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jeudi 24 décembre 2020

Polémique sur les hybrides rechargeables

 

Résumé

Un Véhicule Hybride Rechargeable (VHR) est une variante du Véhicule Hybride (VH) dont la batterie, de capacité accrue, peut être rechargée :

  • soit à partir du carburant du moteur thermique entraînant un  alternateur, comme un VH.
  • soit à partir du réseau 230 V par un chargeur, comme un VE.

Il peut ainsi fonctionner :

  • soit comme un Véhicule Electrique (VE) pur,
  • soit comme un Véhicule Thermique (VT) pur (sauf les Toyota)
  • soit encore, le plus souvent, comme un Véhicule Hybride (VH).

L’essai normalisé WLTP d’émissions de CO2 et de consommation, limité à 30 minutes, dont 17 de trafic urbain et 13 de trafic routier, se trouve biaisé : le VHR utilise simultanément ses deux sources d’énergie, ce qui lui permet d’afficher des consommations de carburant, et donc d’émissions de CO2 très basses, grâce à l’utilisation de l’énergie électrique stockée dans la batterie qui se trouve ainsi  presque déchargée en fin d’essai. Ainsi, à titre d’exemple, la berline BMW 330e ci-dessous affiche :

  • Consommation mixte 1,3 à 1,6 litres/100 km
  • Emission de CO2 : 30 à 36 g/km (Norme UE à 95 g/km)

L’acquéreur de ce VHR risque fort d’oublier que ce résultat magnifique, qu’il n’y a pas lieu de mettre en doute, n’a été obtenu qu'après une recharge complète de la batterie, pendant un essai de 30 minutes au cours duquel le VHR n’aura parcouru que 24 km ! Et quelle ne sera pas la déception de cet acquéreur de constater que s’il fait 2 trajets de 30 km par jour, sa consommation revient presque au niveau des VT, voire pire qu’un VT s’il oublie la recharge nocturne, ou s’il fait un trajet au long cours, car son VHR est pénalisée par sa masse plus élevée ! C'est de cette confusion qu'est née la polémique...

Il serait donc nécessaire de modifier la norme WLTP pour les VHR en faisant passer sa phase 4, dite « haute vitesse » de 6 minutes à 36 minutes, pour un totale de 60 minutes et 70 kilomètres (au lieu de 30 minutes et 24 km), ce qui conduirait à afficher des consommations plus réalistes. Les acquéreurs seraient ainsi mieux informés, et les constructeurs ne seraient plus suspectés d’informations trompeuses, quoique conformes à la norme WLTP actuelle.

Message

Rappelons la segmentation énergétique des véhicules de tourisme :

