jeudi 24 novembre 2011

Pollution et risques par filière

Ce message ne traite pas des émissions de CO2, qui font l’objet d’une fiche spécifique.

Les centrales électro-hydrauliques nécessitent presque toutes des barrages permettant de créer une réserve d’eau, et éventuellement de créer ou d’augmenter la hauteur de chute. Ces lacs de barrage modifient profondément l’écosystème des vallées noyées en amont, mais peuvent présenter un intérêt touristique : ci-dessous, les lac et barrage de Bort-les Orgues, en Corrèze. Bien que très rare, on ne peut exclure le risque de rupture d’un barrage comme celui de Malpasset sur le Var, près de Fréjus, qui fit 423 morts en 1959, mais qui, étant destiné à l’irrigation, ne produisait pas d’énergie, et se trouve donc hors sujet.



L’extraction du charbon est dangereuse, particulièrement en sous-sol : effondrements, explosions (« coups de grisou »), silicose, affaissements miniers… Ses victimes se comptent par dizaine de milliers. Sa combustion produit des cendres et des gaz indésirables.
L’extraction du pétrole est intrinsèquement moins dangereuse, mais son extrême rentabilité conduit souvent à des risques politiques majeurs pouvant conduire à des guerres. Son extraction en mer et son transport par pétrolier peuvent occasionner des « marées noires ». Il doit être distillé avant usage, les composantes « nobles » (essence, kérosène, gasoil, benzène, etc.) étant destinées aux transports et à la pétrochimie, et les plus lourdes aux utilisations industrielles et à la production d’énergie. Selon son traitement, sa combustion peut aussi amener des gaz indésirables, notamment NOx et SO2.
Le gaz naturel, principalement constitué de méthane (CH4), est le moins polluant et le moins dangereux des hydrocarbures, mais ne peut se transporter que par gazoduc ou par bateau dit « méthanier » après une liquéfaction coûteuse à -162°C. Contrairement à une idée tenace ayant son origine dans le « gaz à l’eau » (CO+H2) aujourd’hui abandonné, le gaz naturel n’est pas en lui-même un poison, et n’est nocif qu’après inhalation de quantités importantes. Toutefois : 

  • sa combustion avec insuffisance d’oxygène notamment dans une installation en mauvais état, peut produire du monoxyde de carbone CO, très toxique.
  • comme tous les combustibles, une fois mélangé à l’air, notamment en cas de fuite, il peut évidemment exploser.
Mais ces risques, qui sont communs à tous les combustibles carbonés (poussière de bois ou de charbon, fuel, GPL), bien réelles dans des installations de chauffage domestique à la maintenance incertaine,  ne concernent guère le gaz en tant qu’énergie primaire pour produire de l’électricité  dans une centrale industrielle de grande puissance.

L’éolien apporte une pollution optique et acoustique qu’il faut bien évaluer. Par exemple, pour créer en Bretagne les sources d’énergie électrique qui manquent à cette région, on pourrait, pour une même production annuelle:

  • Reprendre le projet (abandonné en 1981sous la pression de l'opinion publique) de centrale nucléaireà Plogoff (Sud Finistère), soit une tranche de 1 600 Mw peu visible au pied de sa falaise, et dépourvue de tours de réfrigération atmosphérique, ses condenseurs  pouvant être refroidis par les forts courants marins, 
  • ou installer 4 000 éoliennes de 1,6 Mw sur toute la côte bretonne de St Malo à La Baule, c’est à dire une tous les 150 mètres, tout en sachant qu’elles devraient quand même être doublées par une ou deux centrales thermiques en stand-by, capables de prendre le relais quand le vent tombe 

Manifestement, le choix de la solution écologique n’est pas aussi évident qu’on aurait pu le penser !


Le photovoltaïque conduit à installer des champs de panneaux solaires. Pour produire l’équivalent d’une tranche de centrale nucléaire ou thermique de 1 600 Mw qui tient dans 1 km², il faut environ 1 000 km² (l’équivalent de Paris et ses 3 départements limitrophes), ainsi perdues pour d’autres applications et notamment pour l’agriculture ou la biomasse. Elles doivent aussi être doublées par d’autres centrales à faible inertie, c'est-à-dire principalement thermiques, pour pallier à l’obscurité (aisément prévisible) et à la nébulosité (beaucoup moins prévisible).


En dehors de l’ex-URSS, le nucléaire civil n’utilise que réacteurs dits « à eau bouillante » ou « à eau pressurisée » avec enceinte de confinement. En France, ils sont tous de ce dernier type. Le transport de la matière première porte sur de faibles tonnages, sans risque de pollution. Le réacteur nucléaire est intrinsèquement très dangereux, mais donc très surveillé. L’expérience cumulée dans le monde, portant sur 500 réacteurs BWR ou PWR mis en service depuis 1970 n’a connu que deux  accidents majeurs :

  • Une fusion du cœur à Three Miles Island aux USA en 1979, ayant pour origine une erreur humaine de l’exploitant, qui n’a fait aucune victime et n’a entraîné qu’une faible pollution, l’enceinte de confinement ayant totalement joué son rôle.
  • Le récent accident majeur de Fukushima au Japon, portant sur la fusion partielle ou totale des cœurs de 3 réacteurs BWR sur les 6 installés, avec une pollution majeure, mais n’ayant, à ce jour, pas fait de victimes avérées. Cette centrale a parfaitement résisté à un séisme de magnitude exceptionnelle (8,4), ce qui est plutôt rassurant, mais le tsunami consécutif, qui a dépassé les prévisions les plus pessimistes, et qui a fait près de 20 000 morts par ailleurs, a détruit les systèmes de refroidissement et l'alimentation électrique extérieure, entraînant des échauffements incontrôlés du cœur  et des dégagements d’hydrogène à l’origine de deux explosions chimiques qui ont lourdement aggravé le problème. Deux des trois enceintes de confinement ont connu des fuites, ce qui ne signifie pas qu’elles aient été inutiles. Des pollutions majeures se sont produites, dont les conséquence sont encore difficiles à évaluer. La responsabilité semble être celle des concepteurs (GE et Toshiba), plus que celle de l’exploitant (Tepco). Ses suites sont évidemment à suivre de très près. Voir l’excellente information donnée à ce sujet par l’IRSN.
  • La catastrophe de Tchernobyl est relative à une filière totalement différente, en cours d’abandon, dite graphite eau pressurisée sans enceinte de confinement. La catastrophe a été provoquée par des erreurs humaines s’ajoutant à une culture de sécurité déficiente sur une centrale de conception déplorable. Elle a pris les proportions connues en raison de sa technologie, notamment la combustion du graphite à l’air libre pendant 12 jours. Concernant la filière française, elle n’apporte aucun enseignement, et se trouve totalement hors sujet.
La pollution thermique, commune aux centrales thermiques et nucléaires utilisant des turbines à vapeur, résulte de la nécessité de refroidir les condenseurs de la turbine pour améliorer son rendement thermodynamique.  Elle se traduit par un réchauffement significatif des rivières et/ou par l’émission de vapeur d’eau par les réfrigérants atmosphériques qui procèdent par évaporation partielle (autour de 5%) de l’eau à refroidir. Cette eau n’est pas l’eau de condensation qui circule en circuit fermé (eau secondaire dans le cas des EPR), mais l’eau de la rivière. Cette pollution thermique impose aussi d’implanter ces centrales près de cours d’eau ou au bord de la mer.