mardi 22 avril 2014

Stockage d'énergie par l'hydrogène électrolytique


1. Problématique

Nous avons vu dans le message « Problématique du stockage de l’énergie » que l’équilibrage du réseau électrique entre :
  • une consommation très variable
  • et une production dont une part croissante est « fatale », c’est-à-dire intermittente et plus ou moins prévisible (énergies hydraulique au fil de l’eau, marémotrice, éolienne, photovoltaïque)
aboutira à poser le problème du stockage de l’énergie électrique excédentaire produite par les filières fatales en période de faible consommation.

L’hydrogène peut être produit par électrolyse de l’eau, et utilisé comme carburant pour un moteur à gaz ou une turbine à gaz couplés à un alternateur, ou directement dans une pile à combustible. Il a donc a été proposé depuis longtemps comme vecteur d’énergie, et ce dans trois applications bien distinctes :
  • Le stockage de l’énergie de réseau
  • Les véhicules
  • L’alimentation d’appareils électroniques portatifs, dite « mobilité »
Si la possibilité d’utiliser l’hydrogène comme vecteur d’énergie est techniquement indiscutable, et a d’ailleurs été largement démontrée par des prototypes, notamment dans l’automobile et la mobilité, elle reste économiquement incertaine, particulièrement en ce qui concerne les réseaux, auxquels nous nous limiterons ci-dessous.

2. L’hydrogène présente des avantages évidents :
  • Un record absolu de densité énergétique par rapport à sa masse : 141,8 Mj/Kg, ou 39,4 Kwh/Kg, plus de 3 fois supérieure à celle des hydrocarbures,
  • Une énergie thermique exempte de toute pollution directe
  • Une matière première qui est l’eau, disponible en quantité illimitée
  • La capacité d'être utilisée directement dans des piles à combustible
Mais aussi quelques sérieux inconvénients :
  • Le gaz le plus léger (89 gr/m3 dans les conditions normales), et donc une énergie volumique faible, égale à 30% de celle du méthane. Son stockage nécessite donc des pressions élevées, c’est-à-dire des réservoirs lourds et coûteux.
  • Une température d’ébullition de -252,8 °C, soit 20,5 °K, proche du zéro absolu. Son énergie de liquéfaction est théoriquement de 14 MJ/Kg, mais compte tenu d'un rendement de liquéfaction de l'ordre de 1/3, atteint pratiquement 47 MJ/Kg, soit  1/3 de son enthalpie de combustion.
  • Une masse volumique à l’état liquide qui n’est que de 71 kg/m3.
3. Les organisations théoriques possibles


L’hydrogène, et son sous-produit l’oxygène, résultant de l’électrolyse utilisant l’énergie électrique fatale excédentaire, peut être utilisé de différentes manières résumées dans le synoptique ci-dessus :
  • Stockage (comprimé ou cryogénique) avant utilisation  en période de pointe :
    • dans une pile à combustible
    • ou dans une centrale à gaz à cycle combiné.
  • Injection dans le réseau de gaz naturel, dans des proportions limitées car les paramètres du méthane sont assez différents.
  • Transformation de l’hydrogène en méthane par réaction exothermique  sur le CO2, dite « méthanation ». Ce méthane peut lui-même être :
    • injecté sans limite dans le réseau de gaz naturel, dit « G20 », dont le méthane est le principal constituant.
    • ou stocké (comprimé ou cryogénique) avant utilisation aux heures de pointe :
      • dans une centrale électrothermique classique ou à cycle combiné, avec émission de CO2,
      • ou dans une centrale à oxycombustion utilisant aussi l’oxygène sous-produit, avec émission de CO2 aisément recyclable.
Nous allons évaluer ces différentes possibilités en cherchant à en évaluer le coût et le rendement.

