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Résumé
Le stockage thermique par absorption et
restitution d’énergie électrique, théoriquement possible, conduit le plus
souvent à une double application du principe de Carnot, et donc à un rendement
déplorable aggravant un coût élevé. Il n’est donc pas utilisé, mais connaît
deux substituts qui évitent cet écueil:
- Le stockage thermique aval pour utilisation directe est très pertinent et très répandu. Il consiste à chauffer naturellement ou par voie électrique un corps plus ou moins isolé (bâtiment, eau chaude, briques réfractaires, sels fondus, matériaux à changement de phase) qui stockent la chaleur sous forme sensible ou latente, et le restituent, avec un retard choisi ou subi, sous forme de chaleur à basse température, disponible quand la source ne l’est plus (soleil, électricité excédentaire).
- Le stockage thermique amont n’a d’intérêt que pour des centrales solaires thermiques, car les autres sources de chaleur (nucléaire, fossiles) sont permanentes. Il consiste à stocker de la chaleur à haute température sous forme sensible dans des sels fondus, et à la restituer pour prolonger la période de production pendant les pointes de soirée.
Stockage électrique sous forme thermique
Il part de l’idée, incontestable, que l’énergie
électrique excédentaire peut aisément être transformée en chaleur par effet
joule, que la température du stockage n’est pas limitée (sinon par des
contraintes technologique liées aux matériaux utilisés), et que l’on peut
restituer l’énergie au cours des pointes de consommation par une nouvelle
transformation en énergie mécanique, puis électrique. C’est l’adjonction cerclée en rouge ci-dessous.
Ce schéma, tout à fait réalisable, présente
néanmoins de sérieux inconvénients :
- La transformation finale d’énergie thermique en énergie électrique est soumise au principe de Carnot-Clausius, c’est-à-dire à un rendement d’autant plus médiocre que la « source chaude » ne l’est pas assez.
- Or, dans la plupart des cas, l’énergie électrique amont provient d’énergie thermique (nucléaire, fossile…) qui a été convertie en énergie mécanique, puis électrique par une transformation déjà régie par le principe de Carnot-Clausius qui s’appliquerait ainsi deux fois, et déboucherait donc sur des rendements inacceptables de l’ordre de 14% par rapport aux énergies primaires.
- Et ce résultat déplorable serait obtenu par deux centrales électriques travaillant en série et additionnant leurs coûts, pour parvenir un coût extravagant de l’énergie électrique restituée, à savoir 7 fois (=1/14%) le coût de l’énergie primaire, plus le coût du stockage et deux fois le coût de production…
Mais il connaît deux substituts qui contournent les
écueils ci-dessus, le stockage thermique
amont, d’intérêt limité, et surtout le stockage
thermique aval, très courant et tout à fait pertinent, décrits ci-dessous.
Stockage
thermique aval pour utilisation directe
Le stockage thermique aval consiste à utiliser de
l’énergie électrique en heures creuses pour chauffer de l’eau ou toute autre
matière de chaleur latente ou
sensible suffisante en vue de
la restituer sous forme de chaleur. Ce stockage est très courant, et peut même être
involontaire. Citons, par sophistication croissante :
- L’inertie thermique naturelle d’une caverne, d’une habitation troglodyte ou d’une vieille bâtisse aux murs très épais, assure un lissage des variations diurnes de la température extérieure. La masse assure à la fois un stockage important et une très relative isolation.
- L’isolation thermique extérieure, rare en France, sinon dans les locaux d’activité, mais courante en Europe du Nord, agit de la même manière, mais a été optimisée en séparant clairement l’isolation extérieure et le stockage dans la structure intérieure.
- Le stockage d’eau chaude dans un ballon classique, le plus souvent à chauffage électrique, mais aussi à chauffage par panneaux solaires thermiques, notamment dans le midi et dans les DOM-TOM, permet une utilisation différée. Il est utilisé dans les radiateurs électriques intelligents Lancey.
- Le chauffage par résistances placées dans un matériau pondéreux et de chaleur spécifique élevée, le plus souvent des briques réfractaires, permet un chauffage quasi-continu avec une alimentation discontinue, évidemment sans miracle énergétique : l’énergie restituée est la moyenne de l’énergie absorbée, contrairement à ce que certaines publicités pourraient laisser croire ! On utilise ici la chaleur sensible, c’est-à-dire liée à une variation de température.
