vendredi 8 décembre 2017

10 - L’énergie dans le bâtiment


Colonne i du tableau de synthèse

Le chauffage constitue en France le premier poste de consommation énergétique. Il se partage principalement entre le gaz naturel, majoritaire, l’électricité, proche seconde, et accessoirement le GPL, le fioul et la biomasse.

Il est susceptible d’être fortement diminué par amélioration de l’efficacité énergétique :
  • L’amélioration de l’isolation des locaux (murs, toitures, dalles, ouvrants, ponts thermiques...).
  • La réduction des pertes (étanchéité des ouvrants, VMC à double flux, isolation des canalisations d’eau chaude).
  • L’amélioration du rendement des chaudières à fioul ou à gaz (par la condensation de la vapeur d’eau de combustion).
Mais les différents types de radiateurs électriques sont très peu différenciés, tous ayant un rendement de 100% au sens strict, avec un petit avantage pour le chauffage radiant qui apporte un même confort avec une température ambiante un peu inférieure.

Toutefois, les travaux de rénovation peuvent être assez coûteux et n’aboutissent généralement pas au résultat d’une construction neuve RT 2012 ou RT 2020. Or le renouvellement du parc de locaux d’habitation est lent. L’amélioration doit être poursuivie, mais elle n’aura pas pour effet de remettre l’ensemble du parc immobilier au meilleur niveau. Le choix des énergies à utiliser pour le chauffage a donc une grande importance.

Chauffage non renouvelable
  • Le charbon (i,12), devenu marginal, n’a plus d’intérêt pour cette application, et doit donc être abandonné au plus vite.
  • Le fioul (i, 15), liquide, conserve l’intérêt d’un stockage aisé pour les locaux non raccordés au réseau de gaz naturel (i, 19). Les chaudières à condensation améliorent son efficacité énergétique.
  • Le GPL (i, 18), propane ou butane, liquide sous pression modérée, est directement concurrent du fioul. Il a l’avantage d’émettre un peu moins de CO2 que le fioul à énergie thermique égale, de par la composition de sa molécule qui contient un peu moins de carbone, mais cette différence est faible.
  • Le gaz naturel (i, 19), principalement constitué de méthane, est l’une des solutions majeures pour le chauffage. Son utilisation par une chaudière à condensation, désormais systématique, offre un bon rendement, le plus souvent avec production simultanée d’eau chaude sanitaire, mais reste émettrice de CO2 au niveau le plus bas de tous les fossiles, mais non négligeable, qui justifie son abandon progressif au profit de l’électricité décarbonée, de préférence par des pompes à chaleur (j) (voir ci-dessous). Il est stockable dans des quantités limitées, uniquement au niveau du réseau.
  • L’utilisation de l’eau secondaire tiède sortant du condenseur des centrales électronucléaires (i, 20) est théoriquement possible, à ceci près qu’il est pratiquement impossible de transporter de l’eau tiède à une distance notable, alors que ces centrales sont situées loin des villes. Mais elle a été utilisée pour un élevage de crocodiles près de Pierrelatte dans la Drôme.

Chauffage renouvelable
  • L’ensoleillement naturel des habitations (i, 21) est connu depuis toujours. Il peut être renforcé par de grandes baies au sud sans vis-à-vis, et volontairement limité à la mi-journée en été par des pare-soleils correctement positionnés. Il reste intermittent et plus ou moins prévisible.
  • Des capteurs thermiques (i, 22) très simples (réservoir isolé sur cinq faces, sixième face fermés par une vitre face au soleil, et intérieur noir) en toiture peuvent être utilisés pour chauffer de l’eau pour usage en chauffage ou sanitaire. Leur caractère intermittent et contra-cyclique en limite l’intérêt aux basses latitudes.
  • L’utilisation du bois de chauffage (i, 23) remonte à la maîtrise du feu par l’homme. Elle est renouvelable si sa consommation n’excède pas sa croissance naturelle, mais la combustion (i, 22) d’essences variées   dans des conditions aléatoires est loin d’être exempte de pollution : particules fines, CO très toxique, gaz volatils divers, au point que son utilisation en ville devrait être proscrite. Il demande aussi beaucoup de manutentions.
  • Sa transformation en granulés (i, 24) permet d’aboutir à un produit mieux défini, et donc à des conditions de combustion mieux contrôlées, ainsi qu’à automatiser les manutentions. Ils sont à recommander.
  • La géothermie profonde (i, 27) (à ne pas confondre avec les pompes à chaleur dite « géothermiques ») exploite la température plus élevée du sous-sol, elle-même résultant des réactions de fission nucléaire naturelle dans l'écorce terrestre. Elle permet de réchauffer de l’eau préalablement injectée. Elle est entièrement renouvelable, et non intermittente, ce qui la rend particulièrement attractive. Mais elle dépend essentiellement de la géologie, et n’est pratiquement exploitable que dans des régions volcaniques ou sur des failles géologiques. Elle permet à l’Islande, située à cheval sur les plaques américaine et eurasienne, d’obtenir de la vapeur d’eau à une température suffisante pour actionner directement des turbo-alternateurs de réseau électrique. Malheureusement, ce modèle n’est pas transposable en France où seuls le Massif Central et l’Alsace permettent d’obtenir de l’eau tiède utilisable en chauffage urbain. Cette énergie complexe mérite certainement un effort de recherche important.
Les pompes à chaleur (PAC)
( case j, 28 du tableau de synthèse)
Elles sont basées sur le cycle de Carnot-Clausius fonctionnant « à l’envers ». Elle permettent de transférer de la chaleur (ou énergie thermique) de la source froide à la source chaude qui la reçoit en supplément de l’énergie électrique consommée. Ceci permet d’aboutir à un rendement (défini comme chaleur fournie / énergie électrique consommée) largement supérieur à 100%.
Bien que théoriquement applicable à n’importe quel gaz, il est pratiquement nécessaire d’utiliser un gaz dont la température de liquéfaction soit, selon la pression utilisée, dans l’intervalle entre celles des sources en présence.