4. Electrolyse

Extrait de l’exposé de l’AFHYPAC (Association Française pour l’HYdrogène et la Pile A Combustible ayant pour membres Air Liquide, EDF, GDF-Suez, AREVA et bien d’autres…) :

« La décomposition de l’eau par électrolyse s’écrit de manière globale:
 H2O à H2 + ½ O2 avec une enthalpie de dissociation de l’eau : ∆H=285 kJ/mole. Cette décomposition nécessite un apport d’énergie électrique, dépendant essentiellement de l’enthalpie et de l’entropie de réaction. Le potentiel théorique de la décomposition est de 1,481 V à 298° K. Les valeurs classiques des potentiels de cellules industrielles sont de l’ordre de 1,7 à 2,1 V, ce qui correspond à des rendements d’électrolyse de 70 à 85 % (en se rapportant au PCS de 3,55 kWh/Nm3). La consommation électrique des électrolyseurs industriels (auxiliaires compris) est généralement de 4 à 5 kWh/Nm3 »

Plusieurs technologies existent (acide, basique, à membrane polymère, à membrane céramique….). Les installations récentes sont toutes  constituées de plaques bipolaires jouant le rôle d’anode d’un côté et cathode de l’autre, traversées par le courant électrique perpendiculairement à leur surface, donc de très faible résistance, et montées en série ce qui multiplie la tension par le nombre de plaques, et évite les intensités trop élevées nécessitant des redresseurs coûteux et de médiocre rendement. Pour plus de détails, voir le document de l’AFHYPAC et sa photo ci-dessous :


Sur ces bases, nous considérons par simplification que la tension des cellules est de 1,481 à 25°C volt plus 0,5 volt, sans prise en compte des auxiliaires, soit un rendement de 1,481 / (1,481+0,5) = 75%, ce qui aboutit à 4,7 Kwh/Nm3, appréciation plutôt optimiste, l’AFHYAPC n’étant pas suspecte de pessimisme en la matière.

Selon l’approche économique de cette association, le coût de l’hydrogène produit varie évidemment avec le coût de l’énergie électrique utilisée selon le graphe ci-dessous :




Dans cette comparaison, ne pas perdre de vue que l’hydrogène, bien que produit à partir d’énergie électrique, s’apparente à une énergie primaire.
Selon cette courbe, on observe que la pente du prix de l’énergie « hydrogène » se déduit de celui de l’énergie électrique (toutes deux exprimées en €/Mwh) par un diviseur de 64% (qui est un rendement net tout compris) et addition d’un terme fixe de 25 €/Mwh, qui est le coût du processus. L’écart avec le 75% donné plus haut résulte sans doute des auxiliaires.

Nous tablerons pour la suite sur un rendement de 70%, à mi-chemin entre les deux approches, résolument optimiste.

 Ce chiffre correspond à 1,481 / (1,481+0,64) = 70%

5. Stockage de l’hydrogène sous pression

Nous avons vu que l’hydrogène a une enthalpie de combustion particulièrement élevée, de 142 Mj/Kg, mais qu’il est très léger, ce qui amène à le stocker :
  • Soit à l’état liquide, mais selon l’AFHYPAC, la liquéfaction très difficile de l’hydrogène requiert la consommation d’une énergie égale à 30% de l’enthalpie de combustion de cet hydrogène, à laquelle s’ajoutent les pertes par évaporation proportionnelles à la durée du stockage à l’état liquide. Avec juste raison, cette solution n’est généralement pas retenue.
  • Soit sous des pressions élevées, ce qui conduit à des réservoirs pressurisés que nous analysons ci-dessous. L’énergie requise par une compression isotherme de ce gaz supposé parfait (hypothèses très optimistes) à 70 GP (700 bars) ressort à environ 4% de son enthalpie de combustion, soit un rendement énergétique de 96% qui vient en facteur des autres rendements.
Réservoirs pressurisés