- Le stockage de chaleur à basse température, quelle qu’en soit l’origine, par des sels fondus qui l’absorbent sous forme de chaleur latente. On utilise à cet effet des combinaisons chimiques choisies en fonction de leur point de fusion, qui doit être d’au moins 40°C mais pas trop élevée, tels que l’acide dodécanoïque (42°C) et l’acétate trihydrate de sodium (57°C).
- Enfin, on voit néanmoins apparaître des matériaux à changement de phase (MCP) dont la température de fusion/solidification est aux alentours de 21°C : ils restituent de la chaleur latente si leur température dépasse 21°C, et en absorbent en dessous de cette température, dans la limite de leur masse fusible.
- Installés en quantité suffisante dans une pièce bien isolée, ils constituent une climatisation passive, qui ne consomme rien, mais qui ne fonctionne que si les températures extrêmes quotidiennes sont équilibrées de part et d’autre de leur température de fusion.
- Utilisés en complément d’apports thermiques, ils peuvent filtrer les variations quotidiennes de température, et donc différer l’utilisation des compléments thermiques au moment opportun.
Mais tous ces exemples, au demeurant tout à fait pertinents, ne constituent en rien un mode de stockage de l’énergie électrique,
puisqu’ils ne restituent pas d’énergie électrique, mais seulement de la
chaleur à une température trop basse pour pouvoir être transformée en énergie
mécanique selon le principe de Carnot-Clausius. Ils tirent leur pertinence du
fait qu’ils permettent d’absorber de l’énergie (électrique, solaire thermique, ou
autre), quand elle est disponible dans de bonnes conditions (faible demande sur
le réseau électrique, soleil en journée, etc.) pour la restituer sous la forme
thermique à laquelle elle était destinée, lorsqu’on en a besoin (chauffage en
heures de pointe, eau chaude sanitaire, etc.).
Stockage thermique amont pour production électrique
Ce scénario,
théoriquement possible, consisterait à stocker la chaleur résultant de la
source d’énergie primaire intermittente, solaire thermique par exemple, ou
d’origine électrique excédentaire en heures creuses, pour la restituer en la
convertissant en électricité pendant les heures de pointe. Bien entendu, cette
conversion est soumise au principe de Carnot-Clausius, exactement comme si la
chaleur avait été utilisée dès da production.
Circonstance
aggravante, le stockage suppose un premier transfert de chaleur depuis
l’énergie primaire jusqu’au stockage (chaleur latente de sels fondus par
exemple) puis un deuxième transfert du stockage vers le fluide thermodynamique
(l’eau par exemple), chacun de ces transferts nécessitant une baisse de
température. Les inévitables pertes thermiques de stockage se traduiraient par
une baisse de température supplémentaire. Il s’en suit que la « source
chaude » le serait nettement moins, amenant un rendement de conversion
significativement inférieur à celui de production directe à partir de l’énergie
primaire.
Mais surtout, ce
scénario manque singulièrement d’objet :
- Les énergies fatales telles que éolien, photovoltaïque et hydraulique au fil de l’eau produisent de l’énergie électrique directement (photovoltaïque), ou via l’énergie mécanique (éolien et hydraulique au fil de l’eau). Reconvertir cette énergie électrique en chaleur aux fins de stockage serait une absurdité.
- Les énergies fossiles (charbon, fioul, gaz naturel) sont aisément stockables en l’état, et les convertir en chaleur par anticipation n’aurait strictement aucun sens.
- L’énergie nucléaire, dont la source chaude l’est un peu moins que celle des énergies fossiles, perdrait donc encore plus à un stockage thermique absorbant la chaleur de l’eau secondaire. Par surcroît, étant généralement disponible en permanence, elle est disponible aussi pendant les pointes.
Plus modestement, Areva cite cette
solution pour prolonger en soirée la plage d’utilisation de centrales
thermiques solaires par un stockage de chaleur à sels fondus dans deux réservoirs
chaud et froid, et réchauffage de la vapeur d’eau par un échangeur sel / eau, selon
le schéma ci-dessous :
Quoi qu’il en soit, à
proprement parler, ce principe n’est pas
non plus, un stockage d’énergie électrique sous forme thermique, puisqu’il
n’absorbe pas d’énergie électrique en amont.
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