graphe du rendement η en fonction du rapport volumétrique k. Les graphes ci-dessous sont identiques sauf pour les abscisses, dont l’une est logarithmique.



On y constate immédiatement qu’un cycle adiabatique direct, sans refroidissement intermédiaire, conduit, pour des pressions élevées, à un rendement théorique catastrophique, par exemple 11% pour k = 700 (de 1 bar à 700 bars) et 18% pour k = 100. Il faut redescendre à des ratios k de l’ordre de 3 à 5 pour obtenir un rendement qui reste médiocre de 63% à 72%.

Notons aussi que ce rendement a une limite maximum théorique de 1/(2γ-1) = 55% quand k tend vers 1 (compression très faible).

On peut en déduire immédiatement que le stockage d’énergie par compression adiabatique directe, stockage, puis détente directe n’est pas viable pour cause de rendement catastrophique.

Il est nécessaire de se rapprocher de l’isotherme, à défaut de pouvoir l’atteindre, en procédant à plusieurs  compressions successives, chacune étant suivie d’un refroidissement, et, après stockage, à plusieurs détentes successives, chacune étant suivie d’un réchauffement. Ces compresseurs et turbines à étage sont l’objet de notre message suivant : Compresseurs et turbines à étages