Calculons le rapport k entre  la masse du réservoir et la masse du gaz qu’il contient. Bien entendu, ce rapport  dépend du matériau et de la forme du réservoir. Nous nous placerons dans les conditions suivantes :
  • Le réservoir est sphérique, ce qui est l’hypothèse la plus optimiste pour deux raisons :
    • La sphère est le volume qui offre le rapport volume / surface le plus élevé
    • La contrainte dans l’enveloppe y est homogène et isotrope.
  • Le matériau de l’enveloppe, que nous ne définissons pas, est caractérisé par le paramètre w défini comme suit (en joule/Kg) : 
    • W = σe / ρe = contrainte max. effective / masse volumique
  • Son épaisseur est définie en fonction de la pression p de l’hydrogène pour atteindre exactement la contrainte maximum de travail  σe.
A partir de calculs élémentaires figurant en annexe, on aboutit au résultat suivant :
k = (3/√2) (θ/θN) (pN /w ρg)
dans laquelle :
  • pN est la pression normale (1013 Hp)
  • ρg est la masse volumique normale du gaz, soit (2,01 / 22,4) kg/m3.
  • θN est la température normale (273,3 °K = 0°C)
  • θ est la température maximum d’utilisation (323,3°K = 50 °C)
Chacun des produits entre parenthèses est un nombre sans dimension.
Tous les paramètres, sauf w, sont des constantes.
Il s’en suit que pour w = 105 qui correspond à un acier dur (σe = 760 Gp et ρe = 7600 kg/m²), ce facteur est de k = 28,5. Il ne dépend ni de la pression de l’hydrogène, ni de la taille du réservoir. Une forme différente, notamment cylindrique avec extrémités hémisphériques ne peut déboucher que sur une augmentation du rapport k, jusqu’à +58 % pour un réservoir cylindrique très allongé.

Il s’en suit que, dans ces conditions, l’enthalpie disponible par kilogramme de (combustible + enveloppe) est, au mieux, de :
  • 5 MJ/kg pour l’hydrogène comprimé en réservoir sphérique,
  • réduit à 3 MJ/Kg pour un réservoir cylindrique allongé
à comparer à :
  • 10 Mj/Kg pour le méthane comprimé, réservoir pressurisé inclus
  • 45 Mj/Kg pour un hydrocarbure liquide (pentane ou plus lourd),
  • 0,5 Mj/Kg (0,14 Kwh/Kg) pour les batteries. Toutefois, ces dernières fournissent une énergie finale dont la « valeur » est officiellement 2,58 fois supérieure  à celle d’une énergie primaire à laquelle l’hydrogène s’apparente. Le terme de comparaison serait donc plutôt 1,3 Mj/kg.
Le seul paramètre qui reste disponible est le paramètre w, c’est-à-dire le matériau. Le passage à des matériaux exotiques (titane, aramide, carbone…) pourrait réduire un peu le facteur k, mais encore faudrait-il :
  • Vérifier que la résilience reste bonne (accidents d’origine extérieure...)
  • Rester dans des prix de revient  « industriels » qui n’obèrent pas trop le coût de la compression et du stockage.
6. Piles à combustible

La pile à combustible est physiquement l’exact inverse de l’électrolyse. Elle présente l’avantage de principe de produire une énergie finale, l’électricité, en s’affranchissant (bien que ce sujet fasse débat) du principe de Carnot-Clausius et de ses mauvais rendements.
Admettant que les hypothèses de pertes posées pour l’électrolyse restent valables, le rendement de la pile est alors :
(1,481-0,64)/1,481 = 57%. Ce raisonnement suppose que l’hydrogène soit entièrement transformé, sans aucune perte, ce qui reste à vérifier.

A cet égard, un fonctionnement à l’oxygène pur (sous-produit de l’électrolyse) améliore-t-il le rendement par rapport à un fonctionnement à l’air ? Nous recherchons la réponse.