    • Les Véhicules Thermiques (VT), à essence ou diesel, équipés ou non de « start and stop » tirent 100% de leur énergie du carburant. Ils sont dits « conventionnels ». 
    • Les Véhicules Hybrides non rechargeables (VH) font de même. Ils ne peuvent donc absolument pas être considérés comme des véhicules électriques en dépit de publicités ambigües. Leur motorisation comporte une petite batterie (0,5 à 3 KWh), et une (cas le plus fréquent) ou plusieurs (Toyota) machines électriques dont le rôle complexe est en gros le suivant :
      • En mode alternateur, de recharger la batterie si besoin est, ou de récupérer une partie de l’énergie cinétique du véhicule avec une puissance limitée au ralentissement, ne couvrant pas le freinage d’urgence.
      • En mode moteur,
        • d’ajouter son couple de crête à celui du moteur thermique pendant un temps bref, ce qui permet de réduire (« downsizing ») le moteur thermique surabondant, réduction qui améliore son rendement dans les conditions usuelles.
        • d’assurer seul des déplacements sur des trajets très courts à faible vitesse, en ville,
        • sur la plupart des VH, de remplacer le démarreur du moteur thermique.
        • dans les Toyota, de supprimer la boîte de vitesses mécanique, remplacée par un générateur à vitesse de rotation élevée alimentant un moteur de même puissance à couple élevé, selon un rapport continument variable qui permet d’optimiser le point de fonctionnement du moteur thermique dans le plan « couple vs. vitesse de rotation », et accessoirement d’assurer la marche arrière.
      • Les hybrides non rechargeables disposent ainsi d’un système électrique permettant une transmission optimisée et un petit stockage sous forme électrique de l’énergie mécanique fournie par le moteur thermique à partir du carburant. Ce système permet une réduction significative de la consommation (et donc des émissions de CO2 qui leur sont proportionnelles) en usage urbain et périurbain. 
  • Les Véhicules Electriques (VE) sont dépourvus de moteur thermique. Ils sont munis d’un ou plusieurs moteurs électriques alimentés par des batteries embarquées qui ne peuvent être rechargées qu’à l’arrêt. En raison de leur coût et de leur masse qui peuvent dépasser 30 à 40% du VE complet, la capacité des batteries est limitée (20 à 100 KWh), ce qui a pour effet de limiter aussi leur autonomie, conduisant à une utilisation principalement urbaine et périurbaine. Mais ce sont les seuls à être totalement dépourvus d’émissions locales de CO2.
  • Les Véhicules hybrides rechargeables (VHR) ont une architecture très proche des VH. Ils n’en diffèrent que par la présence d’une batterie de capacité plus élevée, de l’ordre de 5 à 10 KWh, et d’un chargeur permettant la recharge de la batterie à l’arrêt partir du réseau 230 V ou de stations dédiées. Ils sont donc vraiment hybrides, puisqu’ils ont deux modes de fonctionnement distincts, utilisant le carburant ou de l’électricité. Selon la capacité de leur réservoir, ils peuvent avoir la même autonomie qu’un VT. Selon la taille de leur batterie, ils peuvent être utilisés en mode VE « zéro émission » en ville. Ils semblent avoir toutes les qualités, en dépit d’une masse et un prix élevés. Pourquoi ont-ils déçu certains utilisateurs ? Pour le comprendre, il faut se pencher de plus près sur la norme WLTP.

La norme WLTP

Pour les véhicules de classe 3 (plus de 34 KW/tonne, c’est-à-dire la plupart), cette norme est résumée dans le cycle ci-dessous qui comporte 4 phases représentatives des conduites urbaines, suburbaines, sur route et sur autoroute, et ce en moyenne sur la vie du véhicule.

L’ensemble aboutit à une vitesse moyenne de 54 km/h, plausible sur la vie d’un véhicule qui roule en ville et s’arrêt aux feux rouges et dans les encombrements. L’autonomie d’un véhicule selon le cycle WLTP correspond à des trajets quotidiens moyens simulés par ce cycle. Lorsque le « plein » de carburant ou de batterie peut être fait tous les soirs, rapidement (carburant) ou en temps masqué (recharge nocturne d’une batterie), l’autonomie a peu d’importance dès l’instant ou elle excède nettement le trajet quotidien.

Mais pour être significative aux yeux des utilisateurs, l’autonomie d’un véhicule doit en réalité être appréciée sur de longs trajets à 110 ou 130 km/h, qu’un VT ou VH, dont l’autonomie est de 500 à 1 000 km, peut parcourir sans arrêt, ou, au pire, au prix d’un arrêt de quelques minutes pour refaire le plein de carburant. Au contraire, un VE nécessitera un ou plusieurs arrêts de l’ordre d’une heure à une station de recharge pouvant n’être ni localisée à la distance optimum, ni disponible dès l'arrivée.

L’autonomie au long cours des VE et VHR

Elle devrait donc faire l’objet d’une norme représentative des grands voyages qui pourrait se baser sur le cycle WLTP actuel modifié par une pondération majorée de la partie « très haute vitesse » qui devrait ainsi passer de 6 minutes à au moins 36 minutes pour un essai total de 60 minutes au lieu de 30. En d’autres termes, la pondération de la partie à haute vitesse serait multipliée par 6 pour abouir à la modélisation correcte d'un long trajet.

 Ce faisant, les VE, et VHR en mode électrique, seraient ramenés à la réalité :

  • Force aérodynamique prépondérante, au lieu de négligeable ou basse
  • Moindre intérêt de la récupération d’énergie cinétique
  • Force de roulement élevée en pourcentage du poids des batteries
  • Mode électrique des VHR limité à quelques dizaines de kilomètres.
  • Et donc impossibilité de privilégier le mode électrique pour afficher une moindre consommation de carburant.

