jeudi 17 novembre 2011

Les hydroliennes de Bréhat

EDF annonce la mise en place de la première éolienne d’un parc de 4 qui seront immergées au-delà de la bouée « nord Horaine » au NE de Bréhat. Les éléments suivants on été communiqués :
·        Puissance unitaire 500 kw, soit 2 Mw pour le parc
·        Production annuelle du parc 3 000 Mwh /an
·        Masse unitaire, tripode inclus : 1 000 tonnes, soit 4 000 tonnes total
·        Hauteur : 21 mètres
·        Diamètre hors tout : 16 mètres
·        Diamètre rotor : 12 mètres
·        Investissement : 40 M€ pour le parc
·        Convertisseur immergé


Ces éléments appellent les remarques suivantes :

La puissance cinétique d’une veine d’eau de 14 mètres (moyenne stator et rotor) de diamètre à 2 m/sec (3,8 nœuds) est d’environ 580 kw. En supposant un rendement d’hélice de 85%, ce qui est plausible, on retrouve les 500 kw par unité annoncés par EDF. Les chiffres sont cohérents.

Une puissance totale de 500 Kw x 4 = 2 Mw utilisée à 100% produirait 2 Mw x 24 x 365 = 17 520 Mwh.

La production annoncée de 3 000 Mwh correspond à un taux de 17%. Ce taux très bas traduit le fait que la puissance maximum ne sera produite qu’autour des mi-marées de vive-eau. La puissance primaire (énergie cinétique de l’eau) étant proportionnelles au carré de la vitesse du courant, la production sera faible ou nulle autour des étales de haute et basse mer, ainsi que pendant les marées de moyennes ou de mortes-eaux.

La puissance moyenne sur l’année d'une hydrolienne est d’environ 500 kw x 17% = 85 kw, soit 85 x 4 = 340 kw pour l’ensemble du parc. Considérant que la consommation moyenne d’un ménage sur l’année est de l’ordre de 0,7 kw, le parc produira l’équivalent de la consommation de 500 ménages, et non pas 2 000 comme annoncé de façon très optimiste. Par surcroît, il ne s’agit que d’une moyenne : quand le parc ne produira pas, il faudra bien que les ménages soient alimentés par d’autres centrales, probablement thermiques, faute de centrale nucléaire en Bretagne.

Un courant d’eau de u = 2 m/sec est équivalent à une chute d’eau de  u²/2g = 0,2 mètres, soit 20 centimètres. Ce chiffre est extrêmement bas. On ne construit pas de centrale hydraulique avec des chutes aussi basses, car ce ne serait pas économiquement viable. Ceci explique les dimensions monstrueuses de l’ensemble pour une puissance modeste.

Une hydrolienne souffre en plus des complications suivantes :
  • réversibilité, car les courants de marée sont au mieux alternatifs, au pire plus ou moins circulaires.
  • vitesse variable du rotor nécessitant un convertisseur AC / DC / AC 50 Hz
  • étanchéité sous 4 bars (40 tonnes par m²)
  • corrosion et développement des algues et coquillages
  • extrême difficulté de la maintenance
  • liaison par câbles sous-marins.
Il faut mettre en évidence le gigantisme de ces hydroliennes, qui pèsent chacune 1000 tonnes et coûtent 10 M€ en les comparant avec d’autres sources d’énergie capables de fournir la même puissance moyenne de 85 kw :
  • Un petit groupe électrogène de même puissance  pèse 0,5 tonne (2 000 fois moins)  et coûte 20 000 € (500 fois moins). Bien sûr, il consomme du gazole, mais un siècle sera nécessaire pour son prix atteingne celui de l’hydrolienne qui ne durera pas jusque là!
  • L’investissement par Mw installé ou par Mw moyen produit est le suivant :
Filière
Invest /Mw installé
Taux
Invest /MW moyen produit
Hydrolien
20 M€
17%
120 M€
Photovolt.
4 M€
15%
27 M€
Eolien
1,2 M€
18%
7 M€
Nucléaire
2,4 M€
80%
3 M€
Thermique
0,35 M€
90%
0,4 M€

On constate que le Mw produit par une hydrolienne nécessite un investissement record :
  • 5 fois plus cher que le photovoltaïque
  • 17 fois plus cher que l’éolien
  • 40 fois plus cher que le nucléaire
  • 300 fois plus cher que le thermique
sans perdre de vue que les lignes du tableau, sauf la dernière, utilisent une énergie primaire dont le coût est nul ou négligeable, et ce sans émission de CO2.

Une hydrolienne, comme une éolienne ou un panneau photovoltaïque, produit une énergie « fatale », dont on ne maîtrise pas la survenance. Son seul petit avantage est la prédictibilité précise de sa production.  Mais elle ne produira en général pas ou peu pendant les pointes de production, au coeur de l'hiver, loin des marées d'équinoxe…

On est vraiment en droit de s’interroger sur l’intérêt de ces hydroliennes, dont le coût de 40 M€ sera payé par l’abonné dans la dernière ligne : « Contribution au service public de l’électricité » !