Le tableau ci-dessous issu de Wikipedia donne un panorama des technologies de piles à combustible :

Un autre tableau ci-dessous, issu de l’AFHYPAC, confirme ce chiffre de 57% N) comme le meilleur compromis de fonctionnement avec une température plus élevée qui réduit le « 1,481 » volt compensée par une intensité plus élevée.

Le rendement de la filière par électrolyse et pile à combustible complète, est donc :
Rendement  = 70% x 96% x 57% = 38%
Indépendamment des coûts du process, du seul fait de son rendement, le coût de l’énergie électrique restituée sera donc 1/38% = 2,6 fois celui de l’énergie initiale.

7. Centrale thermique à hydrogène

La transformation de l’hydrogène en énergie électrique peut aussi se faire par une centrale électrothermique à cycle combiné conventionnelle. En effet, la substitution de l’hydrogène au gaz naturel (principalement du méthane) change relativement peu les caractéristiques thermodynamiques. Comparons les réactions dans les différents cas de combustion dans l’air :

Gaz naturel, stœchiométrique :
CH4 + 2 O2 + 8 N2 àCO2 + 2 H2O +  8 N2 + 800  Kj
(fumées =                     44   + 18x2    + 28x8  = 304 g, soit 2,6 Kj/g)

Hydrogène, stœchiométrique :
4 H2 + 2 O2 + 8 N2 à           4 H2O +   8 N2 + 968  Kj
(fumées =                                 18x4  +   28x8 = 296 g, soit  3,3 Kj/g)

Hydrogène avec 25% d’excès d’air :
4 H2 + 5/2 O2 + 10 N2 à     4 H2O + 10 N2 + 968  Kj
(fumées =                                  18x4  + 28x10 = 352 g, soit 2,7Kj/g)

Pour avoir, si nécessaire, les mêmes températures de fonctionnement avec l’hydrogène qu’avec le gaz naturel, le premier devra être brûlé dans un excès d’air d’environ 5/4 en volume, soit 25%.
Ce raisonnement est un peu théorique car le gaz naturel n’est pas du méthane pur. Il montre néanmoins que les ordres de grandeur sont aisément compatibles. Rappelons au passage que :
  • Les hydrocarbures ne sont jamais brûlés dans les proportions stœchiométriques, mais toujours dans un excès d’air pour prévenir la formation de CO, extrêmement toxique.
  • Ce problème n’existe pas avec l’hydrogène utilisé seul.
  • La température est le plus souvent limitée par la résistance à celle-ci des premiers étages de la turbine, qui sont soumis aux températures les plus élevées après compression adiabatique et combustion.
Ces digressions montrent que l’hydrogène peut se substituer au gaz naturel dans les centrales existantes, sans modification significative.
Une centrale à hydrogène à cycle combiné aura donc un rendement au moins égal aux centrales à gaz à cycle combiné existantes, soit 58%.
Le coût du process est évalué à 15 €/Mwh (ce qui, après prise en compte du gaz naturel à environ 40 €/Mwh, aboutit à 55 €/Mwh qui est bien l’ordre de grandeur du Mwh thermique au gaz).
Le cycle complet à partir d’hydrogène électrolytique affiche donc dans les deux cas un rendement de 70% x 96% x 58% = 39%, avant prise en compte du coût de la filière.

Ce rendement est du même ordre que celui des piles à combustible. Ceci ne signifie pas que les turbines combinées soient interchangeables avec les piles à combustible :
Les turbines à gaz et à vapeur utilisées dans ces centrales sont nécessairement de puissance très élevées, pratiquement plusieurs dizaines de Mw, car il n’est pas possible de concevoir des turbines de faible puissance ayant un bon rendement. Il n’est pas envisageable, avant un avenir lointain, de produire par voie électrolytique la grande quantité d’hydrogène nécessaire à l’alimentation de centrales de telles puissances, faute de disposer des excédents suffisants. Ces puissances élevées sont pourtant nécessaires aux heures de pointes extrêmes (100 Gw ou plus) au cours desquels les besoins supplémentaires se chiffrent en dizaines de Gw.
Malgré un coût du procédé qui restera probablement beaucoup plus élevé, les piles à hydrogène ont donc leur place pour la restitution d’énergie dans le domaine des faibles et moyennes puissances, jusqu’à quelques  Mw.