On s’apercevrait alors que l’autonomie pratique des VE au long cours n’est guère supérieure à la moitié de leur autonomie WLTP qui figure actuellement sur les documentations de fabricants. Une Renault Zoé, excellent VE qui affiche 395 km d’autonomie WLTP, circulant aux vitesses licites maximum, par mauvais temps (froid, vent de SW), et voulant conserver 10% de marge de sécurité, ne pourra pas franchir les 210 km séparant Paris du Mans… Il devra recharger au-delà de Chartres. La raison principale est que la force aérodynamique à vaincre, négligeable en utilisation urbaine, devient très prépondérante à 130 km/h, et même à 110 km/h. Il pourrait peut-être faire le trajet à 70 km/h, mais il perdra ainsi une heure, soit le temps d’une recharge !

La consommation WLTP des VHR

Les VHR, souvent de grosses berlines, affichent des émissions de CO2 très basses, souvent de l’ordre du tiers des leurs homologues VT, et des consommations évidemment dans le même rapport.

Nous avons pris pour exemple le VHR BMW 330 e, dont ci-dessous photo et caractéristiques affichées par le constructeur, mais nos remarques valent pour tous les VHR qui sont presque tous de gros véhicules, souvent plus gros que cet exemple.



Le constructeur BMW affiche les caractéristiques suivantes :

 

Ajoutons sa masse, près de 2 tonnes, pour une berline de taille moyenne supérieure.

Ces résultats, qui ne sont pas mensongers, peuvent faire illusion auprès d’acquéreurs non avertis qui imaginent qu’en mode thermique les consommations seront très basses, et qu’en plus elles seront nulles en mode électrique, le tout avec une très large autonomie...

En réalité, conformément à la norme, l’essai WLTP est fait en mode mixte : pendant les 30 minutes de test, le VHR, dont la batterie est initialement chargée, va utiliser au l’énergie  électrique préalablement stockée, ne recourant au mode thermique que dans les conditions les plus favorables, principalement en haute et très haute vitesse, pour ne pas vider la batterie avant la fin du test.

Il faut donc comprendre qu’au cours de l’essai WLTP, le véhicule a utilisé les quantités indiquées de carburant, ET a simultanément vidé sa batterie, ce qui explique ses merveilleuses performances thermiques !

Dans les conditions réelles d’utilisation, qui peuvent être très variables au gré des circonstances, un VHR :

  • En mode thermique pur, consomme autant que n’importe quel autre VT équivalent, et même un peu plus car il est plus lourd que lui en raison de la masse du moteur électrique et de la batterie
  • En mode électrique pur, il se comporte comme un VE, avec une autonomie largement réduite en raison de sa batterie très limitée, mais il n’est pas plus lourd que le VE équivalent, car sa petite batterie compense, et au delà, la présence du moteur thermique.
  • En mode mixte, a priori préférable, il se comporte comme un VH, avec une meilleure autonomie électrique, mais aussi avec une masse plus élevée due à sa batterie plus importante.
  • Au long cours, il consommera un peu plus de carburant qu’un VH car il est plus lourd, sauf à faire des recharges fréquentes pour privilégier le mode électrique.
     Le VHR convient donc à des utilisateurs effectuant beaucoup de petits trajets urbains quotidiens             couverts par le mode électrique seul, avec recharge chaque nuit, mais voulant conserver une longue         autonomie occasionnelle qui sera obtenue en mode thermique. Sur un tel programme, il consommera      moins qu’un VH grâce au mode électrique en ville, mais sera un peu pénalisé par sa masse plus             élevée au long cours.

Pour informer correctement les clients, il suffirait de modifier la norme WLTP comme indiqué ci-dessus : l’augmentation massive des émissions et de la consommation affichées par un test WLTP porté à une heure, lèverait toute ambiguïté : il n’y a pas de miracle sur sa consommation et ses émissions de CO2.

 

Ceci aurait aussi pour effet heureux de marquer la fin des bonus abusifs pour ces VHR qui n’ont ni la propreté, ni les inconvénients des VE, et de les remettre au niveau des VH dont ils ne sont qu’une variante à capacité de batterie augmentée.

mardi 1 juillet 2014

Batteries automobile pour stockage de de l'énergie de réseau


Nous avons vu dans le message « Problématique du stockage de l’énergie » que l’équilibrage du réseau électrique entre :
  • une consommation très variable
  • et une production dont une part croissante est « fatale », c’est-à-dire intermittente et plus ou moins prévisible (énergies hydraulique au fil de l’eau, marémotrice, éolienne, photovoltaïque)
aboutira à poser le problème du stockage de l’énergie électrique excédentaire produite par les filières fatales en période de faible consommation.