En matière de chauffage domestique, trois dispositions sont envisageables :
  • Aérothermie : on refroidit l’air ambiant pour aboutir à un rendement de l’ordre de 200%. C’est presque toujours envisageable, même en milieu urbain.
  • Géothermie de surface : on refroidit le terrain avoisinant pour aboutir à un rendement de l’ordre de 300%. Ceci nécessite un terrain  dépourvu d’arbres, et de surface suffisante.
  • Hydrothermie : on refroidit la mer, un fleuve ou un lac proches, et l’énergie thermique ainsi récupérée vient s’ajouter à l’énergie électrique consommée pour aboutir à un rendement pouvant atteindre 500% (mer). Ce procédé est limité aux berges des cours d’eau et au littoral proche.
Ces systèmes ont un rendement d’autant meilleur que la différence de température entre les sources chaude et froide est faible. Si la température de la source chaude est de 40°C (chauffage par radiateurs), ou 50°C (ECS), il n’est pas indifférent que la source froide soit à 10° ou 15°C (terrain, mer), à 0° (lac gelé en surface) ou - 10°C (air en pointe froid hivernale).

Fréquemment utilisés en Europe du Nord et en Suisse, ces PAC sont largement méconnues en France. Ainsi, l’auteur n’a pas réussi à obtenir un seul devis de PAC hydrothermique maritime pour le chauffage de son pavillon situé à 50 mètres de l’Atlantique.

Les PAC (j, 28) constituent un énorme gisement d’efficacité énergétique (j, 2) (et non pas d’énergie renouvelable comme le SOES et l’INSEE les considèrent à tort afin d’afficher un meilleur taux de renouvelable dans le mix énergétique français).

Une solution particulièrement intéressante est un chauffage bi-énergie constitué par un chauffage de base par PAC, électrique par nature, et un chauffage de pointe au gaz, aboutissant à environ 80% de l’énergie thermique fournie par une PAC dont la puissance est inférieure à 50% de la crête, mais fonctionne plus longtemps. Il permet une réduction de l’ordre de 80% x 92% (part décarbonée de l’électricité en France) = 74% du CO2 émis au prix d’un investissement restant raisonnable. Il permet de réduire les coûts et les émissions de CO2, et d'effacer les pointes extrêmes, sans investissement déraisonnable.

L’éclairage bâtiments et public
( case l, 28 du tableau de synthèse)

L’évolution de l’éclairage depuis 20 ans, de l'incandescence vers l’halogène, le fluo-compact, et enfin la LED permet une spectaculaire et durable amélioration de l’efficacité énergétique (l,2) en matière d’éclairage domestique et petit tertiaire. Cette amélioration est moindre, mais reste importante dans le grand tertiaire (tubes au néon vers LEDs) et dans l’éclairage public (halogène, mercure ou sodium vers LEDs).

Toutes ces solutions sont, définitivement et exclusivement, électriques. Elles réduisent fortement la part de de l’éclairage dans la consommation énergétique totale, mais ne peuvent pas être remplacées par des énergies thermiques (bec de gaz, lampe à pétrole ou à huile…) beaucoup moins performantes.

L’électroménager et le numérique
(Case l, 28 du tableau de synthèse)

Ceci recouvre :
  • La cuisson des aliments : Four et cuisinière à gaz ou électrique : l’évolution vers les fours à micro-ondes et plaques de cuisson à induction d’excellents rendements améliore sensiblement l’efficacité énergétique. Il est en revanche plus difficile de les décaler dans le temps, sauf à décaler aussi les heures des repas.
  • L’hygiène et la conservation : lave-linge, lave-vaisselle, aspirateurs, réfrigérateurs, congélateurs. Les versions récentes ont de meilleurs rendements mais les progrès possibles sont désormais limités. Le décalage de leur utilisation en dehors des périodes de pointes devient plus facile et pourrait être automatisé en liaison avec les prévisions de consommation, et si possible les prévisions tarifaires, des opérateurs du réseau électrique, décalant ainsi la consommation vers les périodes sans émission de CO2. La limitation de la puissance (aspirateurs) risque fort d’être une fausse bonne idée : un aspirateur moins efficace, et aussi moins bruyant, sera certainement utilisé plus longtemps, et moins systématiquement arrêté en cas de pause brève 
  • Le numérique au sens large : ordinateurs, smartphones, téléphones, son, image. Il est difficile de prévoir si l’amélioration spectaculaire de leur consommation électrique à performance égale compensera, ou non, la croissance spectaculaire de leur nombre et de leurs performances, et notamment la puissance de calcul démesurée et les écrans toujours plus grands
Pour la plupart de ces applications, l’énergie électrique s’impose. L’amélioration de l’efficacité énergétique sera limitée, mais le décalage de consommation dans le temps encouragé par des différenciations tarifaires est une voie prometteuse qui doit permettre  de réduire l’émission de CO2 et de limiter l’accroissement des investissements en moyens de production décarbonés grâce à leur utilisation presque permanente.


Tableau résumé pour le bâtiment