Il existe une autre solution, non répertoriée sur le synoptique : les moteurs « 4 temps » à gaz. Etant à simple étage, leur rendement ne dépasse pas 40%, inférieur d’environ 1/3 aux précédents. Ils ne peuvent donc pas concurrencer les piles à combustible en termes de rendement. Ils sont en revanche notablement moins chers et leur technologie éprouvée depuis plus d’un siècle peut s’adapter à ce nouveau carburant sans difficulté majeure. Pour plus de détails, voir le document de l’AFHYAPC à ce sujet.

8. Méthanation

La difficulté de stockage liée à la légèreté de l’hydrogène amène à envisager son stockage sous une forme chimique différente, et notamment sous forme de méthane (CH4).

La transformation d’hydrogène en méthane peut se faire selon une  variante de la réaction de Sabatier, par réaction sur du gaz carbonique CO2, à température et pression élevées, avec un catalyseur de ruthénium sur alumine selon la réaction:

CO2 + 3 H2 --> CH4 + H2O


Ce procédé présente des avantages et des inconvénients :

Avantages :

  • Le méthane a une enthalpie de combustion par unité de volume 3 fois supérieure à celle de l’hydrogène.
  • Sa température d’ébullition à l’air libre est de 112 °K au lieu de 20°K, ce qui permet une liquéfaction beaucoup moins difficile
  • Sa masse volumique liquide est de 422 Kg/m3 au lieu de 71 Kg/m3.
  • Sa combustion n’augmente pas les émissions de CO2 dans la mesure où il a été produit à partir de la même quantité de CO2.

Inconvénients :
  • La réaction nécessite du CO2 pur.
  • Un tiers de l'hydrogène  sert à fabriquer de l'eau de synthèse.
  • La réaction est exothermique (qui produit de la chaleur). Ceci se vérifie par le fait que l’enthalpie de combustion du méthane produit est inférieure (63%) à l’enthalpie de combustion de l’hydrogène utilisé. Le rendement global est donc nécessairement inférieur à la valeur théorique de 63%. A défaut d’information sur le rendement réel de cette réaction, nous tablerons sur 63%, valeur théorique extrêmement optimiste.
  • Une étape de plus dans la mise en stock, avec les coûts associés. 

9. Centrale à oxycombustion

Ce néologisme désigne une combustion réalisée non pas dans l’air (qui comprend, outre l’oxygène, 79% d’azote et 1% d’argon), mais  dans de l’oxygène pur. A notre connaissance, il n’en n’existe pas actuellement. C’est un moyen de capter le CO2 : la combustion de n’importe quel hydrocarbure dans l’oxygène pur donne des fumées contenant exclusivement de la vapeur d’eau et du CO2, à l’exclusion de l’azote habituellement majoritaire. Après  condensation de l’eau, le CO2 peut être capté directement.

Examinons l’oxycombustion du méthane issue de la méthanation de l’hydrogène. La réaction a déjà été vue plus haut, mais elle est ici sans azote :

Gaz naturel, stœchiométrique :
CH4 + 2 O2  àCO2 + 2 H2O   + 800  Kj
(fumées =         44   +  18x2  =  80 g, soit 10 Kj/g)

La même enthalpie de combustion (800 Kj) s’applique à une masse de fumées de 80 g au lieu de 304g, l’azote majoritaire étant ici absent. Sans chercher à la calculer bien au-delà du domaine des gaz parfaits, la température des fumées sera considérablement plus élevée, très au-dessus de ce que les meilleurs alliages de turbines peuvent supporter. On perdra ainsi la possibilité théorique d’améliorer le rendement de Carnot-Clausius (égal à 1-T2/T1) par augmentation de T1. Reste que l’énergie thermique pourra être utilisée comme dans une combustion à l’air, avec un rendement du même ordre, selon un processus thermodynamique spécifique, probablement mixte, qui reste à développer par les concepteurs de turbines à gaz et à vapeur.