Nous avons vu également dans notre message précédent, que l’idée de stocker cette énergie dans une batterie d’accumulateurs stationnaires, évidente et très ancienne, se heurtait au problème du ratio coût / longévité de ces batteries qui constituent bien une solution techniquement correcte, mais non viable pour des raisons uniquement économiques.

Une solution envisagée par les promoteurs (mais pas les constructeurs) des véhicules hybrides rechargeables (VHR) et des véhicules électriques (VE) consiste à utiliser les batteries des véhicules pour le stockage provisoire de l’énergie de réseau, et ceci selon deux scénarios bien distincts :

  • Le recyclage des batteries de VE ou de VHR réformées, puis regroupées en batteries stationnaires
  • La décharge temporaire de batteries de VE ou de VHR connectés pour recharge
Recyclage des batteries de VE ou VHR

Ce recyclage constitue une variante du stockage par batteries stationnaires, dans lequel on remplace des batteries stationnaires dédiées par des batteries automobiles recyclées. Il ne pose aucun problème de principe  particulier et reste conforme au schéma ci-dessous, déjà publié, à quelques détails près.



Toutefois, dans cette hypothèse, de nombreuses incertitudes, difficiles à évaluer, apparaissent :

Quel sera l’état des batteries réformées ?
  • Si ces batteries étaient propriété de l’utilisateur, ce dernier risque de ne prendre la décision (très coûteuse) de remplacer sa batterie, qu’après une réduction très significative de ses performances : capacité, puissance (ou résistance interne), courant d’autodécharge, mais cette réduction sera aussi appréciée à l’aulne individuelle du rapport entre le trajet quotidien et l’autonomie résiduelle.
  • Si ces batteries étaient louées, tout dépendra des termes du contrat, qui pourra inclure soit une forme de garantie prévoyant le remplacement dès qu’un seuil minimum de performances ne sera plus atteint, soit un remplacement forfaitaire selon des critères de temps, de kilométrage ou autre.
C’est dire que dans tous les cas, l’état des batteries récupérées sera très dispersé.

A quel prix ?

On peut imaginer un marché concurrentiel de l’occasion sur lequel des récupérateurs proposent soit un prix forfaitaire par référence, soit un prix par Kwh de capacité résiduelle, pouvant aussi tenir compte d’autres paramètres variés tels que l’âge, le kilométrage, la référence…

Mais il n’est pas certain qu’un tel marché puisse exister : les VE et VHR resteront, plus encore que les véhicules conventionnels, un marché captif des constructeurs. Ceux-ci seront certainement tentés d’établir un système d’échange standard dans lequel l’utilisateur ne paye pas une batterie neuve, mais une soulte, différence de valeur entre la batterie neuve et la batterie réformée, cette dernière étant probablement évaluée forfaitairement à un prix de consigne.

Cette organisation très simple existe déjà pour de nombreux organes importants : moteur, boîte de vitesses, pompe hydraulique, démarreur, alternateur, mais elle n’existe pas pour les batteries de démarrage, parce que ces dernières ne font pas l’objet de rénovation.

Qu’en sera-t-il pour les batteries des VE et VHR ? Difficile à dire.

Par rapport à une batterie neuve, une batterie recyclée présente plusieurs inconvénients :
  • Une capacité réduite, que nous considérerons à 50% par hypothèse
  • Une durée de vie réduite dans des proportions difficiles à évaluer, mais certainement substantielles.
  • Une puissance réduite ou, en d’autres termes, une résistance interne accrue.
Supposons, afin de traiter les questions suivantes, que le prix de marché exprimé par Kwh résiduel (ce qui intègre la baisse de capacité) puisse s’établir à la moitié  de ce même prix pour une batterie neuve, afin de prendre en compte aussi la durée de vie et la puissance, et qu’elle soit finalement compétitive (en Kwh) non seulement par rapport à une batterie neuve, mais aussi par rapport à une batterie stationnaire.

Comment les regrouper ?