Elle n’a probablement d’avantage déterminant en termes de rendement et nécessite le développement d’une nouvelle famille de turbines. Son seul avantage reste la captation aisée du CO2, qui reste insuffisant aux cours actuels des émissions.

10. Synthèse économique de la filière à hydrogène

Le synoptique ci-dessous reprend l’organisation et les chiffres  justifiés ci-dessus. Pour chaque phase du process :

  • Energie sortante = énergie entrante x rendement
  • Coût énergie sortant = coût énergie entrant/rendement + coût du process.
     

La filière à hydrogène alimentée à partir des excédents d’énergies fatales aboutit aux résultats (optimistes) suivants :
1000 Kwh d’électricité
  è 698 Kwh thermiques d’hydrogène avant stockage
  è 670 Kwh thermiques d’hydrogène après stockage
  è 382 Kwh d’électricité après pile à combustible, ou
  è 389 Kwh d’électricité après centrale à hydrogène à cycle combiné
Après prise en compte des coûts de process sur des bases très optimistes, le stockage étant compté pour zéro hors énergie, les coûts énergétiques sont (au minimum) les suivants :
100 €/Mwh d’électricité verte
  è 168 €/Mwh thermique avant stockage
  è 175 €/Mwh thermique après stockage
  è 357 €/Mwh électrique après pile à combustible, ou
  è 317 €/Mwh électrique après centrale à hydrogène à cycle combiné

La filière à hydrogène et méthanation fait pire :
1000 Kwh d’électricité
  è 698 Kwh thermiques d’hydrogène avant stockage
  è 443 Kwh thermiques de méthane avant stockage
  è 434 Kwh thermiques de méthane après stockage
  è 252 Kwh d’électricité après centrale à gaz à cycle combiné

Avec un prix de revient, process inclus :
100 €/Mwh d’électricité verte
  è 168 €/Mwh thermique après électrolyse 
  è 285 €/Mwh thermique après méthanation
  è 291 €/Mwh thermique après stockage
  è 517 €/Mwh électrique après centrale à gaz à cycle combiné

Conclusion écoomique : Partant d’une énergie déjà trop chère, qui n’existe que grâce à des prix administrés qui traduisent son coût réel de production, achetée autour de 100 €/Mwh, pour un prix de marché de gros à 40 €/Mwh, cette filière arrive, après stockage et restitution, à des prix au moins 9, 8 ou 13 fois supérieurs aux prix de marché, selon ses modalités. Même en pointe, il existe des solutions moins coûteuses.


En variante, considérons la même filière alimentée à partir de l’énergie nucléaire à 40 €/Mwh.  La même filière aboutit alors à des prix au moins 5, 4 ou 7 fois supérieurs au prix de marché. Le cours de l’énergie électrique en pointe atteint très rarement ces niveaux, ce qui rend cette filière impossible faute d’être utilisée avec un facteur d’utilisation suffisant. 

11. Conclusion

Dans l’état actuel des prix et des technologies, la filière à hydrogène n’est envisageable dans aucune de ses variantes. Même :
  • en multipliant par 4 le prix des carburants fossiles utilisés par les centrales de pointe,
  • et en l’alimentant à partir d’électricité nucléaire,
elle aboutirait à des prix égaux (version turbine à CC) ou supérieurs (PàC) à ceux des centrales thermiques de pointe qui seraient alors à :
        (40 x 4) + 15 = 175 €/Mwh

A fortiori son usage pour stocker les excédents d’énergies fatales n'est pas envisageable dans un avenir prévisible.


Annexe : calcul des réservoirs pressurisés