Nous avons vu dans le schéma ci-dessus, explicité dans le message dédié, que les batteries étaient des assemblages en série et en parallèle d’éléments électriquement identiques.
  • Les batteries recyclées seront inévitablement triées par référence de première monte.
  • Toutefois, des éléments de même référence, mais dont les paramètres électriques sont différents en raison de leurs dégradations différenciées, devront également être triées par niveau de performance, le montage série / parallèle ne pouvant être envisagé que sur des batteries de caractéristiques très voisines.
Bien entendu, en reprenant l’exemple d’un très petit stockage de 1 Mwh,
et en tablant toujours sur une tension uniforme des batterie, 500 volts par exemple, le montage en série des éléments est déjà fait à l’intérieur de chaque batterie recyclée. La batterie d’ensemble sera constituée uniquement par la mise en parallèle des batteries recyclées. S’il s’agit, par exemple, de batteries de 20 Kwh nominal déclassées à 10 Kwh, il en faudra 100.

Il restera à s’assurer que ces batteries automobile peuvent réellement être mises en parallèle, et quelles sont leurs caractéristiques de charge. A défaut, ou débouche sur une électronique de conversion beaucoup plus complexe.

Il est à prévoir la défaillance d’une batterie recyclée parmi les 100 en parallèle sera fréquente, et devra entraîner automatiquement sa mise hors circuit, probablement par un disjoncteur dédié à cette application.

On peut ensuite concevoir :
  • Soit une maintenance continue par remplacement rapide de la batterie défectueuse,
  • Soit un remplacement global des batteries recyclées, par exemple quand le pourcentage ce celles qui restent utilisables tombe en dessous d’une valeur plancher.
Finalement, cette solution, encore difficile à évaluer, souffre a priori des faiblesses suivantes :
  • Tri par référence
  • Tri par niveau de dégradation
  • Possibilité de mise en parallèle incertaine
  • Déstandardisation
  • Faible fiabilité
  • Maintenance lourde
Il n’est pas certain que ses inconvénients puissent être compensés par un moindre prix, face à des batteries stationnaires neuves à longue durée de vie.

De manière plus générale, on constate depuis fort longtemps que les tentatives d’utilisation de composants automobiles, dont le rapport qualité / prix est imbattable, dans des applications hors automobile, réussissent rarement pour deux raisons principales :
  • Nécessité d’adaptation du composant automobile à l’application hors automobile, dont le coût est souvent plus élevé que celui du composant lui-même.
  • Evolution constante des composants automobile ne prenant pas en compte les applications dérivées, et aboutissant souvent à leur arrêt prématuré.
Les batteries de VE ou VHR n’échapperont pas à ces problèmes…

Décharge temporaire des batteries de VE ou VHR connectées

Dans cette hypothèse radicalement différente, on envisage d’utiliser les batteries des VE ou VHR en cours de charge comme batteries tampon réparties chez les utilisateurs.

Charge de batterie : Quelle installation est nécessaire ? 

Pour un chargeur, l’installation domestique à prévoir est très simple et se limite  à une prise au garage si le chargeur est embarqué, selon le schéma ci-dessous. Le chargeur est alors un consommateur parmi les autres.



Si le chargeur n’est pas embarqué, il se trouve dans un coffret mural et la prise est alors une prise dédiée, ce qui ne change pas grand-chose.
Les puissances envisagées sont faibles : on peut recharger un VHR de 5 Kwh avec 1,7 Kw pendant  3 heures, ou un VE de 20 Kwh avec 3 Kw pendant 7 heures, c’est-à-dire avec des prises domestiques de base 16A connectées à des fils de 2,5 m² selon les normes usuelles pour toutes les prises domestiques. L’adjonction d’un chargeur est facile dans une installation domestique, et ne nécessitera pas nécessairement de changement de la puissance souscrite.

Batterie utilisée en tampon : quelle installation nécessaire ?

Il devient alors nécessaire :
  • De produire du courant électrique  230 V - 50 Hz à partir de la batterie afin de le renvoyer au réseau. Il faut donc ajouter un onduleur, plus coûteux qu’un chargeur à puissance égale, et par surcroît plus puissant comme explicité plus bas.
  • De décompter en montant et en valeur l’énergie électrique renvoyée au réseau ce qui nécessite un compteur plus intelligent, capable de gérer séparément l’énergie consommée (compteur usuel) et l'énergie restituée.
  • D’affecter un disjoncteur principal dédié à cette ligne qui ne peut être confondue avec l’autre.
On aboutit au schéma ci-dessous, un peu plus compliqué que le précédent, mais néanmoins tout à fait gérable. Ce système est, au plan technique, tout à fait possible.


Notons néanmoins que la durée des pointes nationales ou régionales étant de l’ordre de 1 à 3 heures, à comparer à des temps de charge lente de 6 à 9 heures. La puissance de décharge, celle de l’onduleur, devra donc être environ 3 fois supérieure à celle du chargeur, et les prises, disjoncteurs et lignes devront être dimensionnées en conséquence, probablement en 32 ampères, soit des lignes de 6 mm², à tirer spécialement. Le coût devient significatif, et ne pourra être amorti que sur des pointes brèves, ce qui peut poser un premier problème économique.

Batterie utilisée en tampon : quelles modalités de gestion ?

Nous avons vu dans des messages antérieurs (« batteries stationnaires » et « carburant électrique » ) que le principal facteur de coût de l’énergie électrique restituée est la valeur de la batterie divisés par le nombre de cycles dans sa durée de vie, loin devant le coût de l’énergie électrique emmagasinée et divisé par le rendement de la batterie (de l’ordre de 80%, soit un coefficient 1,25).

Bien entendu, l’usage de batteries VE ou VHR en tampon du réseau ERDF a pour effet de les cycler, puis qu’elles ne pourront restituer que l’énergie qu’elles auront préalablement emmagasinée, et ces cycles additionnels comptent dans la durée de vie de la batterie au même titres que les cycles d’utilisation en tant que véhicule.

Il s’en suit qu’aucun propriétaire de VE ou VHR n’acceptera de « prêter » la batterie de son véhicule à l’opérateur afin contribuer à la production de crête dont  ce dernier a besoin, s’il n’est pas incité par un tarif de rachat très élevé, que l’on peut évaluer à 0,80 €/Kwh (soit 800 €/Mwh) selon l’approche déjà réalisée à propos du « carburant électrique ». Il est hautement probable que l’opérateur pourra trouver des sources qui soient à la fois moins dispendieuses, plus centralisées et plus simples.

Si la pratique de la location des batteries, analogue à celle que Renault pratique, se répand, il est très improbable que le loueur autorise son locataire à ce type d’application qui n’est pas prévu dans son forfait mensuel et/ou kilométrique.

Cet aspect économique se double d’un aspect pratique : l’utilisateur qui met son VE ou VHR en charge le fait évidemment pour disposer d’une batterie pleine au moment où il utilisera son véhicule, et ce moment peut être bien antérieur au lendemain matin. L’utilisation de la batterie en tampon ne peut donc qu’être subordonnée à un accord préalable et quotidien de l’utilisateur, accord qui peut difficilement se présumer, et qui nécessiterait donc un accord explicite (bouton poussoir ou autre…).

On arrivera fréquemment à une situation très paradoxale : l’abonné-utilisateur va simultanément consommer de l’énergie électrique facturée selon les tarifs usuels (Base, P/C, Tempo, comme tous les autres abonnés) pour ses applications domestiques, et restituer au prix fort (faute de quoi il ne le fera pas) de l’énergie électrique issue de la batterie de son VE ou VHR. Le solde ces opérations contradictoires sera le plus souvent une consommation, surtout si l’abonné est en « tout électrique », donc sans intérêt, et économiquement très coûteux, pour l’opérateur.

Conclusion

Manifestement, la solution est trop complexe pour être économiquement viable, alors qu’il existe une solution simple, déjà décrite dans un message précédent : La tarification variable de l’énergie électrique, qui reprend les principes bien connus du « yield management ». Il est vrai qu’elle demande une modification législative, donc du courage politique, mais son efficacité serait immédiate, profonde, et constituerait une avancée écologique majeure par la réduction de pointes.

Les militants écologistes disent avec juste raison : « Les kilowattheures les moins polluants sont ceux qu’on ne produit pas ». C’est particulièrement vrai pour les crêtes : il vaut mieux les réduire par un tarif dissuasif incitant à une consommation différée, que les compenser par des batteries très coûteuses selon une organisation complexe.